La capitale manitobaine se distingue également par son développement des sportifs et son accueil d’évènements. 

Refaire l’histoire du sport au Manitoba de ces 150 dernières années mériterait sûrement plus qu’un article. Mais dans cette longue histoire, quelques exploits, réussites, parcours ou encore évènements ont mis Winnipeg sur la carte des sports au Canada. 

Le hockey est le sport le plus populaire au pays, et aussi au Manitoba. Et c’est par cette discipline que vient la première anecdote de Marc-Éric Bouchard, chroniqueur sportif pour Radio-Canada dans l’ouest, à propos de Winnipeg et du sport. L’expert évoque l’épopée des Falcons de Winnipeg aux Jeux olympiques de 1920, qui ont eu lieu à Anvers en Belgique. L’équipe manitobaine, en grande partie composée de joueurs originaires d’Islande, avait représenté le Canada et remporté le premier titre de champion olympique de hockey. « C’est un peu spécial, mais le hockey était une discipline de sport d’été. Et là, déjà, les Manitobains se démarquaient, c’étaient souvent des joueurs qui venaient d’Europe. Et c’était des gens extrêmement axés sur l’extérieur, et donc les compétitions extérieures. »

Plus d’un siècle après la victoire des Falcons, Marc-Éric Bouchard remarque que l’amour des Manitobains pour la glace n’a pas faibli. « Il n’y a pas beaucoup de montagnes comme telles au Manitoba. Mais pour les gens, c’est surtout le hockey. Il y a aussi beaucoup de patinage de vitesse, de ski de fond ou encore de curling. Ça a toujours été très fort. Souvent, les communautés au Manitoba sont très fières d’avoir leur club de curling. »

Marc-Éric Bouchard
Marc-Éric Bouchard, chroniqueur sportif pour Radio-Canada dans l’ouest. (photo : Gracieuseté)

Les Jets, l’emblème de Winnipeg

Quelques décennies après les Falcons, Winnipeg a continué son histoire passionnante avec le hockey. « Dans les années 1960-1970, il y a eu le rêve des Jets. Le rêve d’avoir une équipe professionnelle inscrite à l’Association mondiale de hockey », lance Marc-Éric Bouchard. 

Pour rappel, l’Association mondiale de hockey (AMH), fondée en 1971 et disparue en 1979, était une ligue professionnelle de hockey qui devait concurrencer la Ligue nationale de hockey (LNH). Marc-Éric Bouchard évoque l’un des coups marquants de cette ligue. « L’histoire se rappelle du pied de nez de Bobby Hull, qui jouait alors pour les Blackhawks de Chicago. Bobby Hull voulait faire suer, comme on dit, la Ligue nationale de hockey! Il a donc signé un contrat d’un million $ avec les Jets de Winnipeg, qui jouaient dans l’Association mondiale. Bobby Hull voulait prouver que l’Association mondiale était capable d’avoir une aussi bonne ligue que la LNH. Et quand on regarde les archives, cette signature, en juin 1972 au coin de Portage et Main, avait vraiment marqué les esprits. »

Si la durée de vie de l’AMH a été plutôt courte, les Jets ont quand même eu du succès. Ils ont remporté trois Coupes Avco, l’équivalent de la Coupe Stanley, dans les années 1970. Quant à Bobby Hull, il a remporté deux fois le titre de meilleur joueur de la saison régulière. 

Les Jets ont finalement rejoint la plus grande ligue de hockey du monde en 1979. Si, à date, l’équipe n’a jamais remporté la prestigieuse Coupe Stanley, plusieurs joueurs, à l’image de Bobby Hull, ont marqué Winnipeg et le monde du hockey. Cinq hockeyeurs (1) ayant joué pour Winnipeg ont notamment été intronisés au Temple de la renommée du Hockey.

« Des Européens, surtout des Suédois et des Finlandais, sont arrivés et ont connu beaucoup de succès à Winnipeg. Cette ville ressemblait à ce qu’ils connaissaient dans leurs pays scandinaves. Ils se sont un peu approprié la culture manitobaine. Certains ont été extrêmement populaires. Je pense par exemple à Anders Hedberg ou encore Thomas Steen. Et c’est grâce à eux que Winnipeg s’est créée une réputation. Oui, il fait froid. Oui, ce n’est peut-être pas la meilleure ville si on la compare aux grandes villes américaines. Mais les sportifs qui ont décidé d’y vivre ont eu du plaisir et reconnaissaient que c’est une ville de sport, une ville où les gens sont des connaisseurs. »

Les Bombers dans le coeur des Winnipégois

Si les Jets représentent très sûrement l’équipe la plus emblématique de Winnipeg, le coeur des Manitobains balance aussi pour leur équipe de football : les Blue Bombers. Et à la différence des experts de la glace, les footballeurs ont à leur avantage de gagner des titres. 

Fondés en 1930, les Bombers ont remporté 12 fois le championnat de la Coupe Grey. S’il est dur de comparer les deux équipes tant la LNH a un impact mondial, Marc-Éric Bouchard admet que « le meilleur marketing pour le monde du sport reste la victoire ». 

« C’est vrai que ces dernières années, c’est une équipe dominante. Mais ça a pris du temps pour en arriver là. Malgré tout, les Manitobains ont toujours été derrière cette équipe. Les joueurs qui y passent ont aussi montré une grande fierté de jouer pour les Bombers. Surtout avec le nouveau stade (2), qui est l’une des plus belles enceintes au pays. Alors je dirais que les Bombers sont deuxièmes derrière les Jets, mais ne sont pas tellement loin deuxièmes dans le coeur des gens et dans l’histoire des sports dans la province. »

Marc-Éric Bouchard évoque aussi la belle tradition de baseball à Winnipeg, avec notamment l’équipe des Goldeyes. L’équipe joue depuis 2011 dans l’Association américaine de baseball professionnel et a notamment remporté trois titres de champions en 2012, 2016 et 2017. 

« C’est une équipe aussi très compétitive. Il y a eu des gérants qui ont duré longtemps. Il y a aussi quelques francophones populaires. Je pense par exemple au très charismatique Maxime Poulin. »

« Oui, il fait froid. Oui, ce n’est peut-être pas la meilleure ville si on la compare aux grandes villes américaines. Mais les sportifs qui ont décidé d’y vivre ont eu du plaisir et reconnaissaient que c’est une ville de sport, une ville où les gens sont des connaisseurs. »

Marc-Éric BOUCHARD

De nouvelles franchises

Si ces équipes citées existent depuis plusieurs décennies, Winnipeg arrive encore de nos jours à créer de nouvelles franchises. L’exemple le plus parlant et le plus récent est celui de l’équipe de basketball des Sea Bears de Winnipeg. Fondée en 2022, cette équipe de basketball a connu sa première saison dans la Canadian Elite Basketball League (CEBL). 

Si les Sea Bears n’ont pas remporté la ligue, l’équipe de Winnipeg, qui a joué ses matchs au Centre Canada Life, a eu un réel succès populaire. L’équipe détient notamment le record des six matchs ayant rassemblé le plus grand nombre de spectateurs dans l’histoire de la ligue. 

Avant 2023, le record était d’environ 4 000 spectateurs. Le match du 4 août 2023 face aux Stingers d’Edmonton en a rassemblé 11 000. 

« Ce que Winnipeg a et que les autres villes n’ont pas, à part peut-être Montréal ou Toronto, c’est la curiosité des gens pour différents sports. Les Sea Bears sont donc arrivés, dans un sport de plus en plus populaire au Canada, avec un plan d’affaires très fort mené par le propriétaire David Asper. 

« Il y a aussi un contexte à cette réussite. Souvent, quand tu es une famille qui est passionnée de sport, tu veux aller voir tous les sports. Mais assister à une partie de hockey de LNH coûte cher. Les familles vont donc découvrir d’autres horizons plus accessibles. Et en voyant du baseball avec les Goldeyes, du soccer avec le Valour FC ou encore du basket avec les Sea Bears, le divertissement est tout aussi au rendez-vous. Tout cela a entraîné du succès pour les Sea Bears dès leur première année. Et les gens aiment ça, appartenir à des gagnants, à des gens qui ont du succès rapidement. »

Le sport féminin, un défi

Si Winnipeg donne aussi une bonne place au sport amateur et au développe-ment des jeunes, notamment avec l’équipe des Bisons de l’Université du Manitoba, Marc-Éric Bouchard souligne tout de même quelques défis à propos du sport féminin. 

« C’est assez dommage, alors que le sport féminin est de plus en plus populaire. On espère notamment que le Manitoba pourra monter une équipe pour rejoindre la Ligue professionnelle de hockey féminin créée cette année. Avec un bon plan d’affaires, je pense que c’est possible. D’ici 2025, il y aura aussi une ligue professionnelle de soccer féminin. Là aussi, ça prend de l’ambition. Est-ce que Winnipeg serait capable de compétitionner avec Toronto, Vancouver ou Montréal? C’est la grande question. »

Pour créer la réussite de tous ces athlètes, professionnels ou amateurs, masculins ou féminins, ça prend aussi des structures de qualité. À plusieurs reprises, Winnipeg a démontré qu’elle savait accueillir et recevoir. Que ce soit pour des compétions provinciales, nationales ou internationales. Marc-Éric Bouchard, qui a suivi beaucoup de compétitions pour son métier, souligne les réussites de Winnipeg à ce niveau. 

« Winnipeg essaie notamment régulièrement d’aller chercher des évènements mondiaux. Je pense par exemple aux mondiaux de Hockey junior (3). Ça fait longtemps, mais ça s’est très bien passé et ça a été un beau succès d’organisation. Winnipeg est habituée d’organiser des activités. Il y a un Centre des congrès, il y a aussi de plus en plus d’infrastructures capables d’accueillir des compétitions nationales et même inter-nationales. La prochaine Coupe Grey à Winnipeg aura lieu en 2025. Chaque fois que Winnipeg l’organise, c’est une réussite. »

(1) Dale Hawerchuk, Phil Housley, Robert Marvin (Bobby) Hull, Serge Aubrey Savard, Teemu Selanne. 

(2) Le stade IG Field a été inauguré en 2013 et a une capacité d’accueil de plus de 32 000 places. 

(3) Le Championnat du monde junior de hockey sur glace a eu lieu deux fois à Winnipeg en 1975 et en 1999.