Avec certaines informations de Jonathan SEMAH.
Son héritage, empreint de générosité et de passion, continuera de marquer la francophonie manitobaine.
Le 17 août 2025, c’est une grande dame de la francophonie métisse qui s’en est allée.
Paulette Duguay, en tant que présidente, a été la figure de proue de l’Union nationale métisse Saint-Joseph du Manitoba pendant 10 ans. Des années au cours desquelles elle a défendu la culture et le patrimoine métis et canadien-français.
Justin Johnson, chef de la direction de l’Association des municipalités bilingues du Manitoba (AMBM) et vice-président de l’UNMSJM rappelle, entre autres, que c’est « sous le leadership de Paulette » et son travail que l’Union est passé d’un organisme bénévole à un organisme structuré, financé par le gouvernement fédéral.
L’aînée métisse avait aussi un grand pouvoir fédérateur, notamment auprès de la jeunesse qui comptait tant à ses yeux.
C’est ce que souligne Justin Johnson.
« Elle avait cette chaleur qui faisait toute la différence pour les jeunes. C’est cette même énergie qui m’a embarqué auprès de l’Union nationale comme membre du CA d’abord, puis en tant que vice-président.
« Elle m’a recruté en même temps que d’autres jeunes, elle nous a encouragés à porter haut et fier notre identité métisse, ce qui nous a mené à jouer un rôle actif au sein de la communauté métisse francophone ici. Je lui dois beaucoup. »
Lors de l’Assemblée générale annuelle de l’UNMSJM, en septembre 2024, Paulette Duguay faisait ses aurevoirs à l’Union nationale.
En luttant contre l’émotion, elle adressait à la salle ceci : « Je ne saurais jamais exprimer ma gratitude pour ces dernières années avec vous. J’ai fait de belles rencontres et des amitiés bienveillantes. Ce fut un honneur et un privilège pour moi de servir l’Union. »
C’est Crystal Desrosiers, qui était choisie pour prendre la relève.
« Paulette et moi, on se connaît depuis plus de douze ans. C’était une personne douce, honnête et avec un grand cœur. Elle était toujours positive et au fur et à mesure des années, elle est devenue ma mentore. »
La présidente actuelle se souvient d’une femme qui a donné sa vie pour la cause qu’elle défendait.
« Son énergie faisait que l’on avait envie de travailler avec elle, nous avons accompli des choses incroyables grâce à sa force.
« C’est difficile de m’imaginer dans ce rôle sans elle. Elle m’a beaucoup inspirée et son énergie, sa vision et son amour feront toujours partie de l’organisation à travers nous. »
Michel Lagacé est lui aussi un ami de longue date de Paulette Duguay. L’ancien président de la Société historique de Saint-Boniface (SHSB) se souvient d’une personne « tout à fait remarquable », engagée, engageante.
« On dit facilement d’elle qu’elle avait un grand cœur… je pense que l’on peut dire qu’elle en avait un très grand. »
Ceux qui l’ont connue ne peuvent parler d’elle sans rappeler son engagement profond et sans faille envers la culture et l’histoire des Métis du Manitoba, mais aussi plus largement envers la Réconciliation.
Michel Lagacé rappelle par ailleurs que Paulette Duguay était la descendante d’une des sœurs de Louis Riel.
« Elle était très consciente de ce lien de famille avec Louis Riel. Entre amis, un peu en riant, mais aussi parce que c’était réel pour elle, elle parlait facilement de «mon oncle Louis». »
Une mémère métisse
Au-delà de son rôle auprès de l’Union nationale, Paulette Duguay était une femme portée par son amour pour sa famille. Une famille qui ne se confinait pas seulement aux liens du sang.
« Elle faisait partie de nos vies au quotidien et elle comptait énormément pour ma famille », confie Justin Johnson.
« Elle participait à plusieurs de nos réunions de famille, elle était toujours présente et aimante au- près de mes enfants qui l’appelaient Mamie Paulette. »
Michel Lagacé lui se souvient du rôle essentiel qu’elle a joué dans la création du Réseau des Aînés à l’Université de Saint-Boniface.
« C’était la grand-mère métisse, c’est ce rôle-là qu’elle a joué en tant qu’Aînée à l’USB. Un rôle qu’elle aimait beaucoup parce que ça lui permettait d’exprimer qui elle était, d’où elle venait. Elle tenait aussi beaucoup à parler aux plus jeunes générations. Elle-même avait cinq enfants et des petits-enfants, elle passait beaucoup de temps avec eux, c’était très important pour elle. »
Pour Michel Lagacé, cet attachement fort pour la jeunesse résidait en partie dans le fait qu’elle voyait en elle l’avenir de la communauté métisse francophone et canadienne-française.
Toujours fidèle à cette figure de mémère, Michel Lagacé mentionne l’accueil chaleureux dont faisait preuve Paulette Duguay.
« Elle recevait des gens à sa table à droite et à gauche, dit-il. Pour elle c’était normal, elle faisait des liens, elle était un point d’ancrage pour bien des gens. »
Crystal Desrosiers, elle aussi témoigne de cet amour du lien.
« Elle invitait toujours les gens chez elle, c’était une priorité pour elle d’apprendre à les connaître. J’ai de beaux souvenirs à table, dans sa maison, où elle faisait des galettes », des galettes fameuses, si l’on se fie aux on-dit.
Pour Justin Johnson, Paulette Duguay incarnait une vérité simple, mais profonde.
« Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir ».
Un héritage précieux
Paulette Duguay, qui a aussi été employée dans diverses écoles de la Division scolaire franco-manitobaine (DSFM), a également reçu plusieurs distinctions lors de son parcours pour ses années consacrées au service de la communauté métisse francophone : la Médaille du jubilé de platine de sa Majesté la Reine Elizabeth II ou encore la Médaille du couronnement du Roi Charles III.
À l’annonce de sa mort, les hommages de toutes parts se sont multipliés sur les réseaux sociaux.
L’on a rendu hommage à la fois à la personne qu’elle était, mais aussi l’héritage qu’elle laisse derrière elle.
L’UNMSJM souligne « son engagement indéfectible envers la communauté métisse, son leadership inspirant et sa passion pour la préservation et la promotion de notre patrimoine resteront gravés dans nos mémoires. Elle a marqué notre organisation par sa vision, son dévouement et son amour sincère pour notre peuple. »
De son côté, Nicole St-Onge, présidente du conseil d’administration de la SHSB, a exprimé :
« L’héritage de madame Duguay continuera d’inspirer notre mission de préserver et de promouvoir l’histoire et la mémoire de la francophonie et du peuple métis. »
La Société de la francophonie manitobaine (SFM) a partagé aussi quelques mots à l’égard de Paulette Duguay.
L’organisme salue notamment son engagement. « Paulette a marqué notre milieu par sa détermination à défendre la francophonie manitobaine, à préserver le riche patrimoine métis et à nourrir le dialogue nécessaire à la réconciliation véritable.
« Chaleureuse et déterminée, Paulette laisse un héritage précieux. Sa voix continuera de guider nos communautés vers un avenir solidaire et respectueux. »