C’est en 1967 que l’Académie Saint-Joseph, école de filles ouverte en 1912, fermait définitivement ses portes. La dernière classe de la 12e année comptait 88 élèves. Les 29 et 30 septembre, ainsi que le 1er octobre, 43 anciennes se sont réunies avec plusieurs anciennes enseignantes pour célébrer et revivre une époque longtemps disparue. La Liberté a glané quelques témoignages des participantes.
Par Daniel BAHUAUD
La directrice, Cécile Rémillard Beaudry (anciennement Soeur Anne-Marie)
« On fermait une porte et on en ouvrait une autre. Il était temps d’intégrer tous les élèves dans une même école. Ça faisait un peu vieux jeu de séparer les garçons de l’école Provencher des filles de l’Académie Saint-Joseph. J’étais dans ma trentaine quand la Commission scolaire de Saint- Boniface a proposé l’intégration des jeunes à l’Institut collégial Louis-Riel Collegiate (ndlr Aujourd’hui Collège Louis-Riel). Je n’y voyais pas de difficulté, bien que plusieurs collègues plus âgées s’y sont opposées. « Puisque j’allais être directrice de la nouvelle école, j’étais très occupée par la transition. Il fallait préparer les esprits au changement, et la communauté au fait que l’Académie Saint- Joseph allait fermer ses portes. Il fallait aussi préparer la mentalité des filles. »
Annette Chabidon (née Joyal)
« Une rencontre d’anciennes de l’Académie Saint-Joseph, c’est l’occasion de retrouver ses amies de jeunesse. Mais pour moi, ça a aussi été la chance de réévaluer l’éducation que j’ai reçue des soeurs des Saints Noms de Jésus et de Marie. À l’époque, je ne l’avais pas trop appréciée. Les religieuses étaient strictes. Et moi, qui étais adolescente, eh bien je connaissais tout! Aujourd’hui, je me rends compte combien elles m’ont donné. »
Hélène Proteau
« Les religieuses avaient des standards élevés. Une morale claire, une conduite irréprochable et une éthique de travail très forte. Elles demandaient beaucoup de nous, comme elles demandaient beaucoup d’elles mêmes. Et je crois que leur influence se reflète dans les professions des diplômées. Dans notre cohorte, il y a eu des enseignantes, des directrices d’école, des bibliothécaires, des infirmières et des avocates. »
Diana Fabas-Pirie
« Je me souviens de la peur que j’ai eu lorsque mon petit ami est venu me chercher à l’école. Il n’y voyait aucun problème. Et moi non plus. Mais quand il est entré dans l’école, c’était une autre paire de manches. La directrice, Soeur Anne-Marie, est venue en classe me chercher. Oh! Oh! J’étais en trouble. »
Gisèle Craft
« Je me suis souvent retrouvée au bureau de la directrice. J’étais peut-être un peu trop honnête en communiquant avec mes enseignantes. Je leur disais ce que je croyais était la vérité, et ce n’était pas toujours bien reçu. Mais avec Soeur Anne-Marie, qui était jeune d’esprit, c’était autre chose. Elle m’écoutait. J’appréciais son ouverture. Elle puis était très juste envers les élèves. »
Evelyn Douglas (née Rousset)
« On utilisait des épingles pour rehausser nos jupes quand on sortait de l’école à la fin de la journée. Question d’attirer l’attention des gars de l’école Provencher… » Janelle Kosteniuk (née Comeault) « J’aimais nos uniformes. Les filles n’avaient pas besoin de se préoccuper de la mode. Et puis on ne savait pas qui était riche et qui était pauvre. »
Lucille Blanchette (anciennement Soeur Raymond Jésus)
« Souvent, quand j’arrivais dans ma classe de littérature anglaise, je retrouvais de véritables oeuvres d’art dessinées sur les tableaux d’ardoise par mes élèves de la 12e année. Mes filles regorgeaient de talent. Et elles étaient bien appliquées. Quelle maturité! Elles étaient finissantes, après tout. »
Soeur Yvette Ricard (anciennement Soeur Georges Bernard)
« C’était une vraie joie de retrouver mes anciennes élèves, à qui j’avais enseigné en 8e année. J’ai eu des élèves magnifiques, très faciles à encourager. Je me comptais chanceuse. »
Eva Dupont
« Le 29 septembre on est allé à la bibliothèque du Manoir de la Cathédrale, qui est l’ancien parloir de l’Académie Saint- Joseph. J’étais très touchée de retrouver Mme Marie-Ange Ayotte, notre ancienne enseignante de la 4e année à l’école Marion. Mme Ayotte habite le Manoir de la Cathédrale et je me suis souvenue combien on aimait cette femme. Jusqu’alors, on avait eu des religieuses pour enseignantes. Mme Ayotte était laïque. Je me souviens qu’elle nous a lu le roman Anne of Green Gables chaque jour à la fin de la fin des classes. C’était une femme très sensible, qui aimait ses filles. »