Après la pandémie et les feux de forêt de l’an passé, les brigadiers de la rivière Rouge ont pu reprendre du service. Au total, 49 voyageurs ont pris les rames cette année pour une expédition à travers les cours d’eau… et le temps aussi, sur leurs emblématiques canots.
Par Hugo BEAUCAMP
Ce voyage en canot vers le nord-ouest de l’Ontario, c’est l’aboutissement de plusieurs mois de préparation. « C’est un voyage d’une semaine, alors on doit préparer la nourriture, le trajet et surtout créer un groupe qui correspond à la difficulté du voyage que l’on souhaite entreprendre », détaille Charles Brunet, le bourgeois de la brigade.
« Chaque groupe a son propre itinéraire, certains traversent quatre ou cinq lacs par jour avec des kilomètres de portage. Les voyages peuvent parfois être très difficiles. » Et pour cause. Les voyageurs sont parfois obligés, pour passer d’un cours d’eau à un autre, de transporter les canots à pied, sur des chemins parfois traîtres. Un canot de taille moyenne pesant entre 31 et 34 kilogrammes, en ajoutant à cela tout le poids des équipements de camping, la tâche peut s’avérer ardue.
Le bourgeois, dont le nom de voyageur est Félix Hébert explique avoir abordé son périple avec prudence. « Mes genoux me font souffrir, alors j’admets que mon voyage cette année était un peu mou (rire). J’ai essayé d’éviter au maximum les portages pour ne pas risquer une éventuelle blessure. Alors on a canoté jusqu’au lac Cobble où nous avons passé la semaine à camper sur une île », confie le passionné de 64 ans.
Un voyage qui aura duré tout de même une demi-journée. Car même si les voyages diffèrent d’un groupe à l’autre, l’exploit sportif n’est pas vraiment au coeur de la démarche. Pour ces mordus d’histoire, ces expéditions, aussi éreintantes soient-elles, s’apparentent presque à des vacances.
« Nous apprécions le style de vie des voyageurs du début du 18e siècle. On essaie principalement de faire perdurer ce patrimoine qui est le nôtre », annonce Félix Hébert avant de poursuivre, « Ce sont des voyages de toute beauté et ils sont initiatiques pour nos nouveaux membres, c’est l’occasion de leur apprendre à travailler en équipe et leur raconter à quoi ressemblait la vie des voyageurs. Mais on ne se prend pas trop au sérieux non plus, c’est aussi beaucoup de fun, beaucoup de musiques traditionnelles, de chants et de danses! », conclut-il.
| Défendre l’environnement
La brigade de la rivière Rouge, en plus d’oeuvrer pour la transmission d’une partie du patrimoine historique et culturel du pays, se fait aussi l’avocate de la cause environnementale. « Il y a une véritable dimension écologique à nos voyages », assure le brigadier, « on fait tout notre possible pour laisser les sites que l’on visite plus propres qu’à notre arrivée. »
Si historiquement, tous les voyageurs étaient des hommes, c’est bel et bien une femme : Suzie Lemoine, porte-parole de l’association, qui appuie ces propos. « On s’informe toujours sur les meilleures pratiques écologiques à adopter en plein air. D’année en année, on continue d’apprendre, on fait ce que l’on peut et l’on tente d’éduquer les autres du mieux possible. »
Pourtant, selon Suzie Lemoine, la brigade de la rivière Rouge n’a pas nécessairement vocation à éduquer. « Étant donné qu’on est un groupe social, on organise des activités annuelles et nous sommes souvent invités à nous rendre à des évènements. On se présente habillés à la façon des voyageurs, on parle de leur histoire, on chante, on partage avec les gens autour de nous. Alors s’il y a une dimension éducative dans ce que l’on fait, c’est un petit peu par défaut. »
Pour les 100 membres actifs de cette association créée en 1978, les notions de partage et de transmission sont essentielles et font partie intégrante du charme de la brigade. « On a des membres qui ont 80 ans, et c’est un bonheur de voyager avec eux. Ils en savent beaucoup plus que nous sur l’histoire et ils apportent avec eux leurs souvenirs et leur savoir. »
Finalement, porte-parole, bourgeois, ou simple brigadier, tous les membres ont à coeur de conserver les traditions et de partager leur « joie de vivre ».
Rentrés de leur expédition, le mardi 23 août, s’ils ne sont pas revenus chargés de fourrure, ils ont ramené dans leurs canots, de mémorables souvenirs.