Par Michel LAGACÉ.
La Semaine nationale de l’immigration francophone 2025 qui se déroulait la semaine dernière a fourni une nouvelle occasion de s’interroger sur l’avenir de la francophonie. Car l’importance de l’immigration est indéniable : en 2023-2024, par exemple, presque toute la croissance de la population canadienne (99 %) était attribuable à la migration internationale (1). Elle joue ainsi un rôle déterminant dans le poids démographique et la composition de la population francophone.
En 2021 au Manitoba, 112 115 résidents pouvaient soutenir une conversation en français, une augmentation de 2 175 par rapport à 2016 et de 11 410 par rapport à 1991. Cependant, il n’empêche que le poids démographique des francophones a diminué, passant de 9,3 % de la population en 1991 à 8,4 % en 2021.
Et cette année-là, seulement 37 750 personnes, ou 2,8 % de la population, parlaient le français régulièrement à la maison. Pour renverser cette tendance, le Réseau en immigration francophone du Manitoba cherche à favoriser l’immigration francophone et à améliorer la capacité d’accueil de la province. Pour maintenir le poids démographique des francophones, il recommande de relever le seuil d’immigration francophone à 15 % de tous les immigrants désireux de s’installer au Manitoba, comparativement à 5 % en 2024.
Pour assurer l’arrivée et ensuite l’intégration d’immigrants francophones, de nombreux obstacles devront être surmontés. Entre autres, comme c’est déjà le cas, il leur faudra trouver un emploi et leurs acquis professionnels devront être reconnus. Il faudra assurer la disponibilité de logements et des services de santé de même que des services de garde francophones. Et, s’ils ne connaissent pas l’anglais, il leur sera nécessaire de l’apprendre pour pouvoir fonctionner convenablement au Manitoba.
Reconnaissons aussi cette vielle vérité que la transmission intergénérationnelle de la langue demeure fragile, souvent freinée par l’attrait de l’anglais et la faible présence du français dans l’espace public. Les écoles francophones sont toujours appelées à jouer un rôle clé, mais elles doivent continuer à composer avec des ressources limitées et le défi d’attirer et de retenir les élèves issus de familles exogames ou anglophones.
L’avenir du français au Manitoba dépendra sûrement de l’engagement des pouvoirs publics à appuyer la dualité linguistique. Et comme toujours, il reposera aussi sur la capacité des francophones à se mobiliser, à valoriser leur langue et à la transmettre aux prochaines générations. En contribuant leur expérience, leur vue sur le monde et leurs points de repère à mesure qu’ils voudront prendre leur place dans la société et dans les organismes francophones, les nouveaux arrivants sont appelés à jouer un rôle déterminant dans cet avenir.
C’est déjà un fait : l’ancienne homogénéité de la société canadienne-française est du passé. La nouvelle francophonie aura à choisir la manière dont elle va surmonter les obstacles qui vont forcément se présenter. Car rien n’est jamais acquis.
(1) Voir Réseau en immigration francophone du Manitoba, Se préparer à l’accueil d’un plus grand nombre de personnes immigrantes francophones au Manitoba, 2025.


