À la suite du Gala Raising Our Voices du 17 novembre 2025 avec Michelle Douglas, directrice générale du Fonds Purge LGBT et ancienne membre des Forces armées canadiennes, le MCDP a décidé de prolonger l’exposition Amours cachés : la purge LGBT au Canada.

Congédiée en 1989 pour son orientation sexuelle, son expérience est commune à plus de 9 000 personnes au Canada.

Le Musée canadien pour les droits de la personne (MCDP) a annoncé la prolongation de son exposition Amours cachés : la purge LGBT au Canada.

Les visiteurs pourront ainsi découvrir, ou redécouvrir, cette exposition jusqu’à l’automne 2026. Lors du Gala Raising Our Voices, qui se tenait au Musée canadien pour les droits de la personne, Michelle Douglas, directrice générale du Fonds Purge LGBT, a rappelé que pour le musée, la Purge LGBT est « l’une des violations à grande échelle des droits des travailleurs les plus longues de toute l’histoire canadienne ».

En partageant son histoire personnelle, Michelle Douglas revient sur son entrée dans les Forces armées canadiennes en 1986, elle est alors âgée de 22 ans.

Elle explique combien l’armée représentait pour elle un lieu d’épanouissement, où la discipline et l’esprit d’équipe lui convenaient parfaitement.

« C’est devenu une part de qui j’étais et de comment je me percevais. J’ai obtenu les meilleurs résultats dans chacun des cours que j’ai suivis. J’étais en route vers une carrière prometteuse, mon mérite était évident. »

En 1986, l’Armée canadienne appliquait toujours une politique intitulée Sexual Deviation: Investigation, Medical Examination and Disposal.

Et bien que l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, était déjà en vigueur, « ce n’était pas le cas pour tout le monde », rappelle Michelle Douglas.

Surveillance

« Ce que mes supérieurs ne savaient pas, et ce que j’ignorais moi-même à l’époque, c’est que j’étais déjà sous enquête par l’unité de police militaire à laquelle j’avais été affectée, et les choses ont très vite dégénéré. »

Un matin, son supérieur l’emmène sous un faux prétexte, c’est le début de deux jours d’interrogatoires. La police militaire la questionne sur son orientation sexuelle et sur des détails intimes de sa vie.

« On a aussi essayé de me soutirer des noms d’autres personnes gays ou lesbiennes que je connaissais dans l’armée. Ma loyauté envers le Canada a été remise en question, et ce fut une expérience extrêmement difficile. Plus tard, j’ai été envoyée à Ottawa, où les interrogatoires ont continué, et, alors attachée à une machine et à un détecteur de mensonges dans un centre de la police militaire, j’ai admis être lesbienne. »

Une parmi des milliers, elle explique devant l’audience le caractère cruel de cette traque gouvernementale et du harcèlement mis en place. Suite à cela, elle a été congédiée en 1989, un renvoi accompagnée d’une mention non employable en raison de son homosexualité.

La politique de la Purge, explique-t-elle, « était conçue pour nous harceler, nous traquer, parfois nous criminaliser ou nous institutionnaliser, et toujours nous diminuer ».

Malgré le poids du récit, Michelle Douglas insiste tout autant sur la force collective, la résistance et la résilience car « les gens ont résisté, dit-elle, ils ont protesté contre la discrimination, sensibilisé le public et même poursuivi le gouvernement ».

Son propre recours judiciaire a contribué à la fin de cette politique qui ciblait et purgeait les personnes 2SLGBTQI+ de l’armée, un tournant qu’elle décrit comme faisant partie de son parcours de guérison.

Mise en garde

Son discours, prononcé au sein du musée, prend un sens tout particulier.

Interrogée sur cette résonance, elle affirme que ce lieu est essentiel pour « réfléchir aux victimes d’injustice et aux moyens de favoriser la réconciliation et la guérison », mais aussi pour « motiver les gens à poursuivre les luttes actuelles pour les droits humains ».

Toutefois, aujourd’hui encore, Michelle Douglas appelle à la vigilance. En effet, pour elle, le passé doit servir d’exemple, mais aussi de mise en garde. Ainsi elle assure que la Purge LGBT n’est pas seulement une tache sur l’histoire du Canada, mais un avertissement car « cela nous montre, avec une brutalité saisissante, comment la peur, sous couvert de sécurité nationale, peut devenir un outil pour persécuter les minorités ».

« Soutenir la diversité, dit-elle, c’est une question de dignité, de justice, de respect et de force. Les préjugés, les peurs irrationnelles, les malentendus et les biais politiques, religieux et culturels profondément ancrés continuent d’exister contre la communauté 2SLGBTQI+. »

Pour conclure, Michelle Douglas choisit de rappeler avec force des principes simples mais essentiels : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Les valeurs canadiennes telles que l’égalité, la primauté du droit et la démocratie sont précieuses et particulières. Nombreux sont ceux qui ont tout sacrifié pour les protéger, c’est notre devoir de leur rendre hommage ».

Avant d’inviter l’assemblée à découvrir la galerie de l’exposition Amours cachés : la purge LGBT, elle laisse à chacun un dernier appel : « Je crois que nous sommes meilleurs lorsque nous plaçons la dignité, la justice, le respect et l’égalité au cœur de tout ce que nous faisons. Et si vous pensez que je suis une rêveuse, je ne suis pas la seule ».

S’il est maintenant reconnu qu’il y a eu des victimes de cette Purge LGBT, les victimes ne disposaient pas encore d’un lieu public de mémoire.

Le gouvernement avait annoncé la création d’un futur monument national, à ce jour prévue pour l’été 2026. Le futur monument national 2SLGBTQI+ Thunderhead commémorera les victimes et la résilience de la communauté 2SLGBTQI+, une symbolique qui complète ainsi le travail de mémoire entrepris par l’exposition.