Marcel Debreuil en 2000
Marcel Debreuil en 2000

Le décès de Marcel Debreuil laisse sa famille, ses anciens élèves et la communauté artistique francophone dans le deuil.

Daniel BAHUAUD

Enseignant et artiste multidisciplinaire reconnu pour ses toiles surréelles, ses sculptures fantaisistes et l’énorme cercle de menhirs qu’il a érigés près de Morden, Marcel Debreuil est décédé le 18 juillet à l’âge de 67 ans, emporté par un anévrisme.

« C’est une vraie perte, lance l’artiste Roger Lafrenière, qui a complété ses Beaux-arts à l’Université du Manitoba avec le défunt. Marcel était un artiste dont l’œuvre est difficile à catégoriser. Et c’est bonne chose. Il voulait tout essayer, tout faire. Lorsqu’il était trop à l’aise dans sa façon de faire, il essayait une nouvelle technique, ou bien même un nouveau médium. En plus de peindre, il a pratiqué la sculpture, la céramique et a conçu et arrangé des groupements mégalithiques. Il a également été poète. »

Le natif de Notre-Dame-de-Lourdes a exposé ses premières toiles en 1972, à Winnipeg, alors qu’il complétait son programme de Beaux-arts. « Un groupe de Franco-Manitobains a organisé Le Krysdemodybo Show à la galerie Perfumo sur la rue Osborne, se rappelle l’artiste Marcel Gosselin, qui était de la partie. J’ai adoré ses toiles. Elles étaient hautes en couleurs et débordaient d’éléments oniriques, comme s’il avait capté ses rêves pour les traduire fidèlement sur la toile. Par contre, pour réaliser sa vision, il faisait appel à une technique très précise et évoluée. Le contexte était surréaliste, mais la technique était réaliste. »

Comme l’explique son fils, Robin Debreuil, ces deux éléments complémentaires de ses toiles se reflétaient dans la personnalité de leur créateur. « Papa était à la fois décontracté et spontanée, ainsi que très précis, voire méticuleux, soutient Robin Debreuil. C’est, je crois, la raison pour laquelle la communauté pédagogique de Winkler est allée le retrouver, afin qu’il enseigne l’art au niveau secondaire. Papa appréciait la diligence des Allemands. Eux, pour leur part, appréciaient l’aspect désinvolte de sa personnalité. Il est resté au Garden Valley Collegiate pendant près de 20 ans. »

En plus d’avoir coordonné, en 2000, une exposition de toiles de Marcel Debreuil au Centre culturel franco-manitobain, l’artiste Nicole Coulson a été son élève au Collège Louis-Riel. « C’était un pédagogue né, lance-t-elle. Il adorait parler d’art avec ses élèves et a su me communiquer sa passion. Bien sûr, il nous transmettait ses connaissances. Mais il nous a aussi transmis ce qu’il était. Il avait le don de reconnaître le potentiel de chacun de ses élèves. Et il acceptait tout le monde sans jugement, jeunes ou moins jeunes, indépendamment de leur statut social, y compris les marginaux. Au fond, c’était un homme très spirituel. »

En effet, Marcel Debreuil, bien que de souche française, était très attiré par l’art et la spiritualité autochtone. Et, comme bien des gens de la génération des Baby Boomers, l’esprit de Woodstock l’avait pénétré.

« Il n’était ni Autochtone, ni Métis, mais cette culture l’a profondément touché, affirme Robin Debreuil. Il était fier de sa langue et de ses racines françaises, mais la culture autochtone était en quelque sorte sa deuxième culture, celle qu’il avait choisie.

« Papa avait aussi une fascination pour les mégalithes qu’il avait vus en Europe, où il a également enseigné, poursuit-il. Au point où ma mère, Joyce, et lui ont passé presque dix ans à ériger leur propre Stonehenge. Ils l’ont terminé en 1998, après quoi Papa s’y rendait souvent pour se recueillir. »

Le legs artistique de Marcel Debreuil a non seulement été transmis à ses anciens élèves, mais aussi à ses enfants et ses petits enfants. Ses fils Robin et Sandy Debreuil ont une entreprise d’animation infographique. De plus, Sandy a réalisé une bande dessinée, Crowbar Benson. Ses filles Carmel et Chérie Debreuil sont également artistes-peintres. « Papa a également appris à ma fille, Summer, à dessiner des portraits, fait remarquer Robin Debreuil. Elle comptait visiter Paris au mois d’août avec son grand-père pour améliorer sa technique. C’est dommage. Il nous manquera. »

(1) Une célébration publique de la vie de Marcel Debreuil aura lieu le 31 juillet, de 14 h à 18 h au Centre récréatif de Morden.