La soirée de la remise des prix a été dédiée à Paul de Moissac, qui a reçu le prix dans la catégorie Santé et services sociaux, et Claire Desrosiers, qui a remporté le prix dans la catégorie Arts et culture (1). Le Théâtre Cercle Molière, qui a accueilli la soirée, a rassemblé les proches de ces deux Franco-Manitobains influents.

Un bébé au bras, Paul de Moissac discutait avec ses amis et sa famille. Plus tard en entrevue, il admet avoir du mal à comprendre pourquoi on lui avait accordé le prix. « Quand Daniel Boucher m’a appelé pour me dire que j’avais reçu le prix Riel j’ai dit : Oh OK… jamais je ne m’attendais à ça. »

Pourtant, les efforts et contributions du médecin ne sont pas minimes. En 40 ans d’histoire du prix Riel, la récompense pour Santé et services sociaux n’a été accordée que cinq fois, six avec Paul de Moissac. « Après qu’on m’ait dit que j’allais recevoir le prix, j’ai regardé en arrière pour me demander : Qu’est-ce que j’ai fait? En regardant la liste de toutes les choses qui avaient été faites, je me suis dit : Oui, je suppose qu’on en a fait, des choses. »

Un bénévole à jamais

Comme médecin, Paul de Moissac a apporté une aide indispensable à la communauté. Mais il ne pouvait pas s’arrêter là. « J’ai fait beaucoup de bénévolat, au point où quand je rentrais chez moi pour en parler à ma femme, elle s’exclamait : Encore un conseil d’administration de plus! »

Il tient d’ailleurs à remercier sa femme, Monique de Moissac, pour son appui tout au long de sa carrière de médecin comme de bénévole. « On a eu cinq enfants. Ça aurait été impossible de faire tout le bénévolat et le travail que j’ai fait sans son appui. » Ce travail d’équipe fonctionnait aussi inversement. Quand elle partait faire du bénévolat, c’était au docteur de surveiller les enfants.

Le bénévolat est un héritage pour Paul de Moissac. « Mon père faisait beaucoup de bénévolat à Saint-Claude, où j’ai grandi. Il aidait à imprimer La Gazette, le journal local, il était entraîneur de hockey, il siégeait sur des comités de la Caisse, il faisait vraiment de tout pour aider sa communauté. J’ai eu un exemple de cette manière-là. »

Défendre le français

Ce sont aussi ses parents qui lui ont assuré une éducation en français, un aspect de sa vie qui l’a certainement poussé à défendre cette langue. « À l’époque, pour avoir une éducation en français, il fallait aller au Collège de Saint-Boniface. C’est là-bas que j’ai fait mon secondaire et mon baccalauréat en sciences. »

Attiré par la médecine, une continuité de ses études en sciences, il a décidé d’entrer à la Faculté de médecine en anglais au Manitoba. « J’avais pensé aller étudier ailleurs et en français. Je pense que j’avais été accepté à l’Université d’Ottawa, mais à l’époque, leur programme bilingue était surtout anglophone. De toute façon, mon père était décédé au cours de ma 12e année et j’aidais beaucoup ma mère, mes sœurs et mes frères, qui sont plus jeunes que moi. »

Ses études accomplies, il était temps pour Paul de marier ses habiletés de médecin à son attachement à la langue française. « Une fois que j’ai rejoint les médecins de Sainte-Anne, j’ai rapidement été l’un des plus anciens. Il y avait toute une vague de retraites. »

Dans son nouveau rôle à l’hôpital, il fallait fournir des soins dans la langue de préférence de ses patients. « La majorité des Franco-Manitobains parlent anglais aussi. Mais quand on est malade, c’est tellement plus facile de s’exprimer dans sa langue maternelle. À cette époque-là, il n’y avait pas vraiment de politique linguistique. Avec Edmond Labossière, on a travaillé pour mettre en place une politique linguistique suivant le rapport Chartier (2). »

Le docteur Paul de Moissac n’a pas encore fini ses efforts pour aider sa communauté et répandre les soins en français. « C’est un travail qui n’arrête vraiment jamais. Les gens ont besoin de soins et je peux en donner. Mais je vais peut-être ralentir un peu maintenant. »

Il se tourne vers les pro- chaines générations et les prépare au travail à venir. « Il y a des pénuries de médecins partout, ça risque d’être un défi pendant longtemps. »

(1) Retrouvez le portrait de Claire Desrosiers dans notre édition du 24 au 30 mai 2023.

(2) Un rapport présenté au gouvernement du Manitoba par le juge Richard Chartier portant sur des recommandations sur les services en français. Il porte le titre bilingue Avant toute chose, le bon sens ou Above all, common sense.