Par Mamadou Ka
Nelson Mandela, 94 ans, est hospitalisé à Pretoria pour une grave infection pulmonaire depuis le samedi 8 juin. À chaque nouvelle alerte, à chaque nouvelle hospitalisation, le pays tout entier chante et prie pour le père de la nation moderne sud-africaine.
Admiré à travers le globe, Mandela reste une source d’inspiration pour tous, car il est, sans aucun doute, l’expression sinon le symbole du pardon, du consensus et de la réconciliation au sein d’une nation profondément divisée et caractérisée par une haine viscérale entre les différents groupes raciaux. Une nation déchiquetée par la politique raciste de l’apartheid mise en place de 1948 à 1991 par la minorité blanche à l’encontre des autres groupes, surtout les Noirs représentant la majorité de la population. Mais il faut dire qu’en réalité cette politique a débuté en 1652 avec la création de la colonie du Cap par les Afrikaners.
D’aucuns auraient crû qu’après 27 années passées en prison, Mandela en serait sorti avec de la haine pleine le cœur. En 1991, dès sa libération, il prêche le pardon et la réconciliation, et ce, malgré la discrimination et l’exclusion dont souffre son peuple. En 1994, Mandela accède au pouvoir et refuse le culte de la personnalité politique pour finalement personnifier la réconciliation et l’humanisme. Il s’attèle plutôt à construire une démocratie multiraciale en Afrique du Sud. Une démocratie qui certes n’est pas parfaite, mais qui a le mérite d’avoir facilité l’alternance, car depuis Mandela, trois présidents se sont succédé au pouvoir.
Doit-on s’inquiéter de l’avenir de l’Afrique du Sud après Mandela?
La réponse à cette question est tout simplement « oui », car quand on regarde de près la situation socioéconomique sud-africaine, elle est loin d’être parfaite. En effet, malgré l’avènement de la démocratie multiraciale, les relations raciales sont loin d’être au beau fixe. Le taux de chômage est d’environ 25 % et la pauvreté et les inégalités sociales signent et persistent. Et la violence est devenue endémique dans ce pays de consensus et réconciliation de Mandela. Sur le plan institutionnel, l’État et l’African National Congrès (ANC) au pouvoir sont gangrenés par la corruption. Un quelconque redressement de la situation socioéconomique n’est possible que si le président Jacob Zuma et ses successeurs adhèrent la philosophie du consensus et de réconciliation sur laquelle Mandela a construit son Afrique du Sud. Pourront-ils faire vivre et pérenniser les enseignements de Mandela? C’est la question à mille dollars.