Le 6 décembre dernier, le Sénat avait voté un amendement lié au projet de loi C-35, Loi relative à l’apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada. Cet amendement vise à ajouter les mots « communautés de langue officielle en situation minoritaire » (CLOSM) à la première phrase de l’article 8 de cette législation. Par cette loi, le gouvernement fédéral s’engage à maintenir le financement à long terme des programmes et services d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, notamment les CLOSM. 

Ne pas ajouter noir sur blanc cette phrase dans la loi entraînerait un risque juridique que ces communautés soient exclues d’un financement à long terme. 

Le manque de clarté du gouvernement

C’est pourquoi ce 24 janvier, à une semaine du retour des parlementaires à Ottawa, la CNPF et la FCFA se sont rejointes pour appeler les députés à adopter cet amendement venant du Sénat. Liane Roy, présidente de la FCFA, reproche notamment au gouvernement fédéral de ne pas dire clairement s’il appuiera ou non cet amendement. « Nos deux organismes font équipe, car nous n’avons pas d’écho du gouvernement. On avait très bien travaillé avec toutes les parties pour C-13, on a eu une bonne loi. Et C-35 est directement en lien avec C-13. Ce qui nous inquiète aussi, c’est que les sénateurs et sénatrices qui représentent le gouvernement ont, pendant l’étude du projet de loi à l’automne, soulevé objection après objection par rapport à cet amendement. On ne comprend pas pourquoi un gouvernement qui a tant voulu protéger le français hésiterait sur ce sujet. » 

La présidente de la FCFA rappelle donc qu’il est urgent d’agir pour soutenir un secteur en difficulté à l’échelle du pays. « Il y a une pénurie de main-d’œuvre pour les éducatrices à la petite enfance, un mauvais financement pour le nombre de places en français, la reconnaissance d’acquis des professionnels qui viennent d’ailleurs, c’est un secteur essentiel, mais souvent laissé de côté. »  

Brigitte L’heureux, directrice générale de la Fédération des parents de la francophonie manitobaine (FPFM), se dit aussi surprise par l’attitude du gouvernement, mais veut rester optimiste. « On espère vraiment que ce soit approuvé. C’est tellement important pour la communauté francophone que ces services soient assurés. La petite enfance est à la base de nos communautés, c’est par là que la langue commence. »

C-35 peut faire une différence au Manitoba

La directrice de la FPFM souligne l’importance de C-35 pour les garderies manitobaines. Selon elle, « ça permettra le développement de nouveaux centres, car on est dans une position où les jeunes francophones n’ont pas tous accès à une place en français. »

De manière générale, le Manitoba fera à nouveau face en 2024 à de grands défis pour les garderies contre lesquels il faudra trouver des solutions. « Autant à Winnipeg qu’en région rurale, il y a de longues listes d’attente pour avoir une place en garderie. La question des infrastructures et la valorisation des professionnels en petite enfance est aussi à regarder. On a donc besoin de s’assurer qu’une part du financement du gouvernement fédéral sera dédié aux francophones pour pouvoir développer ce secteur », souligne Brigitte L’heureux qui souhaite tout de même rappeler qu’au Manitoba, les organismes locaux francophones ont su s’allier pour faire avancer les choses. « C’est l’une de nos forces. On a su approcher les différents gouvernements pour expliquer nos besoins. Ils ont vu que la communauté était solidaire et que c’était une priorité. C’est un bel exemple de soutien envers la petite enfance. »