En 2014, sur le territoire visé par le Traité n°1, des membres des familles de femmes, de filles et de personnes bispirituelles enlevées et tuées ont fondé un organisme, géré par des bénévoles, nommé Drag the Red (DtR). L’activité principale de DtR est de conduire un bateau doucement le long de la rivière Rouge, à et aux environs de Winnipeg, en draguant le fond de ses eaux troubles avec des crochets soudés, avec l’espoir de déloger des preuves qui aideraient à retrouver un être cher.

Voici le synopsis de cette nouvelle pièce. Un synopsis qui aborde des sujets durs, forts, mais nécessaires selon Geneviève Pelletier, directrice générale et artistique du TCM. « Certainement, cette saison, tous les spectacles ont eu une part liée à des sujets d’actualité qui était dans la volonté d’être à l’avant de discussions qui ne sont parfois pas simples à avoir. Mais ce qui est fun avec l’art et le théâtre, c’est qu’on peut regarder cet objet-là en venant de différentes éducations. On peut discuter. »

Apprendre des matriarches autochtones

Tara Beagan, metteuse en scène et scénariste de Rise, Red River, appuie ces propos. Celle qui travaille sur cette pièce depuis 2018 avec son conjoint Andy Moro qui s’est occupé du décor, de la vidéo et des éclairages, donne plus de détails sur ce projet qui lui tient à cœur. « Je travaille toujours avec des collaborateurs qui veulent mettre en avant des histoires autochtones, des histoires dirigées par des Autochtones, conçues et réalisées par des Autochtones, et en particulier, bien sûr, des matriarches autochtones.

« Je veux dire par là que presque tout ce que j’ai appris dans ma vie vient des matriarches autochtones et que le pouvoir des femmes autochtones ici même, dans le Traité n°1, est tellement palpable que la narration de cette histoire est malheureusement pertinente sur tout le continent, tout le temps. »

Alors que Geneviève Pelletier parle d’actualité, cette pièce peut faire résonner avec ce qu’il se passe depuis plusieurs mois autour du dépotoir de Prairie Green à Winnipeg. Pour rappel, la police croit que les restes de Morgan Harris et de Marcedes Myran s’y trouvent. Le gouvernement d’Heather Stefanson avait refusé de fouiller les lieux en invoquant des raisons de sécurité.

De l’activisme artistique

Tara Beagan, qui croit à ce qu’elle appelle l’activisme artistique pense que l’art peut faire bouger les choses dans la société.

« Le rôle principal de l’art est de développer l’empathie des gens et de leur rappeler qu’aucun d’entre nous n’est seul et que nous sommes tous très semblables. J’espère aussi que cette pièce inspirera les militants en première ligne et leur rappellera qu’ils ne sont pas seuls, qu’il y a des gens qui se tiennent à leurs côtés et qui font un travail similaire, même si nous ne sommes pas sur la ligne de front et que nos cœurs sont avec eux. »

Dans le théâtre du TCM, complètement remodelé pour l’occasion pour faire apparaître la rivière Rouge, trois actrices se partagent donc la scène : Tracey Nepinak, Caleigh Crow et Marsha Knight.

Caleigh Crow justement, interprète jusqu’à trois personnages différents dans la pièce. Elle en explique les difficultés.

« Lisa, Tanya et Ronda sont trois femmes au caractère différent. L’une est organisée et fait des recherches, l’autre est plus brute et a une vie plus difficile, la dernière avait une vie stable, un grand cœur et une vie de maman. Pour moi, il s’agit de trouver la bonne interprétation. Je pense que ces trois personnages vivent en moi. On a tous une partie ange et démon, il y a plusieurs couches. J’ai donc dû chercher en moi pour trouver des moments de ma vie où je me suis comportée comme chacune de ces femmes. »

Rise, Red River est une pièce trilingue en anishinaabemowin, français et anglais.