À seulement 23 ans, De Shawn Le Jour n’est pas beaucoup plus âgé que les joueurs qu’il entraîne. Pourtant, le jeune entraîneur a prouvé cette année que la valeur n’attend pas le nombre des années. Tristan Gibbons et Raphaël Fais, deux des joueurs des Renards, ont notamment appuyé à plusieurs reprises sur l’apport essentiel de l’entraîneur originaire de Regina en Saskatchewan.

« C’est de loin la meilleure expérience que j’ai eue dans le domaine du sport. Pouvoir transmettre ce que j’ai appris tout au long de ma courte vie à la prochaine génération d’athlètes, et en l’occurrence de basketteurs, a été extraordinaire. J’ai toujours su que je voulais être entraîneur, et lorsque l’occasion s’est présentée, j’ai sauté dessus. »

Si, avec le recul, De Shawn Le Jour évoque une belle expérience, il sait bien que l’entente n’a pas été immédiatement parfaite avec l’équipe. « Par exemple, lors du premier jeu, nous avons perdu par près de 70 points et je me souviens m’être senti gêné. Je suis sûr que les parents se demandaient Qui est ce type qu’ils ont amené pour entraîner?

« Mais nous avons terminé la saison en deuxième position dans toute la province du Manitoba, perdant par un point lors de la finale provinciale, ce qui n’aurait pas été possible si les parents n’avaient pas cru en moi ou en nos joueurs. »

Exigence

La confiance s’est mise en place petit à petit. De Shawn Le Jour a dû pousser les jeunes athlètes dans leurs retranchements pour obtenir le meilleur d’eux-mêmes. De Shawn Le Jour a rapidement vu le potentiel de ces joueurs, mais ils manquaient de caractère pour s’imposer.

« Je leur ai fait part de leurs privilèges, de leur talent, du fait qu’ils fréquentent une excellente école et qu’ils vivent dans une région formidable, et je leur ai dit qu’ils devaient trouver leur voie. 

« Comment voulez-vous battre des équipes qui ne viennent peut-être pas de la meilleure région, quand le basket n’est pas un passe-temps, mais un moyen de s’en sortir? Je leur ai dit que les enfants francophones pouvaient être trop mous. Une fois que j’ai dit cela, ça les a dérangés, ça les a enragés, mais ça a allumé ce feu en eux. »

C’est ce déclic qu’est allé chercher De Shawn Le Jour. Et ce qui a permis à l’équipe de faire une belle saison. L’entraîneur n’a aujourd’hui que des bons mots pour les membres de son équipe. Il décrit notamment Tristan Gibbons comme étant « le meilleur joueur de basketball du secondaire à Winnipeg ». Il ajoute que c’est « une personne formidable, et c’est tout à l’honneur de ses parents, qui ont élevé un jeune homme fantastique ».

En revanche, pour Raphaël Fais, l’histoire avec son entraîneur n’a pas très bien débuté. De Shawn Le Jour décrit « un grand joueur de basket, mais le problème, c’est qu’il le savait et qu’en match, il pleurait, se plaignait et ne jouait pas comme il le fallait ».

Mais comme avec le reste de l’équipe, l’entraîneur a fait travailler Raphaël Fais pour améliorer sa mentalité. « Il est devenu un leader, quelqu’un en qui l’on peut avoir confiance et, honnêtement, sans sa capacité de tireur, nous n’aurions pas franchi la première ronde des championnats provinciaux. »

« Nous voulons terminer ce qui a été commencé cette année et apporter à cette école une bannière qui dira Champions et non Finalistes. »

De Shawn Le Jour

Entraîneur/joueur

N’étant pas originaire du Manitoba, De Shawn Le Jour ne connaissait pas le Centre scolaire Léo-Rémillard (CSLR), ni quel genre d’école c’était. Il a dû donc gagner la confiance de ses joueurs et de leurs parents pour en faire une équipe dure à battre. 

« Grâce à tout cela, ils ont pu accrocher la première bannière provinciale de l’histoire de l’école. Mais comme l’aurait dit Kobe Bryant, Le travail n’est pas fini. Nous voulons terminer ce qui a été commencé cette année et apporter à cette école une bannière qui dira Champions et non Finalistes. »

Les ambitions importantes de De Shawn Le Jour viennent aussi de sa propre expérience. À côté de ce rôle d’entraîneur, il est surtout un joueur de football pour l’équipe des Bisons de l’Université du Manitoba. Pour sa carrière personnelle, ses objectifs sont tout aussi élevés. 

« Je veux être un joueur de football professionnel. Je veux être le meilleur joueur possible et j’aimerais entendre mon nom le soir du repêchage », s’imagine le receveur de 6,4 pieds (1,95 m).

La détermination de De Shawn Le Jour vient de son passé. Les périodes difficiles se sont enchaînées, il ne cherche désormais que le positif. « Je sais ce que c’est que de mourir de faim, je sais ce que c’est que d’être sans abri, je sais ce que c’est que de voir ma mère s’effondrer devant moi en pleurant parce que nous n’aurons pas les moyens de payer le loyer, je connais ces périodes sombres et j’ai dû me battre pour les traverser. Je suis déterminé à ne jamais revenir à cette époque. »

Détermination sans faille

Dans ses moments les plus sombres, De Shawn Le Jour a trouvé son salutgrâce au sport. « Le sport m’a sauvé. Cela semble être une déclaration radicale, mais en grandissant là où j’ai grandi, il était extrêmement facile de se laisser influencer par la culture des gangs, la drogue ou l’alcool. Ce qui m’a évité ça, en plus de l’aide de mes frères et de mon père, c’est le sport. Il m’était difficile de trouver des ennuis lorsque tous les soirs j’avais un entraînement ou un match. »

Sa famille est justement l’un de ses moteurs. Et comme il l’a fait avec les athlètes du CSLR, il souhaite montrer le bon exemple. « J’essaie de faire quelque chose de moi-même et d’être un modèle positif pour les jeunes Noirs et Autochtones. Montrer à ma famille que, quel que soit le stade de sa vie, il est possible d’être ce que l’on veut et de réaliser ce que l’on veut, à condition d’avoir le bon état d’esprit. »