La grande finale de la Coupe des nations africaines du Canada (CACN) s’est tenue le 2 août, clôturant un évènement estival marqué par une célébration vibrante de la culture, de l’esprit communautaire et, bien sûr, de la passion du soccer. Voici un retour sur les moments forts de cette édition.
Depuis sa création en 2019, la Canada African Cup of Nations – Manitoba (CACN) a connu une croissance remarquable.
« Nous avons constaté une forte progression au fil des ans. Quatre communautés y participaient la première année, puis huit l’année suivante, ensuite dix. Et maintenant, chaque année, de plus en plus de communautés nous rejoignent », explique Gode Katembo, fondateur et président de l’association de la CACN.
L’expansion à l’échelle nationale semble désormais inévitable.
Mais ce tournoi, qui s’étend annuellement sur une période de 7 à 8 semaines, a commencé ici, au Manitoba.
« En 2019, elle a débuté sous le nom de Manitoba African Cup of Nations. En 2022, nous avons décidé de changer notre nom pour devenir la Canada African Cup of Nations. Nous avons aussi la Coupe d’Afrique des nations de l’Ontario, qui vient de se terminer et qui a attiré plus de 3 000 spectateurs lors de la finale. »
L’édition de cette année a été une nouvelle réussite pour le tournoi, réunissant le Cameroun, le Congo, le Nigeria, la Côte d’Ivoire, l’Érythrée, le Ghana, le Soudan du Sud, la Tanzanie, le Rwanda, le Kenya, le Sénégal, ainsi que des pays invités comme Haïti et l’Ukraine.
Avec une saison qui s’achève en beauté, l’avenir de la CACN s’annonce prometteur.
« L’année prochaine, nous nous rendrons à Calgary pour la Coupe d’Afrique des nations de l’Alberta. », annonce Gode Katembo.
Le soccer comme langage universel
Alors que de nouveaux horizons s’ouvrent à la CACN, la mission, elle, demeure inchangée depuis le tout début.
« Le football est une langue que nous pouvons tous comprendre. Nous faisons ceci pour les jeunes, pour leur offrir un espace sécuritaire. Nous le faisons aussi pour célébrer notre héritage en tant que communautés africaines », explique Gode Katembo.
« Ce projet a été lancé il y a sept ans avec une seule question en tête : comment unir nos communautés africaines ? » poursuit-il.
« Nous sommes souvent divisés par la religion ou nos régions d’origine, mais il y a une chose qui nous rassemble tous : le soccer. Il brise les barrières, il unit. On n’a pas besoin de parler la même langue ou même de se comprendre. Tant que tu sais botter un ballon, on peut être amis. »
Pour le président de l’association, la CACN est bien plus qu’un tournoi : « C’est un moyen d’impliquer la communauté, de créer des liens, de partager un dialogue et de forger une identité collective. Il y a tellement de communautés qui n’ont pas l’occasion de se rencontrer dans la vie de tous les jours. À travers le tournoi, on découvre des gens d’horizons divers, uniques à leur manière, mais tous issus du continent africain. »
Cette dynamique de rencontre et de solidarité est également ressentie sur le terrain.
« Cela crée une vraie amitié entre les pays participants », témoigne Paul Agyemang, entraîneur et ancien joueur de l’équipe du Ghana.
« On sent l’enthousiasme monter à l’approche de la Coupe. Pour beaucoup d’entre nous, on vit dans une routine boulot-dodo, avec peu d’occasions de s’impliquer dans des activités sociales. Ce tournoi nous apporte un bien-être physique, émotionnel et mental. En dehors de l’école ou du travail, la CACN nous permet de rester actifs, de rencontrer du monde et de prendre soin de notre santé mentale. »
Au-delà du sport, la CACN se veut aussi une plateforme culturelle. Partager les traditions, renforcer l’identité, et surtout reconquérir une certaine fierté culturelle à travers le jeu. Cette année, l’Ukraine a été accueillie en tant qu’invitée spéciale, dans un esprit de fraternité et d’échange culturel.
« Nous voulions inviter d’autres personnes à découvrir comment les Africains jouent, à découvrir notre culture. Pendant longtemps, c’était à nous de nous adapter, de copier les autres. Mais aujourd’hui, il est temps de faire découvrir notre jeu, notre style, notre communauté. L’an prochain, vous verrez peut-être plus d’équipes non africaines. On ouvre nos portes et on dit : bienvenue. Venez goûter à la saveur du sport, de la culture et du divertissement africains », conclut Gode Katembo.
La fierté partagée
Sur le plan individuel, la CACN joue un rôle tout aussi important dans le parcours identitaire de plusieurs jeunes. « Il y a des Africains qui sont ici, au Canada, et qui n’ont jamais vécu dans leur pays d’origine. Ils ne connaissent pas vraiment leur culture ou leur communauté », souligne Messager Mumbere, membre du personnel de l’association.
« Ce tournoi leur donne l’opportunité de représenter leur pays. Ça offre à la communauté africaine une nouvelle source de fierté. »
Gode Katembo partage ce constat : « Cela a créé un véritable sentiment d’appartenance. Un sentiment de fierté. Lorsque les gens jouent pour leur pays, ils sont fiers d’être là. Nous avons des jeunes nés ici, qui n’ont peut-être pas eu beaucoup d’occasions de se connecter à leurs racines. Jouer à la CACN leur permet de renouer avec leur identité, leur héritage, leur culture. »
L’un des aspects uniques du tournoi : les équipes transcendent parfois les origines nationales pour favoriser l’inclusion. Il ne s’agit pas seulement de représenter un drapeau, mais de bâtir une communauté, peu importe ses origines.
« Nous les appelons des communautés, pas seulement des équipes », explique Gode Katembo.
« Certains pays comptent une population moins nombreuse ici, donc certains joueurs rejoignent ces communautés afin de les aider à constituer une équipe plus forte. »
C’est le cas d’Ebalo Jesus Amuri, joueur d’origine congolaise, qui a représenté le Ghana cette année en tant que latéral gauche.
« Là, c’est ma deuxième année dans le tournoi. En 2023, j’ai joué pour le Rwanda, et cette année, c’est le Ghana qui m’a invité à rejoindre leur équipe », raconte-t-il.
« Honnêtement, je voulais juste participer parce que j’adore le foot. Dès que je suis entré dans l’équipe, ils m’ont accueilli à bras ouverts. Ils m’ont fait sentir comme si j’étais Ghanéen pendant tout le tournoi. Et ce n’était pas juste l’équipe : même les spectateurs dans les gradins me soutenaient comme l’un des leurs. C’était une expérience nouvelle pour moi, mais incroyable. Pouvoir représenter une autre communauté, c’est quelque chose de spécial. »
Cette solidarité n’échappe pas aux entraîneurs.
« C’est magnifique de voir ces joueurs porter notre maillot avec autant de fierté », affirme Alexandre Kouassi-Lenoir, entraîneur et ancien membre de l’équipe de la Côte d’Ivoire.
« Ils se donnent à 100 %, même s’ils ne viennent pas du pays qu’ils représentent sur le terrain. C’est une belle preuve d’unité et de respect. »
Une première couronne pour le Soudan du Sud
Comme dans toute compétition, le moment le plus attendu reste la grande finale : qui repartira avec le trophée tant convoité.
Cette année, une surprise est venue bousculer les pronostics habituels. « Nous avons deux nouveaux fina- listes, différents de ceux des années précédentes : le Ghana et le Soudan du Sud », souligne Gode Katembo.
Le match s’est avéré à la hauteur des attentes.
Dans un duel intense, le Soudan du Sud a réussi un incroyable retour en toute fin de match, s’imposant 4 à 3 contre le Ghana. Une victoire historique pour l’équipe, qui soulève le trophée pour la toute première fois