Mme Gould, nous sommes à trois jours des résultats de la course à la direction du Parti, comment est-ce que vous vous sentez?
Je n’arrive pas à croire que nous en soyons déjà à ce point-là. Ça a été une expérience incroyable de pouvoir parler avec les gens d’un bout à l’autre de ce pays et j’ai hâte de voir cette course se terminer et de la remporter ce dimanche.
Effectivement, le temps est passé vite, est-ce que vous avez le sentiment que les idées que vous avez avancé pendant cette campagne ont pris assez de place?
Pendant cette campagne, j’ai essayé de mettre en avant des idées nouvelles qui répondent aux besoins des Canadiens et des Canadiennes actuellement. J’ai annoncé des idées pour répondre aux questions du coût de la vie, à la crise du logement. J’ai avancé des plans pour organiser notre filet social, renforcer notre économie en créant plus d’entrepreneurs. Je dirais que les membres du Parti libéral y ont répondu d’une manière très positive.
Mais je suis un peu déçue avec le dialogue entre les candidats à la chefferie. Je n’ai pas vraiment entendu qu’elles étaient leurs idées pour le parti et le Canada. Je trouve ça dommage. Cette campagne était l’occasion de débattre de nos idées pour le futur du parti et du pays, c’est ce que j’ai essayé de faire pendant les débats. Je suis ravi cependant d’avoir vu les autres candidats changer leurs messages clés en répondant à mes idées.
Vous mentionnez les débats, justement lors du débat en français, vous avez été la seule à parler de la francophonie. Est-ce que vous pensez qu’il y a un déclin aujourd’hui de la francophonie au Canada?
Effectivement, j’ai été la seule à en parler. À mon avis, si on veut combattre le déclin de la langue française au Canada, il faut inclure les francophones hors Québec. Ce sont ces communautés qui gardent la langue et la culture francophone en vie. Elles ont une voix importante, et elles ont besoin d’avoir accès à des services essentiels dans leur langue maternelle. Nous sommes un pays bilingue et il faut assurer que les francophones hors Québec et les anglophones du Québec aient accès aux services.
Je suis fière de ce que nous avons accompli en tant que gouvernement, avec notamment la Loi sur les langues officielles. L’une des problématiques que je connais bien c’est celle des places en garderies. Si vous êtes francophone et que vous souhaitez accéder à une place en garderie en français, il faut pouvoir y avoir accès. Ce n’est qu’un exemple, mais c’est important.
Selon vous, est-ce que revoir à la hausse les cibles d’immigration pourrait être une solution pour assurer la pérennité de la francophonie hors Québec?
Tout à fait, il faut continuer d’avoir des cibles. Mais pour protéger la langue française au Canada, il faut assurer l’accès aux services en français. C’est une chose d’avoir une immigration francophone, mais s’ils arrivent dans une communauté où ils n’ont pas accès au français, comme beaucoup d’immigrants au Canada, ils parleront anglais, et leurs enfants parleront anglais. Il faut donc assurer l’accès aux garderies, à l’éducation et aux services essentiels en langue française.
Une chose que l’on ne peut pas éviter, c’est l’actualité très chargée autour de Donald Trump et des tarifs douaniers…
C’est une nouvelle réalité pour notre pays et c’est la preuve que Donald Trump est en train d’abandonner ses amis, ses alliés. Il y a la question des tarifs, mais aussi sa décision d’abandonner l’Ukraine et de se rapprocher de la Russie. C’est un abandon du monde libre et démocratique. C’est le moment pour nous de réaliser que notre relation avec les États-Unis doit changer. La confiance que nous entretenions avec les É-U est brisée. Ça ne veut pas dire que l’on doit abandonner cette relation, mais elle doit changer.
C’est l’occasion pour nous de renforcer nos relations avec les autres pays démocratiques en Europe, Asie, en Afrique ou en Amérique latine.
Toujours à ce propos, qu’avez-vous pensé de la réponse du Canada à l’imposition de ces taxes?
La réponse du gouvernement actuel est un bon point de départ et c’est important de répondre avec force, unité et intelligence à Donald Trump. À mon avis ce n’est que le début. Si ces tarifs durent, on doit répondre plus fortement pour démontrer aux Américains qu’ils ne peuvent pas s’attaquer au Canada de cette manière, car on a les moyens de répondre.
Ce n’est pas ce qu’on veut, mais on peut répondre avec force. Je suis très fier de la réponse des Canadiens, ce sont eux qui prennent la défense du Canada lorsqu’ils vont faire leurs courses et qu’ils décident de choisir des produits canadiens. Ce sont les petites choses qui démontrent qui nous sommes en tant que Canadiens.
Vous avez été ministre du Développement international, comme vous le disiez, il va être important pour le Canada de renforcer ses liens commerciaux avec d’autres pays démocratiques. Est-ce que ces partenariats peuvent remplacer ou au moins combler le manque à gagner de cette rupture avec les États-Unis?
Je crois que ça va être très difficile de remplacer entièrement notre relation avec les É-U. C’est important que le Canada diversifie ces marchés. On a déjà signé des ententes, mais ça va être difficile. Il faut reconnaître que beaucoup de notre commerce avec les É-U concerne souvent les mêmes entreprises. Les entreprises ont parfois des usines ici au Canada et aux É-U. C’est pour ça que l’on doit faire de notre mieux pour défendre notre économie et faire disparaître les tarifs de la table des négociations.
Une dernière question, si vous êtes élue ce dimanche 9 mars, vous souhaiteriez vous déclencher des élections générales le plus tôt possible?
À mon avis, il faut voir où nous en sommes ce dimanche. Si nous sommes toujours pris dans cette guerre de tarifs, ce n’est peut-être pas le meilleur moment de déclencher des élections. Toute l’énergie du gouvernement doit être consacrée à la défense du Canada.