Une artiste de Comlombie-Britannique, Karen Hibbard, est à Saint-Boniface pour réaliser au Jardin de sculptures une œuvre éphémère qui invite à la méditation.
Par Camille Séguy
Artiste depuis quelque 30 ans, Karen Hibbard est passionnée d’art imprimé et d’art multimédias. Mais cette artiste d’origine torontoise, ayant vécu à Winnipeg et résidant maintenant à Victoria en Colombie-Britannique, a aussi pour passion la méditation. Dans le Jardin de sculptures de la Maison des artistes visuels francophones (MDA), elle a décidé de marier les deux.
« Toute ma vie, j’ai voulu faire de la méditation car je suis quelqu’un de très anxieux, confie Karen Hibbard. Quand on médite, les idées entrent mais elles sortent aussi. On n’est ni dans le passé, ni dans l’avenir, mais dans le moment présent. C’est là qu’on peut vraiment vivre et apprécier les choses. »
Pour cette femme de 51 ans, une façon idéale d’être dans le moment présent est la course à pied ou la marche. Or, le labyrinthe évoque l’idée de la marche, de la navigation et du changement de direction dans le moment présent. C’est donc le thème de sa sculpture éphémère, qui sera érigée jusqu’au 30 août prochain.
« Le labyrinthe arrête la course de la vie, affirme Karen Hibbard. C’est un endroit de réflexion, tranquille. Du fait de sa structure, il faut se concentrer davantage. »
Le directeur artistique de la MDA, Eric Lesage, confirme que « dans un labyrinthe, on suit un chemin mais il serpente tellement que ça donne l’impression de changer de direction. Ça fait penser. De plus, l’idée de labyrinthe se prête bien à celle d’un jardin car ce sont deux espaces où on est invités à ralentir ».
Le labyrinthe de Karen Hibbard est matérialisé au sol par des bandes de plastique clouées à la terre, formant un grand dessin imprimé sur l’herbe. « J’aime les lignes serpentées d’un labyrinthe, confie-t-elle. L’art imprimé repose beaucoup sur les lignes. C’est sa base. »
S’adapter
Karen Hibbard a intitulé son œuvre Audiolabyrinthe car les sons sont importants pour elle dans le processus de méditation.
« Le visuel est pour moi une vocation, un travail, donc pour vraiment me relâcher, je dois me concentrer sur d’autres sens comme l’audition, explique-t-elle. Ne pas parler et écouter les bruits réduit la nervosité, ce qui crée une meilleure créativité. »
Elle remarque cependant qu’il sera « difficile dans le Jardin de sculptures de contrôler les sons, notamment avec la construction dans la rue. J’ai d’ailleurs dû m’adapter à cette situation car j’avais dans l’idée de créer une ambiance de méditation, de tranquillité dans un jardin d’habitude calme, mais ce n’est plus le cas en ce moment!
L’artiste invite tout de même le public à un exercice auditif par le mot “écoutez”, qu’elle a écrit au ruban sur le sol, au centre de son labyrinthe.
Pour sa part, Eric Lesage voit dans ce changement de plans matière à se réjouir. « Ce que j’aimais dans le projet de Karen Hibbard, c’était la possibilité de vraiment travailler avec l’environnement et de voir l’œuvre réagir avec, confie-t-il. Quels seront les bruits? La pluie va-t-elle affecter la sculpture? L’herbe va-t-elle pousser et arracher les clous? Il y a une part d’inattendu qui rend l’œuvre intéressante. »
L’artiste révèle aussi qu’il est « possible que le soleil laisse une marque jaune sous les bandes de plastique, et donc que la sculpture éphémère dure plus longtemps que son temps d’exposition, mais rien ne le garantit jusqu’à ce que le ruban soit enlevé. Le processus est une constante expérimentation ».
Par ailleurs, Eric Lesage souligne la performance de la création de Karen Hibbard, en plus de l’œuvre en elle-même. On peut voir comment l’artiste travaille, comment elle évolue et dialogue avec son espace, son environnement. On obtient non seule-ment une sculpture éphémère, mais aussi une performance. Ça ajoute une valeur à l’œuvre présentée. »