Pour l’occasion, Geneviève Pelletier troque son rôle de directrice artistique et exécutive du TCM pour celui de metteuse en scène. Elle détaille le contexte qui a mené à la création de ce spectacle, qui vient à l’origine d’un texte de l’écrivain togolais Gustave Akakpo. 

« Ça fait déjà assez longtemps qu’on travaille sur les notions d’interculturalité, de diversité culturelle, tout en voyant les changements démographiques qui se passent dans toutes les communautés. On voit aussi des changements importants au niveau des démographies. Qui va venir au théâtre? 

« Ça doit être la question que je me pose depuis à peu près dix ans. Donc, On marronne? suit un peu le cours de cette réflexion-là. Et pour cette production, on voulait vraiment aller dans une autre sphère, mordre dans ce sujet à pleines dents. »

« Je voulais vraiment que ça soit dynamique, que ça bouge beaucoup. L’idée est de ne pas se prendre trop au sérieux, finalement. La spiritualité peut être quelque chose dont on peut discuter entre nous sans avoir à se jeter l’un sur l’autre. Car il peut y avoir des tabous entre nous. D’habitude, on ne touche pas vraiment à nos croyances, on reste en périphérie de ces choses. »

Geneviève Pelletier

Trois visions à mettre en commun

Cette autre sphère s’est passée hors des frontières manitobaines. Le TCM s’est d’abord rapproché du Théâtre de l’Entonnoir à Kourou, une commune française située dans le département de la Guyane. Geneviève Pelletier a notamment remarqué des similitudes avec ce qui se passait à Winnipeg. Ces rencontres en ont entraîné d’autres, cette fois-ci à Casamance au Sénégal. 

« Et donc, on s’est rencontré avec nos trois visions et on s’est dit : de quoi veut-on parler? On a commencé à parler de cosmogonie, de mythologie, de spiritualité. Et pour moi, étant Métisse, ça a beaucoup raisonné en moi. Car quelque chose dont, je pense, on parle très rarement, et qu’on commence à entendre un peu plus, ce dont les perceptions autochtones sur le territoire vis-à-vis de la planète, des changements climatiques, de comment on prend soin d’où l’on est, et aussi la façon dont on connecte ensemble. » 

Amélie Pelletier-Lavack, Jessica Martin et Jason Santos
Amélie Pelletier-Lavack, Jessica Martin et Jason Santos en pleine répétition d’une scène. (photo : Marta Guerrero)

Une pièce internationale 

À partir de là, Gustave Akakpo a commencé à travailler sur ces différents territoires avant la pandémie. « L’idée était qu’il vienne travailler sur chacun des territoires, fasse des rencontres et, à partir de ces rencontres, mette des choses en commun », précise Geneviève Pelletier, qui souligne tout de même qu’à cause de problèmes de visa, Gustave Akakpo n’a pas pu se rendre au Canada. 

Il a en revanche beaucoup travaillé avec Tomson Highway, auteur cri originaire du Manitoba. 

Le texte terminé, Geneviève Pelletier a travaillé sur la distribution des cinq personnages joués par Blade Ali M’Baye, Marie-Josée Dandeneau, Jessica Martin, Amélie Pelletier-Lavack et Jason Santos. 

« En fin de compte, nous avons deux comédiens qui sont issus du territoire guyanais, un comédien qui est issu du Sénégal et deux comédiennes qui sont issues du territoire du Traité numéro 1. On aborde donc l’animisme (2), la spiritualité autochtone et la spiritualité sud-américaine qui est le vaudou. Alors on a tenté de trouver un équilibre entre tous ces mythes de création pour trouver un terrain commun. »

Spiritualité et mythes

Pour ce faire, il a fallu être créatif dans l’écriture et la mise en scène. Geneviève Pelletier, malgré ces sujets profonds, ne voulait pas y ajouter trop de drame. La pièce se déroule à Kourou, dans un cabaret avec du slam, du rap, de la musique, des danses. 

« Je voulais vraiment que ça soit dynamique, que ça bouge beaucoup. L’idée est de ne pas se prendre trop au sérieux, finalement. La spiritualité peut être quelque chose dont on peut discuter entre nous sans avoir à se jeter l’un sur l’autre. Car il peut y avoir des tabous entre nous. D’habitude, on ne touche pas vraiment à nos croyances, on reste en périphérie de ces choses. » 

À quelques jours de la première à Winnipeg, l’équipe travaille maintenant les derniers détails. La production a d’ailleurs déjà pu roder le spectacle à Limoges et à Ottawa. « Ça nous a permis de tester le texte sur le public. On a pu le retravailler pour le spectacle à Winnipeg, pour clarifier un peu l’histoire. Donc le public va découvrir un spectacle revu et adapté particulièrement pour Winnipeg », conclut Geneviève Pelletier. 

(1) Le spectacle est à découvrir jusqu’au 4 novembre. À 19 h le mercredi et jeudi. À 20 h le vendredi et samedi. Détails et billetterie sur cerclemoliere.com.

(2) L’animisme est la croyance en un esprit qui anime les êtres vivants.