Par Sophie GAULIN, directrice et rédactrice en chef de La Liberté.

Intitulé Vous, madame, vous avez le feu sacré, ce texte de près de 200 pages n’est pas une autobiographie au sens classique, mais plutôt une traversée sensible et vivante de plusieurs décennies passées dans les écoles de la Division scolaire franco-manitobaine (DSFM).

Lefco me l’écrivait avec chaleur et humilité, dans un courriel expédié d’Ottawa le 30 juillet :

« Chère madame Gaulin, Bonjour d’Ottawa. Comme mon amitié avec La Liberté date depuis plusieurs années, j’aimerais, par la présente, vous offrir gratuitement, mon projet d’une vie d’enseignante œuvrant dans un milieu minoritaire. Qui serait intéressé à lire les souvenirs de Lefco Doche? Les centaines de mes anciens élèves qui s’y trouveront dans les pages et les activités auxquelles ils ont participé. Leurs parents qui, avec nostalgie, se rappelleront du succès de leurs enfants. La communauté, le Cercle Molière, le FTJ, les nombreux collègues, et le côté politique de la DSFM. »

Ce geste, simple en apparence, est immense dans sa portée. Lefco Doche ne nous a pas seulement transmis un document : elle nous a confié un pan de sa vie professionnelle, un témoignage rare sur des décennies d’enseignement en milieu minoritaire.

Intitulé Vous, madame, vous avez le feu sacré, ce manuscrit semble porter en lui une mémoire précieuse — celle de la relation tissée avec ses élèves, de la passion pour la langue française, et des engagements portés au sein de la Division scolaire franco-manitobaine.

Nous avons le privilège, à La Liberté, d’être dépositaires de ce legs. Et nous l’honorons avec gratitude. Ce manuscrit, Lefco Doche nous l’a confié non pour qu’il dorme dans nos tiroirs, mais pour qu’il soit partagé, lu, transmis.

Dans cet esprit, nous le rendons aujourd’hui accessible dans son intégralité sur notre site web, en version numérique. Ce sera notre façon de faire vivre encore longtemps cette voix d’enseignante passionnée, qui croyait profondément en la capacité des jeunes à devenir eux-mêmes des passeurs de culture.

Un hommage plus formel prendra la forme d’un cahier de Noël dans lequel nous publierons des extraits choisis du manuscrit, accompagnés de témoignages d’élèves, de collègues, de membres de la communauté. Ce cahier sera à l’image de Lefco : lumineux, enraciné, sincère. Il rendra compte non seulement d’un parcours personnel remarquable, mais aussi de tout un pan de notre histoire éducative et communautaire francophone.

Dans ce travail de mémoire, nous voulons aussi saluer l’immense contribution de Bernard Bocquel. Grâce à sa série de « Grandes entrevues », il a su capter, au fil des ans, la parole de figures incontournables de notre communauté. La rencontre qu’il a menée avec Lefco Doche, publiée le 4 décembre 2019, en est un parfait exemple (cette grande entrevue est aussi rendue disponible dès aujourd’hui sur notre site web).

À travers ses questions posées avec justesse et sensibilité, Bernard Bocquel a permis à Lefco de déployer, en quelques pages, toute la profondeur de sa pensée, sa générosité, sa lucidité. Il a vu, avec une rare acuité, ce que cette femme représentait pour nous collectivement : une mémoire vivante de l’éducation francophone, un modèle de courage, une présence marquante dans la vie de centaines de jeunes.

Dans cette entrevue, Lefco revenait notamment sur ses premières années d’enseignement en contexte minoritaire, sur la création de la DSFM, sur les luttes identitaires menées dans les écoles, mais aussi sur son amour de la littérature, son attachement au théâtre, et son admiration pour la jeunesse francophone. Ce portrait est aujourd’hui d’autant plus précieux qu’il complète le manuscrit qu’elle nous laisse : l’un pose les repères, l’autre nous fait entrer dans la salle de classe, au cœur des liens tissés avec ses élèves.

À toutes celles et ceux qui ont croisé la route de Lefco Doche — anciens élèves, collègues, parents, amis —, nous vous invitons à lire ce texte comme une lettre d’adieu pleine de gratitude et de confiance.

Chère Lefco, vous nous avez transmis bien plus qu’un manuscrit. Vous nous avez laissé une mémoire, une énergie, un regard. Vous nous avez tendu un miroir où se reflètent les visages de nos enfants, de nos écoles, de notre culture francophone vivante et résiliente. Merci, du fond du cœur.