L’annonce a provoqué une onde de choc dans le milieu postsecondaire au pays. La Liberté a rencontré Christian Perron, de l’Université de Saint- Boniface, pour comprendre l’impact potentiel sur l’institution.

Depuis l’annonce du 22 janvier du ministre fédéral, les communiqués de presse, les rencontres et discussions n’ont pas arrêté de s’enchaîner dans les universités canadiennes qui accueillent des étudiants inter- nationaux (voir encadré sur la répartition des étudiants à l’USB). D’ailleurs avant même de commencer l’entrevue, Christian Perron, directeur du recrutement et services aux étudiants à l’Université de Saint-Boniface (USB), tient à préciser : « les informations que je vais dire sont sujettes à évolution pendant les pro- chaines semaines ».

Il faut dire que l’annonce a créé une onde de choc dans le système de l’éducation postsecondaire canadien. « On n’avait aucune idée qu’une annonce pareille s’en venait. Il faut quand même comprendre que le chiffre de 360 000 c’est que le Fédéral estime qu’environ 360 000 permis d’études allaient arriver à expiration dans la prochaine année. Leur objectif est donc de garder le net sur la totalité des permis d’études. C’est moins une réduction qu’une tentative de maintenir un statu quo. »

Une nouvelle responsabilité provinciale

Les Provinces et Territoires auraient donc aussi une respon- sabilité en délivrant des lettres d’attestation pour l’étudiant. Les Provinces et Territoires auront jusqu’au 31 mars 2024 pour mettre en place un processus de délivrance de lettres d’attestation. Pour Christian Perron, ce n’est pas forcément une mauvaise nouvelle. « A priori notre première analyse de la situation est que le Manitoba pourrait bénéficier de cette structure-là. D’autant que le Manitoba est la seule province au Canada à avoir de la législation en place par rapport aux questions d’étudiants internationaux, la Loi sur l’éducation internationale. »

Cependant aucune information n’a été communiquée sur la forme que prendrait cette attestation comme l’explique Christian Perron. « À présent, un règlement fédéral d’IRCC, qui existe maintenant depuis 2016, exige de l’USB de compléter un rapport de conformité pour toute sa population d’étudiants internationaux.

« Depuis le 1er décembre 2023, IRCC nous a ajouté une fonction où nous devons valider la véracité de chaque lettre d’admission envoyée par l’USB. En effet, nous on envoie une lettre officielle d’admission et lorsque le candidat dépose sa demande de permis d’étude, IRCC nous demande de confirmer que la lettre d’admission n’est pas frauduleuse. Donc maintenant, IRCC voudrait demander à la Province de générer une lettre d’attestation, mais pour dire quoi? On ne le sait pas encore. »

Impact sur l’USB

Christian Perron regrette également le message envoyé aux étudiants internationaux par le biais de cette annonce. En effet, dans le communiqué de presse du gouvernement fédéral écrit « la hausse rapide du nombre d’étudiants étrangers au Canada a également exercé une pression sur le logement, sur les soins de santé et sur d’autres services ». Le directeur du recrutement et services aux étudiants à

l’USB souhaite être clair sur la position de l’USB quant à cette idée. « Les étudiants internationaux sont importants, ils apportent beaucoup. Non seulement aux établissements postsecondaires. Mais aussi aux communautés qui les accueillent, les étudiants inter- nationaux ne sont pas un fardeau pour une société. »

Du côté de l’USB, le logement ne semble pas être un problème comme le suggère Christian Perron. « Pour la rentrée d’hiver 2024, notre résidence était déjà à capacité à cause de la rentrée de l’automne 2023 donc nous avons mis en place une stratégie pour offrir des ateliers prédépart pour pouvoir trouver du logement. Dès l’arrivée, il y avait des ateliers pour appuyer la recherche de logements. Il n’y a aucun étudiant international qui nous a communiqué qu’il avait une grosse crise pour trouver du logement. »

Outre les détails logistiques et le message véhiculé, pour l’USB, seule université francophone de l’Ouest canadien, l’enjeu est de savoir si la dimension de la minorité

linguistique sera prise en compte. « Dans les dernières nouvelles, il semblerait que le Fédéral veut créer un volet pour la francophonie canadienne. Donc finalement, les effets sur nous ne seraient pas si néfastes que pour d’autres établissements.

« Certains établissements parlent très fort sur cette mesure parce qu’une majorité de leur population étudiante est internationale. Dans ces établissements, il arrive que les frais de scolarité des étudiants internationaux soient multipliés par 3, 3,5 voire 4,2. Donc quand un étudiant canadien paie 10 000 $, un étudiant international paie 40 000 $. À l’USB, ce n’est pas le cas, notre majoration des frais de scolarité est de facteur 2, donc les frais sont entre 10 000 et 15 000 $. Et notre population d’étudiants internationaux est de 15 % et représente 5 à 6 % de nos revenus. » En 2023, les revenus de l’USB étaient de 39 164 396 $.

Répartition des étudiants à l’USB

L’Université de Saint-Boniface accueille environ 1 450 étudiants dans ses locaux. Parmi eux, environ 30 % viennent de la Division scolaire franco-manitobaine, environ 30 % viennent des écoles d’immersion, environ 15 % sont des étudiants internationaux et les autres viennent d’autres provinces ou d’autres pays avec la résidence permanente.