Aujourd’hui membre de l’équipe des Rouges, elle n’avait pourtant jamais fait d’improvisation avant.

C’est par un concours de circonstances qu’Océane Goigoux, tout juste arrivée de France, a pu tenter sa chance d’entrer dans la LIM en octobre dernier. Elle raconte :

« Je suis ici en mission de service civique, jusqu’au 3 août 2024. Je suis venue travailler au Théâtre Cercle Molière (TCM) comme médiatrice culturelle au service des communications. Quand je suis arrivée le 23 septembre, j’ai été accueillie à l’aéroport par Florent de Vellis, responsable du marketing et des communications au TCM, avec qui j’allais travailler.

« Avec sa conjointe et leur colocataire, ils m’ont aussi accueillie chez eux la première semaine. Moi, je faisais la drôle, et c’est là qu’il m’a dit que je devrais m’inscrire à la LIM. Je me suis dit que je n’avais rien à perdre, donc j’ai dit oui! Je voulais vivre mon expérience manitobaine à fond. J’étais chanceuse, il restait un camp d’entraînement. Je l’ai fait, puis j’ai été sélectionnée! »

Océane Goigoux (ici à gauche, avec sa coéquipière Huguette Vallée) est membre de
l’équipe des Rouges à la LIM.
Océane Goigoux (ici à gauche, avec sa coéquipière Huguette Vallée) est membre de l’équipe des Rouges à la LIM. (photo : Gracieuseté Derrek Bentley)

Dès le début, Océane Goigoux s’est sentie à sa place à la LIM, et ce même sans connaître toutes les clés et expressions franco-manitobaines.

« Je me suis rendue compte que les Franco-Manitobains sont extrêmement drôles. Leur humour est magnétique. J’avais peur que nos humours soient trop différents, mais finalement ça s’est très bien passé. Je ne me suis jamais sentie en trop grand décalage. »

La jeune femme de 23  ans n’avait pourtant aucune expérience en improvisation théâtrale avant de mettre le pied dans l’arène de la LIM. Par contre, elle avait fait du théâtre de l’âge de 6 ans jusqu’à 18 ans, suivi de cinq ans d’études théoriques dans les arts du spectacle.

« J’ai fait du théâtre classique, de la comédie musicale. J’ai un baccalauréat littéraire avec spécialité théâtre (1), donc je faisais dix heures de théâtre par semaine au secondaire. J’ai quand même fait un peu d’improvisation dans ce cadre, mais jamais dans un contexte de ligue comme avec la LIM. Les caucus, les thèmes, les sujets, le temps limité, tout ça était nouveau pour moi. »

Elle se souvient d’ailleurs très bien de son tout premier match d’improvisation, en octobre 2023 : « J’étais stressée, pétrifiée. Je ressentais de la pression du public, mais aussi de la qualité des joueurs en face de moi. Mais le fait d’avoir de l’expérience en théâtre m’a aidée à comprendre et aimer ce trac. La LIM me sortait de ma zone de confort, c’était une bonne chose. »

Un entraînement cérébral

Bien sûr, il manque encore à Océane Goigoux beaucoup de références culturelles et de vocabulaire propres à une enfance et une jeunesse passées au Manitoba, mais ça ne l’empêche pas de se sentir comme une membre à part entière de l’équipe des Rouges menée par Carine Roy.

C’est même devenu un défi interne amical. « Lors de notre première rencontre des Rouges, le mot niaiseux est ressorti. J’étais confuse, je ne savais pas ce que ça voulait dire. Alors on m’a lancé le défi de le placer dans une impro! Pour le moment, je n’en ai pas trouvé l’occasion. Ce n’est pas facile à faire quand ce n’est pas dans ton vocabulaire! »

Le franglais, souvent utilisé dans les matchs d’improvisation de la LIM, a été un autre grand défi pour Océane Goigoux. « Au début, mon cerveau passait difficilement de l’un à l’autre, alors c’était un problème pour bien suivre. Mais quand je ne comprends pas quelque chose, je demande toujours. »

À l’inverse, Océane Goigoux dit parfois des phrases pendant ses matchs d’improvisation qui « n’ont pas la réaction que j’attendais. Mais ce n’est pas grave, c’est ça l’impro. Tu ne t’attardes pas sur quelque chose, tu avances avec les réactions des autres joueurs et de la salle. Si ça ne fonctionne pas, tu passes à autre chose. C’est bienveillant. On ne te juge pas. »

Il n’en reste pas moins que pour la Française, l’exercice reste une difficile gymnastique de l’esprit. « À la LIM, je suis entourée de grands maîtres de l’improvisation, alors pour moi, c’est vraiment un entraînement du cerveau, confie-t-elle. Ça fait beaucoup travailler l’inventivité et la rapidité du cerveau.

« Il faut toujours bien observer la dynamique et bien écouter, pour pouvoir reconnaître si un joueur sur la scène attend d’autres joueurs ou non dans son histoire. À la fin d’un match, je suis toujours vraiment fatiguée et j’ai très chaud! »

Mais quand il s’agit de la LIM, Océane Goigoux est partante pour tout. Sauf pour les soirées spéciales, comme les matchs de maîtres. « Ma limite, ma peur, elle est là. Ces matchs demandent des connaissances, une maîtrise et une aisance particulières, alors je préfère être spectatrice. J’apprends aussi beaucoup en observant. »

Facteur d’intégration

Malgré les petites incompréhensions de langage passagères, Océane Goigoux est formelle : la LIM a  grandement participé à son intégration à la communauté franco-manitobaine.

« La LIM, c’est vraiment un rendez-vous communautaire et une grande fierté pour les Franco-Manitobains, et tout le monde est bienvenu pour porter cette fierté avec eux. Alors c’est le lieu idéal pour créer des liens sincères avec les gens, tisser sa toile dans la communauté. »

C’est d’ailleurs grâce à la LIM qu’elle a pu participer au 40e Parlement jeunesse franco-manitobain (PJFM), du 2 au 4 février dernier.

Elle explique : « L’un des membres de mon équipe des Rouges, Sébastien Fréchette, était l’un des organisateurs du PJFM cette année. C’est lui qui m’a proposé de participer, même si je ne viens pas d’ici, parce que je suis dans la bonne tranche d’âge et francophone. Si on ne se connaissait pas grâce à la LIM, il n’aurait certainement pas pensé à moi! »

Dans sa vie quotidienne aussi, la LIM aide Océane Goigoux. « Je ne pense pas à la LIM matin, midi et soir, mais faire de l’improvisation m’aide certainement à lâcher prise. Ça m’apprend à accepter que je ne peux pas tout maîtriser dans ma vie. Je me laisse porter plus facilement. »

La finale de la saison 2023-2024 de la LIM est prévue le 3  mai, après les deux demi-finales qui auront lieu les 12 et 19 avril.

(1) Le baccalauréat en France correspond au diplôme de fin de 12e année au Canada. Dès l’équivalent de la 11e année, les élèves français doivent choisir d’étudier plus en profondeur certaines matières, qui deviendront alors leur spécialité au baccalauréat.