À vous la parole
La Liberté – mai 2015

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Le rôle de l’individu pour que vive la langue

Monsieur le rédacteur,

Je tiens d’abord à féliciter Bernard Bocquel de sa récente série d’excellents éditoriaux dans laquelle vos lecteurs et lectrices ont sûrement trouvé matière à réflexion. Je vous écris en réaction à ses propos sur la francisation.

Lorsque je vivais à Vancouver – entièrement en anglais, je l’admets bien volontiers – je me suis rendu compte à un moment donné que j’étais en train de perdre mon français. Chez certains, une pareille constatation aurait pu rester sans conséquence. Dans mon cas particulier, vu que j’ai toujours été passionné par la langue comme moyen de communication, cette crise de conscience a eu l’effet d’une bombe. Pour remédier à la situation, je suis allé m’inscrire peu après à un cours de littérature française à l’université. Et, sans vouloir vous ennuyer davantage avec les détails de ma vie estudiantine, j’ai simultanément entrepris des études en linguistique, en particulier sur l’acquisition de la langue et le fonctionnement social du langage. J’espère que les propos suivants, inspirés par ce contexte, serviront de complément utile aux pensées de l’éditorialiste.

Il est clair que lorsqu’on parle de langue et de culture, il faut aussi parler du rôle de l’individu face à sa collectivité. Voici deux exemples :

Un Manitobain bilingue m’a mentionné un jour que, d’après lui, le seul « bon français » était celui de la région de Paris, laissant évidemment entendre que son propre français ne valait pas cher. (Combien souvent, en passant, a-t-on cité le « français parisien » comme seul modèle pour la planète? Il est également utile de noter ici le phénomène de statut linguistique inverse, selon lequel le français québécois – comme s’il s’agissait d’une entité monolithique – est souvent critiqué par des gens unilingues qui le pensent atroce.) Quoi qu’il en soit, ce commentaire m’est resté non pas parce qu’il est vrai que le français de chez nous fait souvent l’objet de dégradations de toutes sortes, mais bien puisqu’il désigne clairement un manque de confiance linguistique prodigieux de la part de l’interlocuteur. Si un tel complexe d’infériorité linguistique chez l’individu devait se propager à la majorité des membres de la collectivité, il serait vite évident que celle-ci en souffrirait les effets néfastes considérables.

À une autre occasion, j’étais debout sur le trottoir devant Mrs. Mike’s, restaurant bien connu de la rue Taché à Saint-Boniface, où j’avais passé ma commande. À ma gauche se trouvait un client qui, lui aussi, attendait sa commande, les mains dans les poches. Un troisième monsieur, arrivé du stationnement à ma droite et ayant reconnu l’individu à mes côtés, l’a salué en disant : « Tiens, salut toi, comment ça va? » L’autre de répondre : « Ça va bien. » C’est alors que la conversation a changé à l’anglais et c’est ainsi qu’elle est restée jusqu’à ce que la dame de l’autre côtée de la fenêtre coulissante fasse signe à l’individu pour lui indiquer que sa commande était prête. La conversation a donc pris fin : « OK, salut, on se reverra. » La morale sociolinguistique de cette histoire est très simple : si je n’avais pas entendu les cinq premières ni les cinq dernières secondes de la conversation, j’aurais cru qu’il s’agissait de deux anglophones unilingues qui partageaient les mêmes goûts que moi en fait de hamburgers et de frites. En public, ils ont jugé nécessaire d’enterrer leur capacité de parler français, en plein cœur du soi-disant « quartier français » de Winnipeg.

Que ce soit au niveau de l’individu ou sur le plan de la société, un des principaux objectifs de toute politique nationale, provinciale ou municipale en matière de langues officielles est de normaliser l’utilisation du français et de l’anglais dans la vie quotidienne. Par « normaliser », je veux dire créer des conditions psychologiques et sociales qui permettent, à l’extérieur du Québec, tant l’usage du français que de l’anglais, en fonction des circonstances. La question de la confiance linguistique revêt ainsi une importance toute particulière dans un milieu minoritaire comme le nôtre, surtout à la lumière d’une étude sociolinguistique effectuée récemment en Grande-Bretagne.

En termes généraux, la question à laquelle on cherchait à répondre était la suivante : y a-t-il un facteur en particulier qui influence l’usage de la langue et, dans l’affirmative, quel est-il? Est-ce les parents? L’école? Le gouvernement? Non. La plus grande influence sur l’usage de la langue, c’est le parler des gens avec qui on vit en société; en d’autres mots, ce que nos oreilles entendent au quotidien. Je me souviens avoir été déçu à l’annonce de ces résultats car, à mon humble avis, ils allaient de soi. Au risque de sombrer dans la banalité, c’est précisément ce qui explique pourquoi les gens de tous les pays et de toutes les régions du monde parlent comme ils le font, compte tenu d’innombrables variations régionales et nationales. C’est ce qui explique pourquoi le français de Notre-Dame-de-Lourdes, par exemple, comprend des particularités que l’on ne retrouve pas dans le français de Saint-Norbert.

Pour conserver ou améliorer ses habiletés langagières, on a chacun un rôle personnel à jouer et on ne peut se permettre de laisser aux autres la responsabilité d’assurer la survie de la langue française. Malheureusement, la francophonie manitobaine ne jouit pas de la masse critique que l’on retrouve au Québec ou même au Nouveau-Brunswick. Par contre, le Manitoba compte toujours bon nombre de personnes suffisamment bilingues qui trouvent les moyens de moyenner malgré les effets écrasants de la langue dominante. D’où l’importance de la francisation, des écoles, des États généraux, de La Liberté, des décisions de la Cour suprême, et ainsi de suite.

Bruno LeGal | Le 30 avril 2015

separateurHommage à un grand sénateur

Monsieur le rédacteur,

La nomination du sénateur Pierre Claude Nolin à titre de président du Sénat avait été reçue, en novembre 2014, avec un appui enthousiaste et unanime.

Quiconque connaissait de près ou de loin le sénateur Nolin savait qu’il était un homme intègre, intelligent, et farouchement indépendant. Sa nomination à la présidence représentait, pour nous sénateurs, un symbole de l’avenir du Sénat.

Notre institution se trouve en deuil depuis son décès le 23 avril dernier. En deuil non seulement d’un collègue respectueux, d’un brillant législateur et d’un président d’une parfaite droiture, mais aussi d’un leader qui incarnait, presqu’à lui seul, toutes les réussites et tout le potentiel du Sénat.

Notre président nous a guidés, pendant son trop bref mandat, avec énergie et vision. Il a mené par l’exemple jusqu’à la toute fin, nous informant de son état de santé par souci de transparence.

Le sénateur Nolin comprenait mieux que quiconque la raison d’être du Sénat, et en était son plus ardent défenseur. Il a réussi, avec son travail acharné, à laisser son empreinte sur l’identité même du Sénat.

Le Canada et sa démocratie parlementaire en sont à tout jamais enrichis.

Maria Chaput | sénatrice | Le 28 avril 2015

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Repartir sur un ton plus harmonieux

Monsieur le rédacteur,

En cette année 2015, l’Archidiocèse de Winnipeg célèbre son centenaire. Je me réjouis de tous les bons rêves et les intuitions qui ont permis aux Communautés chrétiennes de se développer et de grandir dans la foi. Cependant, je demeure consciente qu’il y eut des injustices qui pourraient faire dire aux francophones de l’Archidiocèse de Winnipeg « quel sens prendront les fêtes du centenaire? »

L’Archidiocèse de Winnipeg a été érigé en décembre 1915 suite à un mouvement de contestations mené par un groupe de catholiques anglophones qui voulaient annihiler l’influence néfaste du nationalisme canadien français “That the blight of French-Canadian Nationalism may be remove” (1), qu’ils trouvaient trop présent au sein de l’Église de Saint-Boniface. Cet antagonisme entre catholiques canadiens-français et canadiens-irlandais était une manifestation locale de ce qui se vivait à l’échelle nationale. Il ne faudrait pas passer sous silence le discours de Mgr Bourne, archevêque de Westminster en Angleterre, au Congrès eucharistique tenu à Montréal en 1910, qui soutenait que dans le Canada qui se développait il fallait à l’avenir allier la religion catholique et la langue anglaise; ainsi l’Église catholique grandirait et serait beaucoup plus forte : « … si la puissante nation que le Canada deviendra doit être gagnée et gardée à l’Église catholique, cela ne s’accomplira qu’en faisant connaître à une grande partie du peuple canadien, dans les générations qui vont suivre, les mystères de notre foi par l’intermédiaire de notre langue anglaise. » (2) Donc les catholiques francophones sont invités à renoncer à leur langue et à s’unir aux Irlandais pour le plus grand bien du catholicisme. (3)

Ce fut ce même courant qui poussa les catholiques irlandais à demander la nomination d’un archevêque anglophone pour Saint-Boniface, sinon l’établissement d’un archidiocèse pour les anglophones à Winnipeg.

Certains diront qu’il ne faut pas demeurer attaché au passé, car c’est une époque révolue, et qu’il faut regarder vers l’avenir. N’est-ce pas aussi vrai de dire qu’en découvrant son histoire on risque moins de refaire les mêmes erreurs?

Qu’en est-il du présent? Est-ce que l’on se préoccupe des francophones et des autres communautés paroissiales nationales dans l’Archidiocèse de Winnipeg? Comment ces communautés sont-elles soutenues dans leur pastorale? Est-ce que l’on respecte leur langue? C’était une question de langue et de culture au début du XXe siècle. N’est-ce pas que ce même problème perdure depuis 100 ans?

Pourquoi utilisons-nous une seule langue – anglaise – au sein de l’Église diocésaine de Winnipeg (textes, communications, agents de pastorale, site web, etc.)? Est-ce pour rendre l’Église diocésaine plus forte et plus unie ou est-ce pour simplifier le travail du ministère?

Les paroisses francophones sont laissées à elles-mêmes. Oui, bien sûr, on nous dit de nous adresser au Centre de pastorale de Saint-Boniface pour des ressources et des consultations en français, mais qu’en est-il de la vision diocésaine à laquelle nous pouvons adhérer? À aucune. Ni à celle de Saint-Boniface, ni à celle de Winnipeg, car non seulement les langues sont différentes, mais également les visions.

Peut-être que le Synode dont parle Mgr Gagnon sera l’occasion de permettre aux différentes communautés paroissiales de s’exprimer dans leur langue et de prendre part à la Vision du diocèse ainsi qu’au processus accepté.

Le Centenaire de l’Archidiocèse de Winnipeg est certainement l’occasion de reconnaître et de célébrer ce qui a été réalisé depuis 100 ans.

Ne serait-il pas aussi l’occasion de remercier les Oblats de Marie Immaculée d’avoir cédé l’église Sainte-Marie (aujourd’hui St. Mary) qui leur appartenait pour en faire la Cathédrale du nouveau diocèse; les remercier aussi d’avoir payé la dette de la paroisse Sainte-Marie qui s’élevait aux environs de 250 000 $.

Y aurait-il lieu d’adresser des excuses? Excuses auprès de l’Archidiocèse de Saint-Boniface bien sûr, mais aussi des excuses auprès des Communautés paroissiales de langue française qui en 1915, du jour au lendemain, se sont fait couper de toute aide pastorale en français.

Au-delà de tout ce que je viens d’exprimer, je pardonne à toutes les personnes de l’Archidiocèse de Winnipeg qui, consciemment ou inconsciemment, ont créé des injustices à travers les années, parce qu’en ce début du 2e centenaire je désire que l’on reparte sur un ton plus harmonieux, plus limpide et plus respectueux. Nous devrons tous ouvrir nos cœurs afin que chaque groupe puisse partager ses dons et talents pour enrichir tout l’Archidiocèse de Winnipeg et le Manitoba.

(1) Pétition envoyée au Pape Benoît XV en 1914-1915, Archives de l’Archidiocèse de Winnipeg, page 19. Vous trouverez des références à cette pétition dans : Robert Choquette Adélard Langevin et l’érection de l’Archidiocèse de Winnipeg; Susan Wikeem, s.n.j.m., The Canonical Erection of the Archdiocese of Winnipeg, Part 1 : To 1915; Jeannette Martin 100 ans et plus d’engagement et de luttes pour vivre en français à Winnipeg, chapitre 6.

(2) Discours de Mgr Francis Bourne [En ligne]

(3) Huel Raymond, The Irish French Conflict in Catholic Episcopal Nominations: The Western Sees Struggle for Domination Within the Church. [En ligne]

Jeannette Martin | Le 5 mai 2015

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Souligner l’apport des cultures étrangères

Monsieur le rédacteur,

Bonjour! J’aimerais partager mon opinion à propos de deux sujets : les États généraux et le mois du patrimoine asiatique.

Au sujet des États généraux de la francophonie, je trouve entre autres les articles de La Liberté très intéressants. J’ai participé à des cafés citoyens. Les discussions furent enrichissantes.

Selon moi, l’intégration à une communauté, à une région, à une province constitue un apprentissage individuel et graduel. L’entourage, les amis, les collègues au travail, au gymnase ou ailleurs contribuent et influencent notre adaptation.

En fonction de nos attentes et des réalités que nous côtoyons, nous sommes appelés à réagir et surtout à intervenir afin de satisfaire davantage notre bien-être et notre épanouissement personnel et collectif.

J’apprécie la démarche des États généraux. Toutefois, je me demande encore comment les renseignements recueillis seront utilisés et traités. Les expériences de chacun fourmillent et il est parfois difficile de généraliser, malgré des points communs et des tendances. Qui fera quoi, quand et avec quels résultats?

En ce qui concerne le mois du patrimoine asiatique, je remercie La Liberté d’avoir pris le temps de souligner l’apport des cultures étrangères à notre milieu en constante évolution.

Je suis bénévole depuis sept ans pour l’organisme humanitaire manitobain École pour les enfants du Laos (School for Kids in Laos). J’ai constaté à quel point notre milieu bénéficie de leur héritage.

Nous accueillons ici au Manitoba des Laotiens depuis plus de 30 ans. Des Franco-Manitobains ont fait preuve d’un grand dévouement afin de secourir des réfugiés à l’époque.

Aujourd’hui des Laotiens du Manitoba et des citoyens du monde veulent aider des enfants vivant dans des villages pauvres du Laos afin de leur obtenir une éducation et leur bâtir un avenir.

SKL Inc. ramasse des fonds permettant la construction d’écoles et l’approvisionnement en eau. Nous tenons spécialement à remercier les Manitobains qui, au fil des ans, démontrent qu’ils sont à la fois sensibles et généreux.

Grâce à vous, nous avons réussi à construire quatre écoles. Des Manitobains iront au Laos en décembre pour l’inauguration de la cinquième école. Et notre actuelle campagne de financement permettra aux enfants du village de Donesok d’avoir d’ici quelques années une école primaire sécuritaire.

Notre banquet annuel, Saveurs du Laos, aura lieu le samedi 13 juin à la salle communautaire Précieux-Sang à 18 h.

Vous pourrez apprécier le métissage des cultures. Les billets sont disponibles d’ici au 5 juin au 233-AllÔ ou sur notre site sklinc.org.

Merci aux Manitobains.

François M. Tremblay | Le 22 mai 2015