Il est l’un des plus grands festivals d’humour du pays : le Winnipeg Comedy Festival fait son retour dans la capitale manitobaine chaque année depuis 2002. Au fil des années, les programmations ont souvent fait une petite place à la scène humoristique francophone, à travers, entre autres, les soirées gala Drôlement vôtres. Après plusieurs éditions exclusivement anglophones, une programmation en langue française est de nouveau à l’affiche.

L’an passé, la comédienne Stéphanie Morin-Robert s’était déjà rapprochée de l’organisation du festival pour mettre en place une soirée réservée exclusivement aux humoristes qui étaient « mamans », cette fois-ci, c’est pour la mise en place d’une soirée francophone que les discussions ont été engagées. « Le festival reste très anglophone dans son identité, alors la scène française a un peu été oubliée. Alors je les ai approchés pour leur dire que l’on souhaitait un retour de la programmation francophone au festival. »

Une scène très occupée

L’humoriste bilingue a donc obtenu gain de cause et c’est un total de six humoristes francophones qui se succéderont au Centre culturel franco-manitobain (CCFM) lors de la soirée RIRE EN FRANÇAIS du Winnipeg Comedy Festival, le 3 mai. Des comédiens manitobains bien sûr, mais pas seulement. « C’est important que les Franco-Manitobains aient l’occasion de voir des humoristes professionnels qui viennent d’ailleurs. » Un petit regret malgré tout : « Au départ, on voulait aussi inclure la Ligue d’improvisation du Manitoba (LIM) à la soirée parce qu’elle fait vraiment partie de la culture humoristique francophone, mais le WCF ne s’y intéresse pas pour le moment. »

Ainsi l’on verra sur les planches : Martin Bruyère, Micheline Marchildon, Michel Roy, et, en provenance du reste du Canada, Rachelle Elie, Derek Seguin et JC Surette. Stéphanie Morin-Robert quant à elle animera la soirée et proposera aussi quelques saynètes, car après tout, animer une soirée d’humour c’est travailler deux muscles à la fois.

« C’est important que les Franco-Manitobains aient l’occasion de voir des humoristes professionnels qui viennent d’ailleurs. »

Stéphanie Morin-Robert

De l’humour francophone hors Québec

Bien sûr, pour la scène humoristique francophone, la possibilité de se produire à l’occasion d’un évènement aussi populaire que le WCF est une belle occasion de faire parler de soi. Si Stéphanie Morin-Robert espère voir cette collaboration se répéter à l’avenir et voir le WCF devenir « une destination pour les humoristes francophones », la visibilité est loin d’être la seule raison à avoir fait naître l’envie de cette soirée de rire en français.

Au départ, le constat est simple : il est difficile de se produire en français hors Québec. « En humour, c’est essentiel de s’entraîner face à un public pour se développer, explique Stéphanie Morin-Robert. Il faut aussi avoir des opportunités pour écrire et essayer de nouvelles choses en français, comme avec les scènes ouvertes par exemple. Mais les occasions manquent, alors que côté anglophone, il y a beaucoup plus de possibilités, tu pourrais faire de la scène tous les soirs. »

Partenariat important

Pour autant, l’artiste pointe du doigt que beaucoup de travail est en train de s’accomplir, « notamment au CCFM avec les soirées rire zone. » Mais force est de constater que l’humour francophone, à l’image de sa langue, reste minoritaire à Winnipeg. C’est pour cette raison-là qu’un partenariat avec un festival de cette envergure est important pour les acteurs de cette scène en plein développement. Car ce sont les opportunités de se montrer, de se produire sur scène, qui manquent à la scène franco-manitobaine, « comment je fais pour me développer en tant qu’humoriste francophone qui habite à Winnipeg? » et à ce propos l’humoriste est formelle : « Je ne veux pas avoir à déménager au Québec pour le faire. »

C’est pourquoi la Winnipégoise voit dans cette collaboration un bon moyen de développer son réseau en tant qu’humoriste, car, si une grande partie de l’intérêt de faire partie du festival réside en la performance sur scène, sur le long terme aussi, le partenariat peut s’avérer profitable. Puisque la scène francophone est minoritaire, autant miser sur l’entraide. « Il faut se fier au côté anglophone, dit-elle. La francophonie hors Québec a parfois l’impression qu’il faut à tout prix se protéger, rester ensemble pour protéger notre langue et notre culture, et il faut un peu de ça! Mais il faut aussi oser aller voir du côté anglophone, demander son aide pour qu’ils nous fassent de la place. Car on aura du mal à la prendre seuls. »