La gouverneure générale a annoncé 85 nouvelles nominations au sein de l’Ordre du Canada. Parmi elles, quatre Manitobains ont reçu cette plus haute distinction civile du Canada, dont l’artiste franco-manitobain Gérard Jean.
Par Jonathan SEMAH
C’est pour « sa contribution au rayonnement de la chanson franco-manitobaine au pays et au sein de la francophonie » que Gérard Jean, alias Ziz, a obtenu l’Ordre du Canada. Mis dans la confidence depuis le mois de mai, le chanteur réalise tout doucement ce qu’il lui arrive. « J’étais très surpris de l’effet que ça a eu. Depuis l’annonce, j’ai eu tellement d’appels, de messages et de courriels, c’est impressionnant. Je suis très touché et très content. Je n’aurais jamais imaginé que la musique m’emmène si loin. Il y a une éducation là-dedans et la musique nous permet de nous exprimer. On dit que c’est bon pour la santé, c’est vrai! (rires) »
Et parmi les dizaines de messages, l’auteur-compositeur et interprète de la célèbre chanson Histoire d’antan a notamment eu les compliments de son grand ami Gérald Paquin avec qui il formait le duo Gerry & Ziz. « Il m’a félicité puis il m’a dit que c’était évident, que j’ai fait ce que je devais faire et que j’étais né pour ça. Dans le sens où j’étais déjà fasciné par la musique depuis que je suis tout petit. Ça m’a rappelé de beaux souvenirs. »
Connu pour être très actif dans le monde des chorales, Gérard Jean a lui aussi laissé de grands souvenirs à ceux qui ont collaboré avec lui de près ou de loin. Michelle Freynet, qui a quitté la codirection de la chorale des Blés au vent récemment, est très contente pour Gérard Jean. « C’est tellement mérité, ça ne pouvait pas arriver à une meilleure personne! Il a gagné ses épaulettes notre cher Ziz avec sa musique merveilleuse et ses arrangements originaux. C’est un homme aux multiples talents et un poète dans l’âme. »
Même son de cloche pour Daniel Bahuaud qui avait chanté dans le chœur d’enfants qui figure à la fin d’Histoire d’antan, que Gerry et Ziz avaient baptisé « les Crapauds de l’école Guyot ». « Je suis très content pour lui. Il était temps! Pour avoir participé à cette époque qui a vu grandir la chanson franco-manitobaine, c’est important. Pour Histoire d’antan, pour le chant de chorale, c’est quelque chose de très fort. Le reconnaître, c’est reconnaître le cœur battant de notre communauté. »
Andrina Turenne, même si elle est d’une génération plus jeune, a également été très inspirée par le travail de Gérard Jean et notamment Histoire d’antan, qui a plus de 50 ans, et qu’elle réinterprète encore régulièrement. « C’est vraiment mérité. Nous, ici, on reconnaît l’excellence du talent et des compositions de Gérard Jean au sein de notre communauté. Alors je suis heureuse qu’il soit aussi reconnu au niveau national. Histoire d’antan, je l’ai chantée toute ma vie. Et d’ailleurs, il est important de mettre tout l’œuvre de Gérard Jean en avant, c’est un magnifique répertoire. »
| Une récompense plus humaine
Récipiendaire de l’Ordre du Canada en 2003, Raymond Poirier a lui aussi participé à l’essor de sa communauté et de la francophonie canadienne. Cette décoration n’a pas changé sa vie même s’il en retire une certaine fierté. « C’est un honneur! On ne peut pas s’y attendre, c’est une si haute distinction. Mais dans la vie de tous les jours, ça ne change pas grand-chose, sauf que c’est le fun! »
La question du mérite a d’ailleurs longtemps fait réfléchir Raymond Poirier. Cet honneur qui tombe sur les épaules peut parfois être lourd à porter. « Ce qui arrive à un moment donné, c’est qu’on peut se sentir un peu coupable. J’ai pu me dire quand je l’ai eue, qu’une tonne de personnes avec qui je travaillais l’aurait méritée aussi. Les autres ne sont pas mentionnés et personnellement je me suis senti un peu mal à cause de ça. En effet, je connais tellement de gens qui le méritent autant que moi voire plus que moi. Je reste quand même très content d’être celui qui l’a eu! »
Raymond Poirier dévoile aussi certaines coulisses de l’Ordre du Canada. En effet, il arrive que certains anciens récipiendaires soient sondés sur les nouveaux, surtout s’ils viennent de la même province. En l’occurrence, Raymond Poirier aurait approuvé complètement le choix de Gérard Jean. « Je suis content que de plus en plus de récipiendaires soient des gens accessibles. Je veux dire il n’y a plus besoin de faire de grosses affaires monumentales. Et j’aime ça! Ça rend l’Ordre du Canada beaucoup plus présent dans la communauté. Quelqu’un comme Gérard Jean, il mérite ça. Il a toujours été actif dans la communauté, il a créé, il a donné, il a été si inspirant pour tellement de gens. Si l’on m’avait contacté, je l’aurais appuyé autant que possible. »
De son côté, Gérard Jean reste très surpris de voir son œuvre dépasser les frontières manitobaines. Célébré pour sa contribution à la francophonie, c’est aussi la musique en tant que langage universel qui touche profondément Ziz. « La musique est une langue en soi. Récemment, en ligne, j’ai découvert qu’Histoire d’antan avait été reprise par une chorale en Suisse! Ça m’a surpris de voir que cette musique va aussi loin et ça m’a surtout beaucoup plu. »