Au cours de la Première Guerre mondiale, parmi des pertes énormes, plusieurs centaines d’hommes noirs ont vu leur droit de combattre au nom du Canada refusé. Des efforts s’opèrent aujourd’hui de la part du gouvernement fédéral pour réparer cette discrimination.

Par Raphaël BOUTROY

Le gouvernement du Canada a présenté ses excuses le 9 juillet 2022 pour son traitement des Canadiens noirs qui ont souhaité combattre lors de la Première Guerre mondiale.

Plusieurs hommes noirs ont voulu s’inscrire auprès de l’armée canadienne, à l’époque une composante de l’armée britannique. Teresa Iacobelli, historienne de la Première Guerre mondiale au Musée canadien de la guerre en Ontario, explique : « Il n’y avait pas de règlement qui interdisait l’entrée des Noirs dans l’armée canadienne. C’est l’officier responsable du recrutement qui déterminait s’il permettait à un individu ou à un autre de se joindre à l’armée. Dans le cas des hommes noirs, la grande majorité était refusée pour cause de racisme. »

La guerre avait depuis longtemps suivi son cours quand un contingent entièrement formé de soldats noirs s’y est joint. « En 1916, après un long effort de lobby auprès du gouvernement fédéral, le 2e bataillon de construction du Corps expéditionnaire canadien a été constitué. Il devait servir d’appui au Corps forestier canadien. »

Le 2e bataillon de construction du Corps expéditionnaire canadien était majoritaire ment formé d’hommes noirs de la Nouvelle-Écosse, entre autres de la ville de Pictou. « Le bataillon se composait en majorité de Canadiens. Mais on y trouvait aussi quelques hommes noirs américains (1), ainsi que des soldats provenant des Antilles. Au total, le bataillon comprenait 595 hommes, et 19 officiers dont un seul était Noir, le révérend William Andrew White. »

Les bataillons de construction et les bataillons forestiers ont joué un rôle important au cours de la guerre. «La guerre nécessitait énormément de soldats. Mais aussi énormément de ressources brutes, dont le bois. Avec le bois, l’armée construisait des tranchées, leur équipement, leurs véhicules, etc. C’était une ressource indispensable pour subvenir aux besoins de l’armée », explique Teresa Iacobelli.

Le 2e bataillon de construction du Corps expéditionnaire canadien était majoritairement formé d’hommes noirs de la Nouvelle-Écosse, entre autres de la ville de Pictou. « Le bataillon se composait en majorité de Canadiens. Mais on y trouvait aussi quelques hommes noirs américains (1), ainsi que des soldats provenant des Antilles. Au total, le bataillon comprenait 595 hommes, et 19 officiers dont un seul était Noir, le révérend William Andrew White. »

Les bataillons de construction et les bataillons forestiers ont joué un rôle important au cours de la guerre. «La guerre nécessitait énormément de soldats. Mais aussi énormément de ressources brutes, dont le bois. Avec le bois, l’armée construisait des tranchées, leur équipement, leurs véhicules, etc. C’était une ressource indispensable pour subvenir aux besoins de l’armée », explique Teresa Iacobelli.

« Bien que la majorité des soldats du 2e bataillon de construction souhaitaient combattre dans les tranchées, leur rôle n’est pas à négliger. On oublie souvent l’importance des bataillons de soutien comme celui-ci quand on pense à la guerre au sens large. Il est important de se souvenir de leur contribution », poursuit-elle.

Des excuses officielles

Le 2e bataillon de construction est revenu au Canada peu à peu entre 1919 et 1920. Teresa Iacobelli indique une disparition presque totale de l’histoire de ces soldats : « Ce n’est pas avant les années 1980 que l’on retrouve leur histoire. Avant ça, il était possible de trouver une petite plaque commémorative à Toronto. Avec les années 1980 est venu le sénateur Calvin Ruck, originaire de Sydney en Nouvelle-Écosse. Il a lancé un effort de lobby pour raconter leur histoire. Dès les années 1990, les efforts de Calvin Ruck ont mené à la construction d’un mémorial formellement dédié au 2e bataillon de construction à Pictou en Nouvelle-Écosse. »

Aujourd’hui, le Canada s’est prononcé sur le sujet. En 2021, le gouvernement du Canada avait partagé son intention de s’excuser. Le 9 juillet 2022, Justin Trudeau, Premier ministre du Canada, a prononcé des excuses officielles. « Pour la haine contre les communautés noires et le racisme systémique flagrant qui ont privé ces hommes de leur dignité dans la vie et dans la mort, nous sommes désolés.

« Ce n’est qu’en reconnaissant les vérités du passé que nous pourrons commencer à panser les blessures qu’elles ont causées et à bâtir un Canada meilleur et plus inclusif pour tous. Je tiens à remercier les descendants du 2e Bataillon de construction, les membres du comité consultatif sur la présentation d’excuses nationales et les membres des communautés noires de la Nouvelle-Écosse et de tout le Canada pour les efforts de sensibilisation importants qu’ils ont déployés. C’est grâce à ces efforts que nous sommes ici aujourd’hui. L’histoire du 2e Bataillon de construction, ainsi que les histoires de courage, d’honneur et de sacrifice de nombreux autres pionniers canadiens, contribueront dans une large mesure à ce que ce traitement horrible ne se reproduise plus jamais. »

La transmission d’histoires de ce genre est en mouvement constant. Teresa Iacobelli insiste sur l’importance de cette mouvance : « Il ne faut pas que raconter l’histoire perché en haut d’une tour d’ivoire. Il faut commencer par la communauté et reconstruire à partir des histoires des individus, de l’histoire collective. »

(1) En 1916, les États-Unis n’avaient pas encore rejoint le conflit de manière officielle. Certains Américains se sont déplacés au Canada ou en Angleterre afin de combattre. Mastan, Adventurers, patriots, and loyal British subjects: U.S. citizen enlistees in the First World War Canadian Expeditionary Force (CEF).

La subjectivité du recrutement

Les 595 hommes du 2e bataillon de construction n’ont pas été les seuls hommes noirs à servir l’armée canadienne. Teresa Iacobelli raconte : « On estime qu’environ 700 hommes noirs ont servi en tant que combattants dans l’armée canadienne. Ces derniers ont dû trouver des officiers responsables du recrutement qui étaient prêts à recruter des soldats noirs ».

Toutefois, certaines modalités rendent le travail plus difficile aux historiens d’aujourd’hui. « Sur les documents de recrutement de l’armée, il n’y avait pas de case à remplir pour indiquer l’ethnie. On pouvait indiquer une peau foncée ou claire, mais ça pouvait aussi indiquer quelqu’un qui était bronzé. »