Yvon Godin
Yvon Godin

Quand les élections fédérales ont été déclenchées et que le parlement a été dissout, le 26 mars, ce sont plusieurs centaines de projets de loi qui sont morts au feuilleton. Ressusciteront-ils après les élections?

Camille SÉGUY

Quand le parlement canadien a été dissout, le 26 mars dernier, plusieurs centaines de projets de loi émanant de la Chambre des Communes comme du Sénat, et du Parti conservateur comme de l’Opposition, ont été avortés alors qu’ils étaient en discussion.

Selon le politologue Raymond Hébert, revoir ou non les projets de loi de l’Opposition à l’ordre du jour des deux chambres dépendra de l’issue des élections fédérales le 2 mai.

« Si les Conservateurs obtiennent la majorité, ou une quasi-majorité, les projets de loi de l’Opposition risquent fort d’être rejetés, prédit-il. L’Opposition va y penser à deux fois avant de remettre sur la table un projet qui a toutes les chances d’être rejeté.

« Pour que le contraire se produise, il faudrait soit que la majorité tombe d’accord avec l’Opposition, soit que tous les députés de l’Opposition soient présents en chambre le jour du vote, poursuit-il. Et encore, ça pourrait ne pas être suffisant. »

En revanche, à moins d’un retournement dans les sondages, qui donnent pour le moment Stephen Harper vainqueur, Raymond Hébert ne doute pas de revoir la plupart de l’agenda conservateur mort au feuilleton.

« Les projets de loi présentés risque d’être plus intenses, surtout la question du crime et de l’immigration clandestine », renchérit le politologue.

Le projet de loi controversé C-391 de la députée conservatrice manitobaine Candice Hoeppner, sur l’abolition du registre des armes d’épaule, fait partie de ceux qui seront ramenés au débat.

« On s’est toujours opposés au registre des armes d’épaule qui est coûteux et inefficace, a déclaré le chef du Parti conservateur, Stephen Harper, dans un communiqué du 4 avril. Nous devons concentrer nos ressources contre les vrais criminels. Voilà pourquoi un gouvernement conservateur majoritaire réélu abolira une bonne fois pour toutes le coûteux et inutile registre des armes d’épaule. »

Plusieurs membres de l’Opposition sont tout de même d’ores et déjà déterminés à redéposer leurs projets de loi quels que soient les résultats des urnes le 2 mai.

Parmi ces projets, deux touchent la francophonie. Le

S-220 de la sénatrice Chaput, pour modifier la Loi sur les langues officielles en ce qui a trait aux communications avec le public et aux prestations de services fédéraux en français, et le C-232 du député néo-démocrate acadien, Yvon Godin, pour rendre obligatoire le bilinguisme des juges à la Cour suprême du Canada.

« Si j’obtiens un nouveau mandat, je présenterai à nouveau mon projet de loi, affirme Yvon Godin. C’est une question de temps. Je continuerai jusqu’à ce que le bilinguisme des juges à la Cour suprême devienne une réalité car c’est inacceptable que les deux langues officielles n’y soient pas reconnues, alors qu’elles le sont dans les instances de justice fédérale inférieures. »

Le projet de loi d’Yvon Godin était au Sénat depuis avril 2010, gardé à l’étude par la majorité conservatrice du Sénat.

« Mon projet de loi était l’un des cinq sujets dont on parlait le plus au Canada cette année, poursuit-il. Donc c’est un bon débat. »

Quant au S-220, Maria Chaput et son bureau se préparent déjà à le redéposer dès que le parlement sera rouvert. « Je ne lâche pas car ce changement est nécessaire pour la survie des communautés francophones et acadienne au Canada », assure-t-elle.

« Même s’il faut repasser par le dépôt et toutes les lectures, ce sera plus facile car les gens qui avaient déjà parlé pourront reparler, poursuit-elle. Beaucoup de sensibilisation à l’importance de ce projet de loi a déjà été faite. »

Maria Chaput a en effet déjà des appuis, notamment celui du sénateur conservateur Gerald Comeau, leader adjoint du gouvernement. « Je rappellerai au sénateur Comeau sa promesse d’envoyer mon projet de loi en comité, assure Maria Chaput, et je serai encore plus stratégique pour aller chercher d’autres appuis. »