Cette année, 847 plaintes ont été jugées recevables, un chiffre en baisse. Un point de référence pour les prochaines années puisque désormais, les plaintes se feront sous la mouture de la Loi sur les langues officielles adoptée en 2023.

C’est donc une nette baisse qu’a constaté le Commissaire aux langues officielles son rapport annuel. En effet, en 2022-2023, 1 788 plaintes avaient été jugées recevables. En 2021-2022, c’étaient 5 409. La question est donc de comprendre ce qui a pu expliquer cette baisse drastique. Raymond Théberge a une piste d’explication.

« Typiquement, le nombre de plaintes est influencé par ce qui se passe dans l’environnement. Ces dernières années, je rappelle qu’il y a eu des évènements déclencheurs.

« Par exemple, le discours unilingue anglophone du PDG d’Air Canada, Michael Rousseau, en 2021. La nomination de la gouverneure générale, Mary Simon, en 2021 aussi. Ce sont deux exemples qui ont généré énormément de plaintes.

« L’année 2023-2024 n’a pas connu ce type d’évènement. Cependant, le nombre de plaintes reste élevé tout de même. »

Sur les 847 plaintes, 533 portaient sur les communications avec le public et les prestations de services et 227 se rapportaient à la langue de travail. Raymond Théberge reste donc sur ses gardes pour la prochaine année en cours. Depuis l’adoption de la nouvelle Loi sur les langues officielles, il s’agit pour lui d’une nouvelle ère pour les langues officielles. « Présentement, avant l’adoption de la nouvelle Loi, le seul pouvoir du commissaire était d’émettre des recommandations.

« Désormais, je peux conclure des ententes de conformité, je peux émettre des ordonnances pour exiger la conformité. Je peux aussi faire de la médiation. Enfin, lorsque le gouvernement fédéral aura adopté un décret, je pourrais imposer des sanctions administratives pécuniaires dans le domaine des transports. »

Il faut dire que la plupart des plaintes sont en lien avec le public voyageur d’Air Canada. « Je pense que le défi pour ces organisations, comme Air Canada, c’est la mauvaise compréhension des obligations vis-à-vis de la Loi. Par exemple, lorsqu’on parle des administrations aéroportuaires, nous ne sommes pas d’accord sur la définition de qui est public voyageur. Est-ce quelqu’un qui a un billet d’avion? Quelqu’un qui utilise le stationnement? Mais la jurisprudence progresse dans ce sens.

« Parce qu’il y a un manque de compréhension, il n’y a pas eu de développement de culture organisationnelle pour respecter les obligations. »

Deux recommandations

Cette année, Raymond Théberge a formulé deux recommandations pour les différentes institutions fédérales. La deuxième recommandation demande l’intégration par les sous-ministres et les administrateurs généraux de la fonction publique fédérale un plan pour atteindre la partie VII de la Loi sur les langues officielles.

« Cette partie de la Loi est là pour appuyer le développement et l’épanouissement des communautés de langues officielles en situation minoritaire. Il faut donc comprendre de quelle manière les institutions fédérales vont respecter leurs obligations inscrites dans la Loi.

« Pour guider les institutions fédérales, le Commissariat a publié une feuille de route sur ces obligations. La partie VII est souvent mal respectée parce que mal comprise. Cette année, nous voulons donner des outils pour que les obligations soient très claires. »

La première recommandation découle tout simplement de la modernisation de la Loi. Il est prévu qu’une révision ait lieu tous les dix ans. Mais le Commissaire recommande un travail en amont.

« L’autre recommandation vise Patrimoine canadien en collaboration avec le Conseil du Trésor. En 2033, on est censée avoir une révision de la Loi. On propose à Patrimoine canadien de développer des indicateurs pour mesurer la mise en œuvre de la Loi, mesurer son impact sur l’appareil fédéral ou encore mesurer l’impact sur les CLOSM.

« Lorsqu’on va se pencher sur la révision de la Loi, nous aurons les informations nécessaires pour que la Loi évolue au rythme de la société. »

2024-2025 sera donc analysé avec la loupe de la Loi sur les langues officielles modernisée et adoptée en 2023. Raymond Théberge souhaite rappeler aux Canadiens et Canadiennes l’importance des plaintes.

« C’est important pour les gens d’affirmer leur droit. Un droit qui n’est pas utilisé est un droit qui peut se perdre. »