UN CONCERTO DE MOZART ÉMOUVANT
C’est dans l’adversité de la vie que Mozart a trouvé l’inspiration de certaines de ses plus belles compositions. Les périodes où il était durement éprouvé par la perte d’un enfant, de graves problèmes de santé et de grandes difficultés financières provoquaient chez Mozart un élan de créativité effervescente. Les oeuvres qu’il compose dans ces moments difficiles ne s’apitoient pas sur ses malheurs mais les transcendent dans une joyeuse célébration de la beauté et la grandeur de la vie. C’est dans de telles circonstances qu’il a composés le merveilleux Concerto pour piano no 25 que l’O.S.W. avait inscrit au programme du concert Masterworks présenté les 15 et 16 février 2013.
La pianiste canadienne Angela Cheng, qui avait joué le concerto lors de sa dernière exécution par l’orchestre en 1994, a été invitée à l’interpréter de nouveau. Mme Cheng est une artiste mature et accomplie, qui n’a plus à faire la démonstration de ses nombreuses qualités. Elle a parfaitement mémorisé et intériorisé cette oeuvre qu’elle peut jouer sans effort, donnant l’impression de se laisser porter par la musique. Une musique dont elle exprime à merveille toutes les couleurs et tous les tons. Elle a été très bien accompagnée par l’orchestre, qui était en grande forme. Les musiciens savent et aiment jouer Mozart. Ils ont été excellents. Alexander Mickelthwate a assuré une direction efficace, assurant un très beau mariage du piano et de l’orchestre. L’audition de ce concerto fut un émouvant enchantement du début à la fin.
La deuxième partie de programme était composée d’extraits des trois suites pour orchestre du ballet Roméo et Juliette, de Serge Prokofiev. Encore une fois, Alexander Mickelthwate a choisi une oeuvre sans lien de style ou d’esprit avec l’oeuvre présentée en première partie du programme. Tout intéressante qu’elle soit, l’oeuvre de Prokofiev nous amenait dans un univers thématique et musical qui n’était pas en continuité avec le concerto de Mozart. Après avoir entendu une si belle exécution du concerto, on aurait souhaité une oeuvre qui nous garde dans le même esprit, par exemple une symphonie de Beethoven.
Le style de la musique de ballet de Prokofiev avait évolué vers une musique plus lyrique et harmonique lorsque le Kirov de Leningrad lui a commandé le ballet Roméo et Juliette en 1934. C’est un long ballet que les compagnies ont mis du temps à accepter, plusieurs danseurs le considérant impossible à danser. Comme son ballet ne pouvait être créé, Prokofiev a arrangé trois suites pour orchestre pour au moins en faire connaître la musique. Le ballet fut finalement créé à Brno en 1938 et présenté pour la première fois par le Kirov en 1940. Ce fut un succès et le ballet est maintenant considéré comme une des grandes oeuvres de Prokofiev et du répertoire de la danse.
Pour le concert, Mickelthwate a choisi dix extraits dans les trois suites pour former un ensemble relatant les faits saillants de l’histoire de Roméo et Juliette. Comme il s’agit d’une musique de ballet, les thèmes sont très descriptifs par leurs rythmes, leurs couleurs et leurs mélodies. Le tout a été fort bien exécuté, Mickelthwate dirigeant avec assurance un style de musique dans lequel il excelle. L’orchestre sonnait bien, sauf dans certains fortissimos déformés par les déficiences acoustiques de la salle. Les solistes de tous les pupitres ont été excellents.
Nous avons remarqué la présence de plusieurs jeunes à ce concert, signe encourageant que l’auditoire se renouvelle.
Orchestre symphonique de Winnipeg
Salle de concert du Centenaire, le 16 février 2013
Alexander Mickelthwate, chef
Angela Cheng, piano
Concerto pour piano no 25 en do majeur, K. 503, Wolfgang Amadeus Mozart
Roméo et Juliette (Extraits des suites pour orchestre) Serge Prokofiev