En cette rentrée universitaire 2025/2026, les négociations entre le syndicat de l’USB et la partie patronale continuent de piétiner alors que la menace d’une grève pèse sur l’établissement.
Les négociations pour la nouvelle entente collective entre l’Association des professeurs et professionnels de l’Université de Saint-Boniface (APPUSB) et l’Université de Saint-Boniface sont en cours depuis le mois de mai 2024.
À quelques jours de la rentrée scolaire 2025/2026 (1), qui se tient ce jour, force est de constater que la situation s’est enlisée une fois de plus.
Les négociations n’ont abouti à rien et les deux parties ont finalement eu recours à de la médiation les 21 et 22 août 2025.
Toutefois, malgré « les efforts déployés » et soulignés par les deux parties, aucun accord de principe n’a pu être trouvé.
Phi-Vân Nguyen, professeure d’histoire et porte-parole de l’APPUSB, indique que les parties « restent encore très éloignées ».
« Cela signifie que nous ne sommes pas en mesure de dire quand nous allons pouvoir nous revoir. Les parties se sont quittées avec beaucoup de tentatives, mais sans piste de réflexion. »
Elle souligne malgré tout que le syndicat reste ouvert à l’idée de retourner à la table des négociations. L’USB de son côté a lui aussi déclaré sa volonté de rouvrir les discussions.
Rappel du contexte
Pour rappeler un peu le contexte actuel, les offres du patronat sont encore trop loin des attentes de l’APPUSB.
Au moment d’écrire ces lignes, les négociations étant toujours, techniquement, en cours, les détails des attentes n’ont pas pu nous être dévoilés.
L’on sait cependant qu’elles s’axent autour de trois points importants.
La question des salaires, la charge d’enseignement et la collégialité.
Pour le salaire, le président de l’APPUSB indiquait que le syndicat visait « une augmentation de 20 % sur quatre ans ».
L’objectif étant ici d’obtenir une rémunération qui soit paritaire avec leurs homologues anglophones dans les universités de la province.
Phi-Vân Nguyen souligne : « Si l’on acceptait les propositions faites à ce jour, nous laisserions l’écart avec nos homologues se creuser davantage. Aujourd’hui nous gagnons à peu près 20 % de moins qu’eux. »
En rappel, en 2015, la parité était parfaite.
Pour ce qui est de la charge de travail, l’APPUSB aspire à plus d’équilibre et une revalorisation de la collégialité universitaire.
Si les détails des attentes du syndicat n’ont pas pu nous être partagés, la dernière offre en date de la partie patronale, celle du 22 août 2025, est disponible publiquement.
Voilà dans les grandes lignes ce qu’elle propose :
« Une réduction de la charge d’enseignement d’un cours par année (soit trois crédits). Une augmentation généralisée de 11,73 % pour l’ensemble du corps professoral. Une transition vers des grilles salariales comparables à celles de l’Université de Winnipeg pour les rangs professoraux à compter de l’année 2025. Ajustements aux marchés en moyenne de 1,7 % pour les rangs professoraux au 1er août 2025. Le total de l’augmentation salariale pour les professeures et professeurs est en moyenne de 13,59 %. »
Et enfin, « salaire supérieur à la parité plus 0,7 % de la DSFM pour les professionnels-enseignants et les professionnels ».
L’offre ne fait mention nulle part de la notion de collégialité et, pour Patrick Noël, président de l’APPUSB, cela reste insuffisant.
D’abord il indique que la réduction de la charge de travail concerne seulement les professeurs et pas tous les membres de l’APPUSB.
De plus, même s’il reconnaît que l’augmentation salariale proposée a « légèrement augmenté », elle ne permet toujours pas d’atteindre la parité souhaitée.
« Nos calculs montrent qu’avec cette dernière offre, nous sommes à 85 % du salaire de nos comparables, ce qui est le pourcentage le plus bas de ces 20 dernières années ».
Pour le reste :
« On prétend que nous avons la parité + 0,7% pour la DSFM – mais l’échelle de la DSFM s’étend sur 10 échelons alors que chez nous, elle est sur 14. Pour être réellement paritaires à la DSFM, nous devrions avoir le même nombre d’échelons, sans quoi nous perdons au change et sur une carrière cela fait une différence considérable.
« L’Employeur prétend être prêt à utiliser les échelles de U of W à partir de 2025 mais l’utilisation envisagée implique un recul d’échelon pour chacun. C’est en fait une baisse salariale et un vol d’années d’expériences. »
Finalement, avant de recourir à la médiation, les quelque 70 membres de l’APPUSB avaient voté en faveur d’un mandat de grève le 20 mai 2025.
L’administration de l’Université s’est vu donner jusqu’au vendredi 12 septembre pour trouver une issue.
« Si l’on ne fait pas de progrès d’ici là, nous entrerons en grève le lundi suivant », met en garde la porte-parole du syndicat.
L’USB de son côté assure être prêt à retourner à la table des négociations et ne se prépare pas « pour l’instant » à faire face à une grève.
Elle n’a pas été en mesure de se prononcer sur le contenu des offres proposées. « On attend la suite de la part de l’APPUSB. »
Du nouveau bientôt?
Après l’échec de la médiation, le syndicat a pris l’initiative de se tourner vers la communauté. Une campagne de lettres de soutien a donc été entamée. L’APPUSB, qui aurait, au moment d’écrire ces lignes, recueilli plus de 500 lettres envoyées directement au rectorat ainsi qu’au bureau des gouverneurs.
Parmi les signataires, Phi-Vân Nguyen fait mention de plusieurs figures politiques et leaders de la communauté franco-manitobaine.
« Quelques étudiants, ça vient de collègues ici au Manitoba, mais aussi ailleurs au Canada et cette solidarité fait du bien. »
Quant à cette campagne de lettres, l’Université de Saint-Boniface indiquait ce vendredi 29 août en avoir reçues/consultées 339, en précisant avoir relevé des doublons.
À propos de ces courriels de soutien envers ses employés, l’USB indiquait ceci :
« Après vérification de certains courriels un peu suspects, nous avons constaté que le système ne comporte pas de processus d’accusé de réception ni de vérification d’identité. »
La directrice des communications de l’Université, Nathalie Roche, fait mention d’un signataire en particulier qui assure n’avoir jamais envoyé de lettre.
« L’on remet un peu en cause l’intégrité de cette campagne », conclut-elle.
Interrogé à ce sujet, Patrick Noël défend qu’un processus de vérification d’identité est bel et bien en place, il reconnaît que des doublons sont possibles et probablement dus à un glitch.
Quoi qu’il en soit, la campagne de lettres aura au moins eu de positif la chose suivante :
« Le comité de négociation de l’APPUSB a vraiment été touché par cet élan de solidarité et nous envisageons de déposer une rétroposition en début de semaine prochaine, explique Phi-Vân Nguyen. Le comité a décidé de redoubler de créativité dans l’espoir de débloquer la situation. »
L’APPUSB devrait donc, au moment de la parution de cet article, avoir fait parvenir une contre-proposition à la partie patronale et l’évolution des négociations peut être suivie sur notre site internet la-liberte.ca (2).
Après tout, le recours à la grève n’est pas l’option privilégiée pour le syndicat et ses membres.
« C’est une perspective qui ne nous réjouit pas. On travaille dur pour préparer nos cours et on ne veut pas que la rentrée ou la session soit retardée. On voit que la situation est critique et à quel point les étudiants et les parents s’inquiètent.
« Et on attend une entente de principe le plus tôt possible, mais surtout une entente qui est juste et équitable. »
(1) Article écrit le vendredi 29 août.
(2) Ce mercredi 3 septembre, l’on a appris que les négociations devraient reprendre.
Initiative de journalisme local – Réseau.Presse – La Liberté