Des recherches sur les minorités linguistiques, ça s’est déjà fait. Mais des recherches sur les chercheurs qui cherchent en milieu minoritaire, c’est déjà plus recherché !

 

Par André MAGNY (Francopresse)

En concertation avec l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques (ICRML) de l’Université de Moncton et la Chaire de recherche du Canada sur les transformations de la communication savante (CRCTSC) de l’Université de Montréal, l’Association francophone pour le savoir (Acfas) lance une étude scientifique sur la réalité des chercheurs et chercheuses francophones et francophiles travaillant en contexte minoritaire au Canada.

En fait, l’ICRML « avait commencé à explorer » la question en 2012, souligne le sociologue Éric Forgues, qui dirige l’Institut. Cette fois-ci l’enquête s’étendra sur une durée de deux ans. Elle portera sur plusieurs aspects auxquels doivent faire face les chercheurs francophones : le financement de leurs études, la publication de celles-ci, les frais supplémentaires de traduction ou encore la préparation des demandes de financement. Dans ce dernier cas qui peut paraître anodin, les chercheurs doivent cependant souvent se poser la question : « Ma recherche a-t-elle plus de chance d’être subventionnée si je fais la demande en anglais ? »

L’Acfas a été sensible à ce vécu scientifique. « La situation de ces chercheurs, chercheuses œuvrant en contexte minoritaire francophone au Canada est inquiétante, déplore Lyne Sauvageau, présidente de l’Acfas. De nos nombreux échanges ressort un même constat, peu importe la province, le domaine de recherche ou le type d’institution : ils reçoivent peu de soutien et vivent des difficultés quotidiennes et persistantes. »

Bien que des organismes subventionnaires comme le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) doivent tendre vers l’égalité des langues selon M. Forgues, l’étude devrait démontrer que la situation peut être améliorée.

Différences géographiques ?

La recherche tripartite devrait aussi tenir compte du lieu des demandes des chercheurs. « Les universités en périphérie ont parfois moins de ressources », constate le directeur général de l’ICRML. Moins de cours en français aussi. D’après la présidente de l’Acfas, certains chercheurs auraient souligné à son organisme le fait que « des étudiant-e-s aient un nombre limité d’options d’apprentissage en français aux cycles supérieurs dans la majorité des universités, ce qui entraîne notamment un exode des cerveaux. »

S’attardera-t-elle aussi à ce que vivent les chercheurs anglophones du côté québécois? Sans l’affirmer officiellement, il n’est pas impossible d’après Éric Forgues, qu’il y ait certaines comparaisons qui soient établies entre les deux situations.

À terme, l’étude de l’ICRML, de la CRCTSC et de l’Acfas devrait permettre aux gouvernements d’avoir sous la main des données probantes sur cette problématique et qui sait, peut-être, d’améliorer l’efficacité de leurs actions en matière de subvention publique des recherches menées par les francophones.