Les récents événements en Ontario français ont amené à tenter certaines comparaisons entre ce que vivent au quotidien les Franco-Ontariens et les Anglo-Québécois. À première vue, leurs situations sont bien différentes. Mais la communauté anglophone a aussi ses demandes. 

André Magny (Francopresse)

D’entrée de jeu, le président du Quebec Community Groups Network (QCGN), Geoffrey Chambers, tient à apporter son soutien aux dernières revendications des Francos-Ontariens face aux décisions du gouvernement Ford. L’ancien d’Alliance Québec réprouve celles-ci.

À ceux qui pensent cependant que le panier de récriminations est vide pour les anglophones du Québec, il n’en est rien.

Le représentant du réseau regroupant 58 organismes anglophones à travers le Québec convient que « les intérêts peuvent être différents d’une région à l’autre ». Il y a sûrement une différence dans une région comme Québec, qui compte près de 15 000 anglophones et Montréal. Là, c’est plutôt 600 000 personnes qui maîtrisent la langue de Leonard Cohen, selon les chiffres de 2018 de l’Institut de la statistique du Québec.

Pour 2019, Geoffrey Chambers voit notamment trois points sur lesquels le QCGN demeurera vigilant. Alors qu’en campagne électorale, la Coalition Avenir Québec (CAQ) a signifié son intention d’abolir les commissions scolaires, il n’est pas question d’accepter une telle décision si cela touche aux commissions scolaires anglophones. Elles sont importantes pour la survie de plusieurs communautés.

Le président de la QCGN aimerait aussi qu’il y ait plus qu’un maigre pour cent d’anglophones dans la fonction publique du Québec. « On veut participer au Québec moderne, on accepte que le français soit la langue officielle. Mais il est parfois regrettable que les politiques importantes qui touchent notamment les services sociaux — qui ont un impact sur notre communauté — soient souvent rédigées par de hauts fonctionnaires, qui n’ont pas beaucoup de connaissances de la communauté anglophone. »

Enfin, Geoffrey Chambers aimerait bien que les cégeps soient plus ouverts aux anglophones. « Ça devient de plus en plus difficile d’y avoir accès. »

De son côté, la directrice des communications du QCGN, Rita Legault, rappelle que c’est la communauté anglophone qui a créé les établissements qu’elle utilise tant en santé qu’en éducation « et qui servent l’ensemble des Québécois. »

Sur le terrain

Depuis près de 30 ans, Dave Martin est le directeur à Québec de l’école Carrefour des langues, l’une des plus vieilles écoles privées de langues de la Capitale nationale, qui offre des cours en anglais, mais aussi en français ainsi qu’en espagnol et en allemand. Né d’un père anglophone et d’une mère francophone, il s’est davantage identifié aux anglophones, puisque « j’ai eu toute mon éducation en anglais »

Il se souvient qu’en 1976, alors qu’il avait environ 20 ans, « on se sentait menacé par l’arrivée du P.Q. » S’il considère que la génération de sa grand-mère était mal intégrée au Québec, celle de sa génération l’est beaucoup plus. Il considère d’ailleurs que cette dualité linguistique lui a servi en affaires.

De son côté, Patricia Fillmore est née en Nouvelle-Écosse de parents 100 % anglophones et francophiles… à tel point que sa mère faisait partie de la chorale acadienne d’Halifax! L’identification, tant aux Maritimes qu’au Québec, n’a jamais été un problème pour elle. Enseignante de français à l’école Villa Maria à Montréal, ses élèves sont anglophones. « Ils semblent apprécier les avantages d’être bilingues. Aux rencontres de parents, beaucoup de parents font l’effort de me parler en français aussi. »

Habitant au Québec depuis une trentaine d’années et plus particulièrement le Plateau, elle constate que les anglos de Montréal délaissent l’ouest et se déplacent dans l’est, sur le Plateau comme le font les Français nouvellement arrivés.

Donc, toujours mieux intégrée la nouvelle génération? « Je remarque que depuis 7 ou 8 ans, il y a de plus en plus de Français et d’anglophones dans le quartier. Ils ont “l’air’’ de s’intégrer. Je ne pense pas qu’ils envoient leurs enfants à la garderie et à l’école anglaise, car il n’y a pas d’école anglaise tout près. Cela étant, je ne suis pas experte en la matière, je ne parle pas aux Anglais! »