FRANCOPRESSE – La Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada estime qu’Ottawa doit augmenter de 300 millions $ son financement pour les organismes œuvrant en milieu minoritaire afin d’éviter le pire dans le secteur.

Marc Poirier – Francopresse

Après avoir sondé 188 organismes de la francophonie canadienne en milieu minoritaire, la FCFA fait le constat que la plupart d’entre eux opèrent en mode survie, au point où plusieurs pourraient disparaitre, faute de ressources.

Ce sombre tableau est décrit en détail dans le rapport Éviter le point de rupture dévoilé le 5 octobre.

« Voilà déjà deux décennies qu’on demande à nos organismes et institutions de faire plus avec moins », a indiqué la présidente de la FCFA, Liane Roy, en conférence de presse. « Sur les 188 organismes qui ont participé à notre étude, un sur quatre ne dispose que d’un ou d’une employé·e ou moins. Soixante-trois pour cent ne disposent pas d’un budget suffisant pour faire le travail qu’on attend d’eux. Un sur six est en situation déficitaire chronique. »

Liane Roy, présidente de la FCFA. (photo : gracieuseté)

Résultat, la charge de travail est plus élevée qu’elle le devrait, le roulement de personnel et la pénurie de main-d’œuvre sont à la hausse et plusieurs directions sont épuisées ; certaines devant travailler 60 heures par semaine pour un maigre salaire annuel de 35 000 $.

« La francophonie en milieu minoritaire est proche, trop proche du point de bascule où plusieurs organismes pourraient simplement disparaitre, faute de ressources », souligne le rapport.

La FCFA soulève aussi le fait que cette situation précaire se vit alors que le français est en déclin partout au pays, comme l’ont démontré les derniers rapports de Statistique Canada.

300 millions $ de plus dans le prochain Plan d’action

Pour renverser la vapeur, la Fédération compte sur une intervention musclée du gouvernement fédéral. Elle demande que le prochain Plan d’action pour les langues officielles consacre 300 millions $ de plus afin de soutenir les organismes des milieux minoritaires francophones.

De cette somme, la FCFA propose que 280 millions $ soient injectés dans le financement de base des organismes. Une somme de 20 millions $ irait dans un fonds d’innovation pour les organismes qui souhaitent explorer de nouveaux modèles d’opération. On veut aussi que ces montants soient indexés au cout de la vie.

« Trop longtemps, on a demandé à nos organismes et à nos institutions de faire plus avec moins », ajoute Liane Roy. Trop longtemps, on a balayé du revers de la main leur épuisement et leur manque de ressources en se disant, qu’une fois de plus, ils passeraient au travers en étirant encore et encore l’élastique. »

La grande majorité du montant revendiqué servirait à bonifier de 66 % le financement de base des organismes qui reçoivent présentement de l’aide fédérale, alors que des fonds iraient aussi à ceux qui n’ont pas de financement actuellement.

Pourquoi 66 %? « C’est le montant dont les organismes nous ont dit avoir besoin pour respecter leur mandat », explique celui qui a dirigé l’étude, Peter Thompson.

Le prochain plan d’action

La ministre des Langues officielles, Ginette Petitpas Taylor, a parcouru le pays tout l’été pour mener des consultations dans les communautés de langues officielles en situation minoritaire afin de connaitre leurs besoins en matière de financement.

Ginette Petitpas Taylor est la ministre des Langues officielles et ministre responsable de l’agence de promotion économique du Canada atlantique. (photo : Ophélie Doireau)

L’actuel plan d’action pour les langues officielles, qui couvrait la période de 2018-2023, arrive à échéance le 31 mars 2023. Son enveloppe totale était de 2,7 milliards $, une augmentation de 500 millions $ comparativement au plan d’action précédent. La ministre devrait déposer un nouveau plan d’action qui s’échelonnera de 2023 à 2028 d’ici au 31 mars prochain.

[Même si les consultations se sont terminées en aout], « je pense pas qu’on arrive sur le tard, assure Liane Roy. Le processus budgétaire va commencer un peu plus tard ce mois-ci. Je pense qu’on est en plein dans les temps pour démontrer, en plus de ce que la ministre a entendu, que nous on a fait l’effort de chiffrer avec notre étude ce que ça prend pour le financement de base des organismes. »