Directeur du tout nouveau Centre de recherche national pour la vérité et la réconciliation, Ry Moran a pour mission de faire connaître davantage l’expérience des pensionnats indiens à tous les Canadiens.

Ry Moran : « C’est nécessaire de se rappeler pour qui on fait notre travail d’archives : les survivants des pensionnats, leurs descendants et les Canadiens qui souhaitent la réconciliation. »
Ry Moran : « C’est nécessaire de se rappeler pour qui on fait notre travail d’archives : les survivants des pensionnats, leurs descendants et les Canadiens qui souhaitent la réconciliation. »

« Entre 1867 et 1970, le Canada a activement tenté d’assimiler les Autochtones, en créant les pensionnats indiens, rappelle le directeur du nouveau Centre de recherche national pour la vérité et la réconciliation, Ry Moran. Placés dans ces écoles visant à les soumettre à la culture européenne prédominante, des jeunes enfants ont été dérobés de leurs familles, de leur culture et de leur identité. Si nous voulons progresser comme pays, nous devons faire face à ce passé, en reconnaissant l’impact qu’ont eu les pensionnats sur ses victimes, sur leurs familles et les nations autochtones. En quelque sorte, c’est mon travail de faciliter cette réflexion. »

Ancien directeur de la collecte des témoignages pour la Commission de vérité et de réconciliation du Canada (CVR), Ry Moran est en effet responsable d’une des plus importantes collections de documents au Canada. Depuis 2008, la CVR – dont le dernier évènement avait lieu à Edmonton, en mars dernier – a collecté quelque 6 700 témoignages des survivants des pensionnats indiens, ainsi que toute personne affectée par l’expérience des pensionnats.

De plus, la CVR a amassé des photographies et des millions de documents provenant du gouvernement du Canada et des églises qui ont géré les pensionnats. Elle a également collecté des œuvres d’art, des poèmes et des chansons – le tout dans le but de guider les Autochtones et les Canadiens vers la réconciliation et le respect mutuel.

« Mon but, à court terme, est de préparer l’accueil de ces documents au Centre de recherche national pour la vérité et la réconciliation, indique Ry Moran, qui est entré en fonction en février. Nous nous sommes établis dans des locaux temporaires, au campus de l’Université du Manitoba. Nous espérons nous loger en permanence au campus, soit dans un nouvel édifice, ou encore à Chancellor’s Hall, un édifice historique de l’Université, construit en 1913. De ce site, nous pourrons faire rayonner nos archives à la grandeur du pays. »

Ry Moran a devant lui un travail de taille. « Il y a presque quatre millions de documents, souligne-t-il. Heureusement, les 99 % de notre collection sont numériques. Elle consiste de témoignages audio et vidéo enregistrés, ainsi que de copies des documents gouverne­mentaux et ecclésiastiques. L’avantage du numérique, c’est qu’on peut accéder facilement aux documents, parce qu’ils sont répertoriés selon les noms des personnes et des pensionnats, ainsi que par date ou par thème. »

N’empêche qu’à présent, Ry Moran est seul. « D’ici l’automne, j’espère avoir embauché un directeur de la recherche, ainsi qu’un directeur des archives, explique-t-il. Ces personnes m’aideront à créer des opportunités pour l’utilisation de nos archives. Étant donné la nature personnelle, mais historique, de l’expérience des pensionnats, la clientèle du nouveau Centre risque d’être bien variée. Il y a d’abord les survivants et leurs familles, mais de plus les communautés autochtones, écoles et les commissions scolaires, les historiens, les étudiants, sans parler des artistes – les auteurs, poètes, chansonniers, peintres ou cinéastes – qui voudront se servir des pensionnats comme thème ou toile de fond de leurs créations. Il y a aussi les diffuseurs d’informations, tels que les médias. Et n’oublions pas le grand public.

« L’emploi possible de nos archives est vaste, conclut-il. Avant tout, le Centre visera à être la ressource incontournable pour les personnes qui veulent en savoir davantage sur les pensionnats indiens, et les conséquences, pour les Autochtones et le pays, de cette triste période de notre histoire. »

Daniel BAHUAUD