En décembre dernier, un groupe de parents de l’École Précieux-Sang s’exprimaient sur la volonté de changer le nom de l’école (1). Alors que les démarches officielles sont à peine lancées, La Liberté a demandé à l’archevêque de Saint-Boniface de s’exprimer sur la possibilité d’un nouveau nom.

Par Morgane Lemée

Le changement de nom est souhaité par un groupe de parents d’élèves, qui s’est exprimé lors de l’Assemblée générale annuelle du comité scolaire de l’École Précieux-Sang le 2 octobre 2018. Comme l’explique Patrick Fortier, porte-parole du groupe, l’idée est de changer de nom pour « refléter l’âme et la nouvelle réalité de l’école, pour transmettre l’identité vibrante, vivante et la forte diversité de l’école. »

Précieux-Sang. Derrière ce nom de l’école francophone du quartier Norwood transparait un petit bout d’histoire. Bien que ses jours comme école paroissiale soient révolus depuis longtemps, l’archevêque de Saint-Boniface considère l’histoire de l’École Précieux-Sang importante. Mgr Albert LeGatt : « J’accepte complètement que la décision finale d’un changement de nom revienne à l’administration de la DSFM et aux parents. Néanmoins, je suis toujours hésitant face à un changement de nom, car c’est comme si on oubliait le passé. C’est jamais bon d’oublier notre passé, notre histoire. Un nom, c’est une manière de reconnaître, même si le moment présent n’est pas en parfait accord avec ce qu’étaient les liens entre cette école et l’Église.

« À mon avis, il faut des raisons positives. Que l’on juge le changement de nom nécessaire pour le bien des élèves et de la communauté. Et non pas que le changement de nom soit une réaction négative contre le passé, ou motivé contre l’Église. Il faut de bonnes raisons. »

Ces bonnes raisons, quelles seraient-elles par exemple? Mgr LeGatt explique. « En vérité, je ne sais pas pourquoi cette question de changement de nom a été soulevée. Est-ce parce qu’on ne veut plus de nom religieux? Mais alors, dans ce cas, on changerait le nom de Saint-Boniface. Si la motivation était de ne plus avoir un nom religieux, de ne plus se souvenir de cet aspect de l’histoire de notre école, je trouverais cette attitude regrettable. Car même si l’on juge cet aspect différemment aujourd’hui, ça fait partie de l’histoire de cette école. Par contre, si les raisons du changement de nom sont positives, comme l’envie d’honorer un héros, quelqu’un comme Georges Forest par exemple, ça serait une toute autre affaire. Georges Forest est un héros de l’histoire franco-manitobaine. Je pense que ce serait un très bon nom. »

Du côté officiel du dossier, la balle est dans le camp de la Commission scolaire franco-manitobaine. Le groupe de parents engagés attend un retour pour savoir quand exactement sera lancé le sondage de la communauté (au sens large) de l’École Précieux-Sang. En attendant la suite du processus, ce groupe de parents planifie le lancement d’une page Facebook avant la fin du mois, pour d’ores et déjà commencer le dialogue.

Patrick Fortier, porte-parole du groupe : « Cette page serait un endroit où partager les articles au sujet du changement de nom et de directement demander à la communauté ce qu’elle pense. Cela ne fait pas partie de la consultation officielle, mais c’est un début. C’est aussi une bonne façon de rejoindre les gens qui ne sont pas présentement parent ou membre du personnel de l’École Précieux-Sang. Ça permet d’aller chercher des opinions de plus de personnes. Si les gens veulent partager des idées ou des suggestions de nouveau nom, ce serait aussi l’occasion. »

Patrick Fortier rappelle le contexte dans lequel est discuté un changement de nom : « Cette année, avec le 50e du Festival du Voyageur et le 40e de la cause de Georges Forest en Cour suprême, c’est pas mal au cœur du dialogue. Alors je ne m’inquiète pas trop. Il faut juste être patient. »

(1) Voir l’article à la page 7 de La Liberté du 19 au 25 décembre 2018.

Claude Forest (photo : Amine Ellatify).

Claude Forest, le fils aîné de Georges Forest, était de passage à l’École Précieux-Sang le vendredi 11 janvier, pour parler aux élèves des 6e à 8e années des gens qui influencent et qui inspirent le changement. Son père était indéniablement au cœur de la discussion.

« Mon père n’était pas quelqu’un qui aspirait à un culte de la personnalité. Il faut trouver l’équilibre entre le personnage et son œuvre. C’est pourquoi je pense qu’on devrait lui dédier une place, au pied du pont piétonnier par exemple, mais pas forcément la nommer Georges-Forest. On pourrait l’appeler la Place du 13 décembre, le jour où le verdict de la Cour suprême est tombé en 1979. Les gens se demanderaient : Quelle est donc cette date? Je tiens à insister sur le fait que cette décision ne nous revient pas à nous, la famille. Ce n’est pas pour nous. C’est pour la communauté. C’est à elle de décider comment elle veut honorer Georges Forest. »

Rappelons qu’un buste en bronze de Georges Forest devrait être inauguré cette année au parc Provencher, à l’initiative du comité du monument Georges-Forest, présidé par Marcien Ferland.