Par Barbara Gorrand

Badge 3913. C’est sous ce numéro, qui l’accompagnera toute sa vie, que Paul Hawman est arrivé à Snow Lake au début de l’été 1972. « Après des études de géologie, je cherchais simplement un job d’été dans les mines, parce que je savais que ça payait bien. Je devais rester deux mois. J’y suis resté 35 ans! » Comme tous les acteurs de cette grande épopée manitobaine, Paul est instantanément séduit par la rudesse de cette vie souterraine.

« Quand je suis arrivé, on était 500 mineurs à Snow Lake, on travaillait 5 jours par semaine. Moi je préparais les plans de coupe, l’ammoniaque me brûlait les narines. Quand on descendait, jusqu’à 4 450 pieds pour la galerie la plus profonde, on se bouchait les oreilles avec du coton. La poussière nous piquait la gorge. L’explosif utilisé, le Cilgel B, nous collait des migraines terribles. Et oui, de temps en temps, on se faisait très peur. Mais on était tellement soudés! Aujourd’hui ça n’a plus rien à voir. La mine est fermée deux jours à Noël, et le jour de l’An. Hormis ça, il y a toujours une équipe au travail. Ça laisse peu de place à la vie sociale… »

À l’écouter parler, on pourrait croire que Paul, en dépit d’une retraite méritée à laquelle il a fait droit il y a 10 ans, n’a jamais quitté la mine. Ce qui est un peu le cas : depuis 19 ans désormais, il préside aux destinées du Musée des mines, véritable cénotaphe à la mémoire de l’âge d’or de Snow Lake.
Faire la visite avec ce passionné est un privilège, tant ses explications sont colorées. Le mur de crochets où les mineurs accrochaient leur badge, et qui permettait de s’assurer de leur absence sous terre lors des mises à feu? « Je ne connais pas un mineur qui n’aie pas oublié d’enlever son badge au moment de partir au bar, retardant tout le processus de détonation! » La chargeuse à godet Eimco? « Elle était surtout connue pour casser des jambes et des bras. Mais les gars qui savaient la manier, on aurait dit qu’ils dansaient. » Les appareils de mesure de la qualité de l’air? « Vous le portiez à bout de bras, ça vous laissait au moins quelques secondes pour partir en courant si l’oxygène disparaissait soudainement. »

Récemment, le musée s’est enrichi de vitrines où s’étale une impressionnante collection de minerais. « Oui, parce que pour un Musée des mines, il était un peu dommage de ne pas avoir une seule pierre. Alors on a fait passer le mot à la communauté des mineurs. Et aujourd’hui, on en aurait presque trop! De partout, les gens nous ont fait parvenir des pierres, parfois rares, comme cet électrum, un alliage d’or et d’argent. Parfois, ce sont les proches de mineurs décédés qui ont décidé de nous en faire don. C’était très émouvant. »

Une multitude de gestes désintéressés qui prouvent à nouveau, si besoin était, la solidarité indéfectible qui unit toujours ceux qui ont partagé cette vie hors normes, dans les entrailles de la terre.

 

Snow Lake Mining museum, 163 avenue Poplar. Téléphone : 204-358-7867.