Ce sera l’occasion pour la communauté de célébrer et de découvrir la culture philippine à travers le cinéma pendant cette semaine de festivités.

Jusqu’au 24 août, le festival Kultivation se déroule dans la ville de Winnipeg, mettant en valeur la culture philippine à travers la gastronomie, l’art, la musique et la danse.

« Le festival accueillera différents évènements tels qu’un pop-up de chefs, une battle de b-boys, un marché, un concours de dégustation de lumpia et un festival du film », explique Nathan Flores, directeur du SALA Film Festival.

« Il s’agit d’une semaine riche en évènements qui passionnent les membres de notre communauté et auxquels ils s’investissent pleinement. Nous voulons inciter les gens à vivre cette expérience. »

Diplômé du programme Sisler Create, un programme postsecondaire d’études cinématographiques, Nathan Flores a commencé son parcours d’artiste et de cinéaste à travers des projets industriels et indépendants.

L’artiste a d’ailleurs réalisé des installations pour Nuit Blanche, et travaille en étroite collaboration avec le Kultivation Festival depuis ses débuts. Il nous en dit plus sur la création du SALA Film Festival, qui aura lieu pendant la célébration.

« Nous avions commencé à y réfléchir il y a quelques années, mais la pandémie a mis un frein à ce projet », explique Nathan Flores.

« C’est l’année dernière que nous l’avons vraiment mis en place le festival de film. Cette année, nous avons été encore plus inspirés, car nous avons ouvert davantage de candidatures et nous avons reçu des candidatures internationales provenant des Philippines ou d’autres régions du Canada. »

Un espace intime

Rapportant au concept de « SALA », qui signifie « salon » en tagalog, le festival cherche à recréer une atmosphère conviviale, intime et accueillante — un espace de partage, comme à la maison.

Cette idée se reflète non seulement dans l’organisation du lieu, mais aussi dans la programmation elle-même.

« C’est comme quand vous êtes enfant et que vous regardez la télévision, que vous vous ennuyez et que vous zappez parmi un million de chaînes. C’est l’atmosphère que nous essayons de créer avec notre programmation », explique-t-il.

Le festival propose deux volets : l’un met de l’avant des cinéastes expérimentés, habitués des festivals plus établis, tandis que l’autre — le programme SALA ou Living Room — célèbre la diversité des formes et des voix, en mettant l’accent sur une pluralité de niveaux et d’expériences.

« Nous n’envoyons pas seulement des films qui ont été présentés dans de grands festivals, mais aussi des films d’étudiants, des vieilles cassettes vidéo, des archives de famille ; nous sommes très ouverts à l’expérimentation et nous ne nous limitons pas à la narration. »

Échange culturel

Accueillir la communauté à ce festival, c’est ouvrir un espace d’échange culturel et de connexion.

« Nous voulons montrer que nous sommes là, que la communauté philippine est là, et nous voulons partager notre culture. C’est l’une des choses auxquelles nous accordons de l’importance : partager et donner. »

L’objectif est aussi d’atteindre un public élargi — y compris ceux qui ne connaissent pas bien la communauté philippine manitobaine.

« J’espère que les personnes qui viennent de l’extérieur et qui ne connaissent pas très bien la communauté, mais aussi les différentes générations — mes grands-parents, mes parents, les jeunes — pourront toutes être présentes. Ce serait formidable de montrer aux gens que l’art, c’est important », dit-il.

Pour Nathan Flores, cette initiative dépasse la simple idée de visibilité. Il y voit un espace de reconnexion aux racines.

« En toute honnêteté, en grandissant, j’avais l’impression d’être très déconnecté de ma culture », confie-t-il. « Je ne parlais pas tagalog quand j’étais enfant. C’est quelque chose pour lequel Kultivation m’a donné un foyer. Et cela peut être le cas dans n’importe quelle culture ou ethnie, où vous ne vous sentez pas suffisamment lié à votre pays d’origine. »

« Il y a un décalage, mais on ne s’en rend compte que lorsqu’on est plus âgé. Ce n’est que maintenant que je m’en rends compte, et grâce à des choses comme Kultivation, cela me permet de reconnaître que, que l’on soit de la première, deuxième ou troisième génération — on est ici et on est Philippins. »

Célébration de l’identité

À travers ses propres œuvres, Nathan Flores explore lui aussi cette quête identitaire.

En tant qu’artiste et cinéaste de deuxième génération, le festival SALA devient pour lui un moyen d’exploration personnelle autant que de célébration collective.

« Cet évènement est aussi un moyen pour moi de découvrir ma propre culture, en tant qu’immigrant de deuxième génération. Je découvre beaucoup de choses sur mes racines à travers cela. »

C’est là où revient encore le concept de SALA pour Nathan Flores, ce salon n’est pas qu’un espace physique ou un simple thème, mais une mémoire collective.

« Mes films ne racontent peut-être pas beaucoup d’histoires philippines, mais depuis peu, j’essaie d’y intégrer cet aspect. Je m’en voulais de ne pas parler ni comprendre la langue, mais il y a toujours ce lien : je ne parle peut-être pas tagalog, mais ce que je filme dépeint ce qui se passe dans une maison philippine. »

« Et ce sont des expériences vécues dans mon salon. Que tu parles tagalog ou non, tu respires les odeurs de la nourriture que ta lola (maman) est en train de cuisiner, ou tu entends les bruits forts de tes cousins qui courent dans les escaliers pendant les fêtes, ou tu entends les titas et les titos (tantes et oncles) bavarder. Je ne parlais peut-être pas tagalog, mais je comprenais que c’était plus que ça. »

Le directeur du SALA Film Festival se dit reconnaissant pour ces initiatives qui permettent de nouer des liens communautaires et donner l’espace à de jeunes créateurs dans leur quête identitaire.

« En grandissant, j’ai eu beaucoup de mal à trouver ma place dans une communauté et même à montrer ce dont j’étais capable, et c’est toujours un processus en cours », avoue-t-il.

« J’imagine simplement ma génération ou les générations futures, venir au SALA et ce que cela pourrait signifier dans 5 ou 10 ans, voire même dès l’année prochaine. »