Du 21 au 23 mars, nos collègues Jean-Baptiste Gauthier, Jonathan Semah, Hugo Beaucamp et Ophélie Doireau, ont animé l’atelier Génération Z avec des élèves de 9e à 12e année du Collège Béliveau et du Collège Jeanne-Sauvé, écoles de la Division Scolaire Louis-Riel. Les participants ont pu écrire des articles, faire des vidéos et donner leur opinion avec des lettres à la rédaction. L’article suivant a été réalisé dans ce cadre.

Depuis 2010, Génération Z, une initiative de La Liberté, offre une expérience authentique du métier de journaliste en presse écrite et en vidéo à des élèves du secondaire de la Division scolaire Louis-Riel (DSLR), pour qui le français est une deuxième langue.

Afin de les encourager, prenez le temps de lire leurs articles, visionner leurs vidéos, et leur écrire un commentaire à [email protected].

Par Zachary BOWSER, 12e année, Emily GAVEL, 10e année Lillian KINLEY, 12e année et Danyu ZHANG, 9e année, Collège Béliveau.

En 2023, 1,4 million de Canadiens en moyenne regardent la Soirée du Hockey chaque mercredi. Depuis ses débuts à la télévision en 1955, c’est l’un des programmes de télévision les plus populaires au Canada.

Mais en 2020, environ 60 % des admirateurs des équipes de la Ligue nationale de hockey (LNH) étaient blancs. Pour un sport si significatif dans la culture du Canada, ce manque de diversité du public peut être surprenant. En réalité, le hockey a une longue histoire de culture hostile envers les gens issus des minorités visibles.

Depuis l’origine du sport, il y a une certaine culture qui vient avec le jeu de hockey : insultes criées d’une équipe à l’autre, spectateurs qui scandent des rimes de détestation à l’autre équipe, harcèlement entre joueurs dans les vestiaires… Ces comportements se retrouvent dans plusieurs sports, mais le hockey semble avoir un pouvoir particulier pour les inspirer, et ce, à travers la LNH et les centres communautaires indifféremment.

Et parce que le hockey est un espace où les participants sont en grande majorité blancs, ces blagues et insultes sont souvent faites à l’égard des personnes issues des minorités visibles. Ce manque de diversité fait que les propos racistes, homophobes et sexistes semblent normalisés dans les vestiaires, sur les bancs et dans les gradins. Plusieurs efforts sont faits, dans la LNH et à un niveau communautaire, pour rendre le hockey plus inclusif, mais c’est difficile de changer quand la culture de base est si hostile.

En 1998, la campagne Hockey is For Everyone était créée par la LNH pour célébrer la diversité chez les admirateurs et les joueurs, et aider le sport à devenir plus inclusif, sans tenir compte des races, religions, orientations sexuelles, etc. C’est vrai qu’on peut voir une amélioration entre aujourd’hui et le début de la campagne, mais plusieurs controverses dans les derniers mois font que les spectateurs se questionnent sur l’engagement réel de la LNH et l’efficacité de la campagne.

Récemment, les histoires les plus controversées concernaient la communauté LGBTQ+. Deux joueurs, Ivan Provorov, défenseur des Flyers de Philadelphie, et James Reimer, un gardien qui joue avec les Sharks de San Jose, ont refusé de porter des chandails d’échauffement arc-en-ciel, et trois équipes, les Rangers de New York, les Islanders de New York et le Wild du Minnesota ont décidé de ne pas faire porter de chandails arc-en-ciel à leurs joueurs lors des échauffements des soirées Pride de la LNH en appui aux personnes LGBTQ+.

Le défenseur des Flyers avait répondu aux médias : « Je respecte les choix de tout le monde. Mon choix est de rester authentique à moi-même et ma religion. » Pour Miguel Marcoux, entraîneur-chef de l’équipe masculine des Barracudas du Collège Béliveau, « l’affaire, c’est que le monde doit réaliser que c’est le message qui est important, pas le gilet. Le but, c’est de montrer à tout le monde qu’on veut que le hockey soit inclusif ».

Par ailleurs, selon un rapport sur l’ethnicité des employés de la LNH paru en octobre 2022, 83,6 % d’entre eux sont blancs, 4,17 % sont asiatiques, 3,74 % sont noirs, 3,71 % sont hispaniques et 0,5 % sont autochtones. On peut donc voir avec ces statistiques que les employés non-blancs ne représentent pas même 13 % du personnel. De plus, le rapport indique que 93,4 % des employés s’identifient comme étant hétérosexuels.

La réputation du hockey est donc de plus en plus endommagée par sa culture. Maisie Duffin, capitaine de l’équipe féminine des Barracudas du Collège Béliveau, donne sa perspective : « Je pense qu’il existe un stéréotype que les joueurs de hockey sont sexistes, racistes et homophobes, ce qui empêche les personnes issues des minorités visibles de se sentir les bienvenues. Mais bien que certains joueurs de hockey aient des croyances, la majorité d’entre eux sont accueillants et sympathiques. »

Elle voit notamment plusieurs changements positifs au niveau communautaire. « La communauté du hockey commence à devenir plus accueillante. Je vois jouer plus de jeunes filles et d’enfants appartenant à des groupes marginalisés. »

Pour Miguel Marcoux, les changements dans la culture commencent par des changements de direction. « Je peux parler au nom de plusieurs entraîneurs dans la même ligue pour moi. Nous sommes enseignants, on sait comment entraîner les jeunes, quoi dire, et pas seulement sur la glace. On sait comment on veut qu’ils se comportent, ce qui est acceptable ou non, et on l’adresse. »

Malheureusement, peu d’équipes des écoles secondaires font l’effort de montrer que le hockey est vraiment quelque chose que tout le monde peut pratiquer et apprécier. Prenons par exemple le cas au Québec, de Nadine Hart et de son jeune fils, JC, qui s’est défendu dans une situation où un coéquipier lui donnait des coups de poing et l’insultait. Il a été expulsé de l’équipe, et ce n’est qu’après que Nadine Hart ait dit quelque chose qu’ils ont puni l’intimidateur.

« La culture du hockey dépend vraiment de chaque équipe, explique Maisie Duffin. Certaines équipes peuvent être très divisées et toxiques, tandis que d’autres peuvent être comme une deuxième famille. Tout dépend de l’environnement. » Miguel Marcoux ajoute que « ce sont les entraîneurs qui vont déterminer la culture de l’équipe. Si tu laisses des joueurs se comporter de façon non inclusive, toute l’équipe va le faire ».

Il faut donc d’abord que les gens en charge des équipes et des jeux changent, mais ceux qui ont joué dans un temps où le langage et les comportements non-inclusifs étaient acceptables sont plus enclins à garder l’ancienne culture. « C’est difficile pour moi de croire qu’il va y avoir un changement sans qu’il y ait des nouvelles personnes en charge », confie Miguel Marcoux.

On peut quand même souligner plusieurs initiatives au niveau communautaire, comme la campagne Let’s Blow The Whistle On Racism qui soutient à la fois le Black Girl Hockey Club et le Comité de l’histoire des Noirs d’Ottawa. Ces cinq filles ont joué au hockey presque toute leur vie, elles ont été témoins du racisme dans les sports au fil des ans, et elles croient qu’il faut changer les choses.

On peut aussi voir des progrès dans la LNH. Les leadeurs ne sont pas tous aveugles à ces problèmes. Un des plus grands noms canadiens de la LNH, le joueur Connor McDavid, est venu parler aux médias après l’incident d’Ivan Provorov, et il a dit : « Moi-même et tout le monde dans le vestiaire appuyons ce type d’initiative. »

De même, en 2022, quand les Bruins de Boston ont fait signer à Mitchell Miller un contrat professionnel alors qu’il avait avoué avoir été inculpé de voie de fait et de violation de la loi de l’Ohio sur la sécurité dans les écoles, le capitaine des Bruins, Patrice Bergeron s’est exprimé devant les journalistes :

« La culture qu’on a construite ici s’oppose à ce type de comportement. On est une équipe qui souligne la moralité. Si c’était le même homme de 14 ans qui marche dans ce vestiaire, il ne serait pas accepté, voulu ou bienvenu. » Mitchell Miller

et un ami avaient forcé un camarade de classe noir ayant des troubles de développement à manger un bonbon qu’ils avaient mis dans un urinoir.

Et les joueurs ne sont pas les seuls à montrer un changement de culture. Des organisations, et même la Ligue, essaient de combattre les problèmes d’homophobie, de racisme et de capacitisme. Un exemple local de ceci est la True North Youth Foundation, qui s’occupe de l’Académie de hockey des Jets de Winnipeg. Ce programme rend le hockey plus accessible pour des jeunes défavorisés car il finance le temps de glace, le transport, l’équipement, la nutrition et le personnel.

La LNH a aussi des programmes et initiatives pour pousser l’organisation vers le progrès. La ligue essaie notamment de rendre le hockey sur luge plus accessible grâce au USA Hockey Sled Classic, un évènement qui dure depuis maintenant 12 ans, et à son partenariat avec J.J. O’Connor, un ancien joueur américain de hockey devenu quadraplégique suite à un accident sur la glace.

De plus, quand un premier joueur avait annoncé au monde qu’il était gai, la LNH avait fait un don de 100 000 $ à plusieurs fondations LGBTQ+. Mais est-ce que c’est assez pour que tout le monde se sente bienvenu dans le sport? Est-ce que le hockey est vraiment pour tous? Malgré les améliorations, la question se pose encore.

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