L’anthropologue Sabine Choquet explique pourquoi la réappropriation des cultures autochtones sera clé pour favoriser la réconciliation.

Par Ophélie DOIREAU

Dès l’arrivée des colons en Nouvelle-France, des missionnaires catholiques s’installent dans des villages autochtones et s’efforcent de baptiser les gens. Une cohabitation s’installe entre Européens et Autochtones. Mais elle n’est pas toujours réalisée de manière pacifique et sans conséquences.

Sabine Choquet, anthropologue, chercheure invitée au CÉRIUM à l’Université de Montréal, en fait le constat. « Souvent les États sont formés par conquêtes. Le Canada n’échappe pas à cette réalité. Les colons sont arrivés et des ententes ont été signées avec les Autochtones. Mais il n’en demeure pas moins que souvent les personnes restent attachées à leurs traditions, tout en absorbant de nouvelles valeurs.

« Avec le temps, il y a des pans de la tradition qui s’oublient, tandis que d’autres sont redynamisés. On le constate du côté des Autochtones, avec des cérémonies traditionnelles, des pow-wow. Ils tentent de refaire vivre des traditions avec une

volonté de les transmettre aux enfants. Il y a des phénomènes de réappropriation qui peuvent se développer après des périodes d’oubli. »

« Il y a une démarche personnelle et collective dans la redynamisation de la culture. On peut le faire en participant aux célébrations, en s’intéressant à ce qui se faisait lors de certains moments de l’année, en essayant de manger ce qui se mangeait à l’époque. Les gardiens du savoir et les aînés sont aussi là pour favoriser cette transmission culturelle et religieuse. »

Pour l’anthropologue, c’est ce travail d’histoire et de mémoire qui sont clés pour favoriser la réconciliation. « Se réconcilier avec l’Église catholique, ce n’est pas dire : Soyez catholique. Se réconcilier, ça implique une reconstruction et la poursuite d’un travail de mémoire. La visite papale n’efface ni les plaies, ni les traumatismes vécus.

« Dans la justice restaurative qui vient des cultures autochtones, il a été prouvé que pour réussir à se reconstruire, il est nécessaire de rencontrer l’auteur de son trauma. La démarche d’aller voir le pape peut être interprétée dans cette optique. »