Une initiative originale qui illustre l’importance de briser les silos.

C’est en juin que s’est tenu le Forum de la francophonie manitobaine au Théâtre Cercle Molière. Comme chaque année, depuis la refonte de la Société de la francophonie manitobaine en 2017, il a pour vocation d’être un espace de concertation qui réunit acteurs communautaires, institutionnels et citoyens pour discuter des enjeux, priorités et orientations mais c’est aussi l’occasion de faire le point sur le Plan d’action communautaire (PAC).

Cette année ce sont trois leaders communautaires qui se sont exprimés lors d’un panel de discussion.

À savoir, Edouard Lamontagne, directeur général de la Fédération culturelle de la Francophonie manitobaine, Chantal Young, directrice générale de Sports en français et Wilgis Agossa, directeur général de la Cathédrale Saint-Boniface et organisateur de l’initiative Noir et fier.

La discussion et l’évaluation du PAC ont permis de soulever de nombreux sujets. L’on y a soulevé quelques succès, comme l’amélioration de la visibilité du français dans l’espace public, ou encore la favorisation de l’engagement et l’alignement entre les organismes communautaires francophones.

Toutefois, certains défis ont encore la peau dure.

L’une des problématiques mises en avant par Myriane Ouellette, qui présentait notamment le rapport d’évaluation et animait la conversation, est celle de l’existence d’une certaine compétitivité entre les différents organismes.

La directrice adjointe de la Société de la francophonie manitobaine, Roxane Dupuis, sans parler de compétition, reconnaît que le contexte économique est délicat.

« Il existe une limite au niveau des financements disponibles et les besoins des organismes communautaires sont grandissants. »

La collaboration comme solution

Pour pallier cela, la solution mise en avant par les panélistes était celle de la collaboration.

L’on apprenait ainsi que Sports en français et la Maison des artistes visuels francophones s’étaient rapprochés dans le cadre d’une initiative qui se déroulera pendant le mois d’août dans le Jardin de sculptures sur le boulevard Provencher.

Un partenariat entre deux organismes qui, sur papier, semble loin d’être évident et qui a pourtant su aboutir sur quelque chose de concret : un atelier de Taï Chi.

Lou-Anne Bourdeau, directrice de la MDA, travaille sur la programmation estivale pour le Jardin de sculptures et prend l’initiative de contacter Chantal Young.

« On a peut-être l’impression que l’art et le sport sont deux choses complètement opposées, mais je pense qu’ils contribuent tous les deux au bien-être général. C’est bon pour la santé mentale et physique. Alors on trouvait que c’était une bonne idée. »

Chantal Young quant à elle n’a pas hésité à répondre par la positive.

« C’est un partenariat qui n’est pas naturel, nous travaillons tous les deux dans des domaines qui sont complètement différents, mais ça ne semble pas non plus aberrant. Ça symbolise vraiment cette idée selon laquelle il faut oser et travailler ensemble. »

Tout en respectant leurs mandats, les deux organismes vont pouvoir offrir un peu de changement dans leurs programmations. Par conséquent, ils seront chacun en mesure de toucher des personnes « que l’on n’aurait pas pu rejoindre autrement ».

Pour Lou-Anne Bourdeau, cet atelier est l’occasion idéale de mettre de l’avant le jardin des sculptures. « On a une programmation artistique dans la galerie, mais on a aussi des installations ici. Je suis consciente que tout le monde ne s’intéresse pas forcément aux galeries d’art, mais là justement ça permet de diversifier notre proposition. »

Et les retombées positives qu’anticipe Chantal Young ne s’arrêtent pas là.

La directrice générale parle d’un rapprochement, « d’agrandir nos cercles ».

« Peut-être qu’à l’avenir, si l’on a besoin d’eux, et inversement, nous pourrons compter les uns sur les autres. D’un point de vue de direction, si j’ai besoin d’une politique, d’un règlement ou d’un renseignement, je pourrai les approcher plus naturellement parce que l’on aura bâti une relation. »

Peut-être une solution d’avenir?

Du côté de la SFM aussi, on salue le projet. Roxane Dupuis fait valoir qu’afin de faire face à la conjoncture, les organismes de la francophonie se doivent d’être créatifs lorsqu’il s’agit de créer des initiatives. Toujours à propos du rapprochement entre la MDA et Sports en français, elle dit y voir une « réussite ».

« L’on parvient à faire rayonner la francophonie comme amie, vecteur de changement et plus seulement comme la bénéficiaire d’un financement. »

Par ailleurs, la SFM se penche d’ores et déjà sur un futur plan d’action qui devrait mettre de l’avant cet esprit de collaboration et de cocréation.

« Nous avons des idées, mais l’on ne veut pas imposer quoi que ce soit. Nous souhaitons que les organismes de la communauté prennent part à la réflexion. Et qu’ils nous aident à trouver la solution ensemble. »

Sans parler d’amalgamation et en préservant l’autonomie de chaque organisme, Roxane Dupuis pense que des rapprochements, des collaborations et des partages peuvent avoir lieu; au niveau des employés, par exemple. Cela pourrait permettre de faire tomber certaines barrières et de renforcer par là-même, à la fois les entités, mais aussi la communauté elle-même.

« Ça peut être bénéfique pour le fonctionnement. Maximiser les ressources humaines et financières. Je sais que c’est parfois difficile de trouver les personnes avec les bonnes compétences et les retenir. Ce qui arrive souvent dans les organismes, c’est qu’il y a de gros roulements de personnel. Les gens partent souvent pour de meilleurs salaires et c’est difficile d’être compétitif. Mais si on s’y mettait ensemble? »

La question est posée.

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