D’abord, il est important de rappeler que les états financiers qui seront présentés pendant l’AGA couvrent une période de sept mois, du 31 août 2023 au 31 mars 2024, ce qui rend difficile la comparaison d’une année sur l’autre. Au début de cette période, Envol n’avait pas de direction, Louis Gauthier n’étant arrivé qu’à la mi-octobre 2023. Et au début du mois de février 2024, c’est Denis-Michel Thibeault qui est devenu le directeur.
Pour ces sept mois d’exercice, le résultat est donc un déficit de 112 372 $, contre 5 630 $ pour les 12 mois de l’année 2023.
Les produits, à savoir les revenus, s’élèvent à 227 249 $ (pour les sept mois de l’exercice financier présenté), contre 480 145 $ pour l’année antérieure. Les charges, qui représentent les dépenses, sont de 339 621 $ pour sept mois. Elles étaient de 485 775 $ pour 2023.
Avant de rentrer dans les détails financiers, Denis-Michel Thibeault admet d’emblée que ce déficit est « significatif ». Selon lui, la situation aurait pu être pire. « Quand je suis arrivé, j’ai commencé par refaire le budget. J’ai fait des réalisations, des prévisions dont je parlerai un peu plus à l’AGA, mais si l’on continuait comme ça, on s’en allait vers un déficit qui aurait dépassé les 200 000 $. »
Un déficit « significatif »
L’actuel directeur général souligne avoir recruté de l’aide externe pour assainir la situation. « Nous avons aussi embauché un expert-comptable pour nous aider dans notre démarche », rajoute Denis-Michel Thibeault.
Interrogé, Louis Gauthier, qui nous répond sans avoir encore pu voir le détail des états financiers, est perplexe. « Ce déficit, j’espère qu’il sera expliqué. Mais, ce n’est pas par rapport à nos dépenses parce que quand j’ai quitté il n’y avait pas loin de 87 000 $ dans les comptes. » L’ancien directeur général, qui a quitté la radio à la fin du mois de janvier 2024, explique comment il comprend les choses. « Ils ont coupé l’année en deux. Pour commencer une nouvelle date fiscale, elle doit commencer positivement. Donc toutes les corrections qui ont été faites, c’est ce qu’on appelle de la ventilation. Ils ont fait la ventilation de la dette sur trois ans, puis ils l’ont toute mise dans une année de fermeture et ils ont gardé le positif dans l’année suivante. C’est une technique comptable qui a été faite pour essayer de passer le blâme sur d’autres personnes. »
La Liberté a contacté Nicholas Douklias, président du CA d’Envol 91, pour lui donner un droit de réponse aux commentaires de Louis Gauthier.
« L’état des résultats reprend les revenus et les dépenses de la période qui est auditée. Les revenus n’étaient tout simplement pas suffisants pour couvrir les dépenses encourues. Nos états démontrent les chiffres exacts entre le 1er septembre 2023 et le 31 mars 2024. Il n’y a pas de passe-passe de comptabilité. »
Pour rappel, quelques semaines avant l’AGA du 17 septembre, le conseil d’administration a annoncé avoir changé les dates de son année fiscale. Les états financiers présentés sont donc audités par la firme BDO, auditeurs indépendants. Le changement d’année fiscale permet notamment à la radio de mieux s’aligner avec les cycles des subventions gouvernementales, qui se terminent les 31 mars.
« Il y a des problèmes qui ne sont pas qu’institutionnels, mais aussi industriels. Toute l’industrie des médias est touchée. Ce n’est plus aussi facile de vendre des publicités qu’au début des années 2000, mais tout le monde doit vivre avec ça. » Denis-Michel Thibeault
Des revenus en baisse
Même s’il n’était pas en poste durant la majorité de ces sept mois, c’est lui qui s’en ira défendre ce bilan devant les membres. Denis-Michel Thibeault souhaite souligner un élément qui lui semble essentiel : si les dépenses ont certes augmenté, c’est surtout les revenus qui ont baissé. « Nous n’avons pas eu autant de rentrées d’argent que l’on pouvait estimer. Nous avons en ce moment un problème d’image, ce qui explique, entre autres, pourquoi les gens donnent moins. La publicité va beaucoup plus aux médias sociaux, par exemple. Il y a des problèmes qui ne sont pas qu’institutionnels, mais aussi industriels. Toute l’industrie des médias est touchée. Ce n’est plus aussi facile de vendre des publicités qu’au début des années 2000, mais tout le monde doit vivre avec ça. »
Denis-Michel Thibeault évoque les annonces publicitaires. En 2023, elles ont rapporté 137 636 $ à la radio. Sur les sept mois terminés au 31 mars 2024, elles sont à 63 059 $. Si l’on rapporte ce chiffre sur 12 mois, la radio accuse une baisse de ses revenus publicitaires d’environ 21 %.
Plusieurs lignes dans la partie des revenus ont aussi connu une importante baisse, en grande partie les subventions : le Conseil de la coopération de la Saskatchewan (33 802 $ en 2023, 4 969 $ en 2024), le Projet plan d’action langues officielles (20 596 $ en 2023, 204 $ en 2024) ou encore l’Association de la presse francophone (33 525 $ en 2023, 109 $ en 2024). « Selon moi, ce sont autant de subventions auxquelles les directions passées n’ont pas appliqué une deuxième année ou qu’elles n’ont pas obtenues », imagine Denis-Michel Thibeault.
« Nous avons entendu les revendications et l’on croit maintenant que c’est aux gens de répondre présents. Il faut que les gens nous écoutent, partagent nos contenus, prennent de la publicité. C’est une invitation que je lance et que je lancerai pendant l’AGA. » Denis-Michel Thibeault
Des explications sur certaines dépenses
Au moins deux lignes de ce bilan le plus récent pourraient interpeller les membres pendant l’AGA. La première qui est résumée sous le mot Déplacements et qui s’élève à 8 588 $ contre 2 078 $ pour l’année 2023. La seconde, ce sont les Honoraires et frais professionnels. Ils étaient de 79 811 $ en 2023, ils sont maintenant à 89 942 $ pour les sept mois étudiés.
« Pour ça, il y a des frais normaux qu’on a dans une année. On a eu aussi une augmentation des frais d’avocats. Également, on y retrouve le contrat avec la compagnie de production de Josey Arsenault. Sa compagnie avait un contrat de 178 000 $ par année, et elle repayait également environ 300 $ par semaine à Envol, car elle était basée en Floride et au Québec. Il y avait donc un technicien pendant deux heures pour s’assurer que l’émission fonctionne. C’est minime comparé à ce que la compagnie de production rapportait par rapport aux dépenses de la compagnie. En fait, le deal n’était pas bon pour Envol », résume Denis-Michel Thibeault.
Pour les dépenses liées aux déplacements, le directeur général éclaircit certains des frais. « Service GTR inc. (l’entreprise de Louis Gauthier) avait une clause dans le contrat qui prévoyait des déplacements qui se sont élevés à 2 500 $. » Louis Gauthier vivait au Québec avant de revenir s’installer au Manitoba pour ses fonctions à la direction général.
« Ça a été prénégocié dans son contrat. Envol n’a fait que remplir ses obligations par rapport au contrat signé », assure Denis-Michel Thibeault. Louis Gauthier confirme que cela avait été négocié et ajoute que « c’est un contrat qui a été entériné par le conseil d’administration. Je me sens très à l’aise avec ça, tout a été autorisé. »
« Aussi, dans cette ligne Déplacements, il faut y ajouter certains évènements. Notamment un party de Noël à hauteur de 1 612 $ », ajoute Denis-Michel Thibeault.
Quelles solutions?
Denis-Michel Thibeault, en poste depuis le début du mois de février, se veut optimiste malgré ces résultats. Il ne s’attend pas à un budget revenu à l’équilibre dès les prochains états financiers, mais travaille pour ramener Envol dans une meilleure situation.
Le dg et son équipe se veulent actifs pour obtenir des revenus. « On fait des demandes de subvention constamment. Nous sommes d’ailleurs en train d’essayer de renouveler jusqu’en 2029 notre demande de programmation avec Patrimoine canadien. On a aussi obtenu la subvention pour renouveler tout le contenu de nos ateliers scolaires. On fait ce qu’on peut en ce moment. »
Pour passer ce moment délicat, Denis-Michel Thibeault espère aussi s’appuyer sur ses 154 membres payants, mais également toute la communauté plus largement. « Comme dans un match de tennis : nous avons entendu les revendications et l’on croit maintenant que c’est aux gens de répondre présents. Il faut que les gens nous écoutent, partagent nos contenus, prennent de la publicité. C’est une invitation que je lance et que je lancerai pendant l’AGA. »