FRANCOPRESSE – Plus d’une centaine de personnes de l’Atlantique se sont réunies virtuellement le 26 janvier dans le cadre du premier forum citoyen sur le postsecondaire en contexte minoritaire, organisé par la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada. Les participants ont fait part de leurs réflexions sur l’accessibilité et l’avenir de l’éducation postsecondaire dans la région.

Marianne Dépelteau – Francopresse

« Ces forums donnent la parole aux jeunes, aux étudiants, aux parents, aux professeurs, aux partenaires communautaires et aux institutions postsecondaires pour identifier les besoins et les aspirations de nos communautés pour l’avenir de nos collèges et universités francophones dans le milieu minoritaire », explique Alain Dupuis, directeur général de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada.

Les forums citoyens de la FCFA sont organisés dans le cadre des États généraux sur le postsecondaire en contexte francophone minoritaire de l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC).

Alain Dupuis précise que « le réseau postsecondaire fait face à de nombreuses pressions ».

« Dans les dernières années : pressions financières, changements démographiques, besoins en évolution du marché du travail, hausse des frais de scolarité, compétition avec des établissements de langue anglaise, sans mentionner les grands impacts qu’a eus la pandémie », énumère-t-il.

Selon Liane Roy, présidente de la FCFA, « ces défis et ces crises sont aussi des occasions de dessiner ensemble les contours d’un modèle postsecondaire qui répond encore mieux aux besoins des Acadiens, des Acadiennes et des francophones de l’Atlantique ».

Animé par Aubrey Cormier, agent de projets au Réseau de développement économique et d’employabilité de l’Île-du-Prince-Édouard (RDÉE ÎPÉ), le forum accueillait quatre panélistes pour discuter du renforcement des liens entre les communautés francophones et les établissements postsecondaires, ainsi que des moyens d’assurer que les jeunes francophones choisissent d’étudier dans d’étudier en français à l’extérieur du Québec.

L’éducation en français ouvre des portes

Adrien Comeau, un Acadien natif de la baie Sainte-Marie, est étudiant à l’Université Sainte-Anne, le seul établissement d’enseignement postsecondaire de langue française en Nouvelle-Écosse.

Ayant toujours été éduqué en français, l’étudiant souligne l’importance d’être à son aise dans une institution qui permet d’étudier dans sa langue maternelle, chose qu’il ne tient pas pour acquise. Il rappelle que « les universités que nous avons, on est très chanceux de les avoir».

« Vous pouvez m’envoyer sur le marché du travail demain, précise-t-il, et je suis presque 100 % garanti d’avoir un emploi grâce au fait que je peux parler français, mais aussi que j’ai étudié en français, ce qui m’a donné une grande ouverture au monde entier.»

Charles Duguay habite à Charlottetown et est père de trois enfants ayant étudié à l’Université de l’Île-du-Prince-Édouard et à l’Université de Moncton. Il explique que « d’étudier dans la langue maternelle, pour moi, c’était important de voir les enfants faire ça, mais je ne me suis pas fié juste à l’université pour que mes enfants gardent la langue et la culture. C’est à la maison que j’ai transmis ça ».

Le père de famille ajoute que « comme avantage, à part la langue, ça leur a donné plus d’opportunités […] Au niveau de l’emploi, ils n’ont pas eu de difficultés».

Fatoumata Guindo est originaire du Mali, où elle a été recrutée pour venir étudier au Canada. Sa préoccupation principale était d’étudier en français, ce qu’elle fait désormais à l’Université de Moncton. « C’est une fois ici que j’ai commencé à voir cette fierté francophone et à me sentir bien là-dedans», partage-t-elle.

Elle évoque l’importance de tout de même apprendre l’anglais pour s’assurer de garder toutes les portes ouvertes.

« Arrivés vers la fin de nos études, lorsqu’on pense au travail, on se dit : “Ok, je parle français, mais il faut vraiment que j’aille apprendre l’anglais, sinon je vais avoir des difficultés pour avoir un emploi”. Je vois ça chez beaucoup d’étudiants », raconte-t-elle.

Il reste du travail à faire

Ancien étudiant de l’Athabasca University, Jeffrey Young a fait le choix de ne pas poursuivre ses études postsecondaires en français. Ce francophone né au Nouveau-Brunswick et habitant désormais à Terre-Neuve ne se voyait pas quitter l’ile à la fin de son secondaire.

« À Terre-Neuve, on n’a pas de collèges ni d’universités francophones, et en graduant du secondaire je n’étais pas prêt mentalement de quitter la province et ma famille. À l’école [secondaire], je crois qu’on n’avait pas eu les bonnes ressources », déplore-t-il.

Il indique que ce sont surtout des raisons financières qui l’ont retenu. En réponse à la question d’un participant, Jeffrey Young avoue que s’il avait eu les informations justes à l’époque, il aurait fait les choses autrement.

Les panélistes ont relevé des failles quant à l’information sur l’éducation postsecondaire en français en situation minoritaire. Selon Adrien Comeau, «il y a un manque de diffusion des cours collégiaux en français en Nouvelle-Écosse et peut-être ailleurs ».

Fatoumata Guindo observe pour sa part que le recrutement d’étudiants n’est toujours pas suffisant : « Je fais beaucoup confiance aux agents qui font du recrutement dans les différents endroits, il en faut vraiment pour convaincre les gens. Ce qui arrive, c’est qu’une fois que ces personnes sont là, elles rencontrent beaucoup de difficultés. L’idée serait de mettre la même force qu’on met dans le recrutement aussi dans la rétention. Vraiment, je pense que c’est ce que nos institutions pourraient faire. »

Les trois prochains forums citoyens se tiendront le 5 février pour l’Ouest, le 15 février pour l’Ontario et le 23 février pour le Nord.

-30-