Par Thibault JOURDAN | TW : @OropherDorthoni

Il y a 30 ans, un avion en difficulté d’Air Canada atterrissait en planant sur l’aéroport de Gimli. Un documentaire de Radio-Canada revient sur cet évènement qui a marqué l’histoire de l’aviation canadienne.

Marc-Yvan Hébert
Le journaliste Marc-Yvan Hébert a rencontré plusieurs acteurs et témoins clés de l’événement pour son reportage.

Les Manitobains nés à l’époque s’en souviennent encore. « J’avais 12 ans », se rappelle le journaliste de Radio Canada Marc-Yvan Hébert. L’histoire du planeur de Gimli a frappé les esprits et est restée dans les annales de l’histoire de l’aviation. À tel point que l’émission hebdomadaire Tout le monde en parlait de Radio Canada revient sur cet évènement dans un numéro diffusé le 30 juillet prochain. Le documentaire sera aussi projeté au festival du film de Gimli le 25 juillet, en présence du pilote, Robert Pearson.

Le 23 juillet 1983, le vol 143 de la compagnie Air Canada doit relier Montréal à Edmonton, en Alberta, via Ottawa. Après une première partie du voyage qui s’est déroulée sans encombre entre Montréal et Ottawa, et alors que le Boeing 767 s’approche doucement de la frontière entre l’Ontario et le Manitoba, le système d’alerte du cockpit émet plusieurs bips indiquant un problème de pression de carburant. Le pilote, Robert Pearson, et le copilote, Maurice Quintal, pensent alors qu’une des pompes à carburant ne fonctionne plus. Un peu plus tard, une deuxième alerte retentit et un premier moteur tombe en panne. Il ne faudra que quelques minutes pour que le second moteur s’arrête à son tour. La raison : réservoirs vides. La cause : une erreur de calcul dans la converstion de la masse au volume dans le système métrique, alors que le Canada venait tout juste d’abandonner les mesures impériales.

L’avion se trouve à ce moment-là à plus de 12 000 mètres d’altitude, sans moteur et sans alimentation électrique. À l’époque, le Boeing 767 était un appareil récemment incorporé à la flotte d’Air Canada et le manufacturier américain a remplacé les instruments mécaniques de navigation par des écrans électroniques. En clair, les pilotes naviguent à vue.

Robert Pearson et Maurice Quital prennent la décision de tenter un atterrissage d’urgence sur une ancienne piste militaire à Gimli, Winnipeg étant trop loin pour être atteinte en planant. Néanmoins, la piste ne disposait ni de tour de contrôle ni d’équipes d’urgence au sol. « Par chance, Maurice Quintal avait fait sa formation avec les forces armées et connaissait la piste de Gimli, indique Marc-Yvan Hébert, qui a rencontré l’ancien copilote pour son reportage. Robert Pearson, lui, était un ancien pilote de planeur. »

Après une vingtaine de minutes passées en planant dans les airs, l’avion atterrit tant bien que mal sur la piste de Gimli. « Maurice Quintal pensait que cette piste était désaffectée, or elle était utilisée pour des courses automobiles. Ce 23 juillet 1983, des familles s’y trouvaient et ont été témoins de l’atterissage forcé », raconte le journaliste de Radio Canada. À l’arrivée, la soixantaine de passagers et la dizaine de membres d’équipages sont saufs et s’en sortent avec quelques contusions et égratignures.

Le planeur de Gimli (The Gimli Glider).
Le documentaire, Le planeur de Gimli (The Gimli Glider), sera aussi projeté au festival du film de Gimli le 25 juillet, en présence du pilote, Robert Pearson.

Plusieurs mois de tournage, six témoins

Le tournage du reportage de Marc-Yvan Hébert, réalisé par Christine Gosselin, a pris plusieurs mois. Le journaliste a parcouru le Canada et les États-Unis pour retrouver des acteurs et témoins clés de l’évènement : « J’ai rencontré Robert Pearson à Winnipeg, Maurice Quintal et Robert Desjardins, le chef de cabine, en Floride, raconte-t-il. Kerry Seabrook, lui, avait 12 ans à l’époque et se trouvait sur la piste où l’avion a atterri. Pearl Dion, qui réside à Vancouver, était passagère. Enfin, une commission d’enquête ayant été mise en place par la suite, j’ai pu parler avec sa directrice, Claudette Plouffe. »

Après cet incident, Robert Pearson et Maurice Quintal ont continué à voler, ce dernier étant même devenu capitaine. L’avion aussi a poursuivi ses vols jusqu’en 2008, année où il a été envoyé au cimetière des avions dans le désert californien de Mojave. Lors de son dernier voyage, Robert Pearson et Maurice Quintal avaient été invités, comme pour dire au revoir à leur compagnon d’infortune.