Ayant elle aussi joué un rôle dans les pensionnats autochtones de l’Ouest et du Nord, le Centre national pour la vérité et la réconciliation est en discussion avec la congrégation des Soeurs Grises pour peut-être aboutir à une entente de divulgation de leurs archives.

Le Centre national pour la vérité et la réconciliation (CNVR) est en discussion avec la congrégation religieuse des Sœurs Grises afin de rédiger l’ébauche d’une entente de divulgation.

Cette entente permettrait notamment l’accès plus rapide aux dossiers personnels des Sœurs décédées. Aujourd’hui, il est nécessaire d’attendre 50 ans après la mort d’une sœur pour que son dossier personnel soit rendu public dans les archives provinciales, cette entente aurait pour objectif, entre autres, de les rendre accessibles bien plus tôt pour le CNVR.

Au début du mois de décembre 2024, le CNVR et les Oblats de la Province OMI Lacombe ont signé une entente permettant la divulgation de ces dossiers deux ans après le décès.

Cette entente représente un pas en avant considérable pour faire la lumière sur ce qui s’est déroulé dans les pensionnats autochtones.

Les Sœurs Grises ont elles aussi joué un rôle important dans plusieurs pensionnats autochtones à l’ouest et au nord du Canada. Elles étaient enseignantes ou encore administratrices. La collaboration entre le CNVR et cette congrégation religieuse est donc essentielle.

Raymond Frogner, directeur des archives du CNVR souligne tout de même que les Sœurs Grises est l’un des ordres catholiques le plus « volontaire » lorsqu’il s’agit de dévoiler et partager ses documents. À ce titre, le directeur est optimiste qu’une entente similaire à celle signée avec les Oblats pourra être trouvée.

Pour un portrait plus fidèle

« Par le passé, nous avons déjà parlé avec les Sœurs Grises et le CNVR a obtenu les droits intellectuels et d’auteur pour tous les documents. Si des chercheurs trouvent une photo dans nos archives, ou font une demande d’accès, nous avons le droit de donner ces documents aux chercheurs pour publication. »

L’objectif de ces négociations est clair, « trouver un accord le plus ouvert possible ».

Les documents que l’entente pourrait concerner sont divers. Il s’agit de documents concernant la formation des enseignantes, de rapports et de comptes rendus sur les Sœurs rédigés par leurs supérieures. Des informations plus personnelles également qui peuvent servir à brosser un portrait plus fidèle du contexte de l’époque.

« Il est difficile de dire exactement combien de Sœurs Grises ont été impliquées, mais l’on parle très certainement de centaines », explique Raymond Frogner, qui laisse aussi entendre que le problème des pensionnats autochtones est un problème pancanadien.

« La plupart des ordres religieux qui étaient implantés au Canada au moment de la création des pensionnats étaient impliqués. On sait que les ordres catholiques ont été impliqués avec une quarantaine de pensionnats autochtones au Nord et à l’Ouest. »

D’autre part, un accès libre et collaboratif aux archives respectives des différents ordres religieux est un moyen efficace de faire la lumière sur certaines zones d’ombre.

Éclaircir les zones d’ombre

« On sait qu’il existe encore des incohérences avec le système de documentation des ordres religieux, les règles ne sont pas toutes les mêmes. Il existe le droit canonique (1), les supérieurs dans les provinces, le gouvernement fédéral, les niveaux d’autorités sont mélangés. Pour cette raison, il existe un certain désordre dans la gestion des documents. »

Par conséquent, des documents ont été perdus dans tous les ordres. Et c’est là que l’importance de ces ententes prend tout son sens.

Étant donné que les Sœurs Grises ont travaillé aux côtés des Oblats, l’on peut donc voir leurs systèmes d’archives comme des vases communicants. Il est tout à fait possible que des informations ayant disparu des archives des Oblats, puissent être trouvées dans les documents détenus par les Sœurs Grises et vice versa.

Enfin, lors de la signature de l’entente de divulgation avec les Oblats au mois de décembre 2024, Raymond Frogner indiquait que les recherches à ce jour ont permis d’identifier 707 Oblats ayant travaillé dans les pensionnats autochtones. 299 d’entre eux étaient originaires du Québec. Avec ces découvertes, le CNVR a pu démontrer que le Québec lui aussi avait sa part de responsabilité dans l’histoire des pensionnats autochtones.

Aujourd’hui, Raymond Frogner fait valoir qu’un programme de recherche en partenariat avec une équipe de l’Université de Montréal a démarré pour trouver les documents, qui se trouvent au Québec, et qui concernent les pensionnats autochtones.

(1) Ensemble des lois et des règlements adoptés ou acceptés par les autorités catholiques pour le gouvernement de l’église et de ses fidèles.